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Benyamin Netanyahu vitupère contre le vote français sur la Palestine

Terresainte.net
25 novembre 2014
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Benyamin Netanyahu vitupère contre le vote français sur la Palestine
Benyamin Netanyahu lors d'une conférence de presse aux médias français, 23 novembre 2014 (photo: Alex Kolomoisky/Pool/Flash90)

Le premier ministre israélien a condamné dimanche dernier le prochain vote du Parlement français sur une reconnaissance de l’Etat palestinien. Qualifiant cette résolution de « grave erreur », Benyamin Netanyahu juge l’initiative « irresponsable ».


(Jérusalem/n.k.) – Pour Benyamin Netanyahu, la position du gouvernement israélien est claire : le mouvement européen actuel de reconnaissance de la Palestine n’est bon qu’a être condamné.

Accordant une interview dimanche dernier à la chaîne franco-israélienne i24news, le Premier ministre a largement évoqué le vote qui devrait se tenir le 2 décembre prochain à l’Assemblée nationale française : « Bien sûr que le vote du Parlement français nous inquiète, c’est même irresponsable. La reconnaissance d’un Etat palestinien par la France serait une grave erreur » a-t-il souligné.

Israël a de quoi s’inquiéter. Depuis la fin de la guerre à Gaza (qui s’est conclue par une cessez-le-feu le 26 août dernier), de nombreux parlements européens se sont prononcés en faveur de la reconnaissance d’un Etat palestinien. La Grande-Bretagne, l’Irlande et l’Espagne ont dores et déjà voté pour. Jeudi prochain, ce sera au tour du Parlement européen de voter une motion de reconnaissance. Ces motions ou résolutions restent non-contraignantes pour les gouvernements, qui peuvent choisir de ne pas suivre leurs Parlements. A ce jour, seule la Suède a officiellement reconnu la Palestine par voie gouvernementale.

Pour Netanyahu, reconnaître l’Etat de Palestine équivaut à légaliser un Etat terroriste : « Ce que la France veut faire, c’est donner aux Palestiniens un Etat, sans paix, pour qu’ils puissent continuer à faire la guerre. Chaque fois que l’Etat hébreu avait donné des territoires aux Palestiniens, l’Iran – au travers des islamistes – s’y introduisait, et des milliers de roquettes étaient tirées sur les villes israéliennes. » Le raccourci est habituel dans la bouche du Premier ministre israélien. Ce qui l’est moins, c’est la clarté avec laquelle il justifie la colonisation en parlant de « donner des terres », comme si la Cisjordanie et Gaza faisaient partie de l’Etat d’Israël.

Il serait cependant erroné de croire que l’ensemble de la société israélienne partage les prises de position de son Premier ministre. Récemment, près de 660 personnalités israéliennes ont appelé à reconnaître la Palestine.

C’est le cas d’Elie Barnavi, ancien ambassadeur d’Israël en France, qui a clairement pris position pour une main tendue aux Palestiniens : « Évidemment, un État palestinien viable ne sortira pas de telle ou telle déclaration. Cela se jouera sur le terrain. Une fois que l’État palestinien sera proclamé, il faudra négocier sa mise au monde, ses frontières, sa configuration, son caractère. Mais l’existence même d’un tel État bouleverserait la nature des négociations qui impliqueraient non plus une autorité improbable, mais un État reconnu par la communauté internationale. Ipso facto, cela rendrait l’occupation illégale. Elle l’est déjà, mais cela deviendrait évident aux yeux de tous. Israël serait reconnu comme occupant le territoire d’un État souverain ».

La colonisation reste peut-être le problème majeur qui pousse les parlements européennes à franchir une étape nouvelle. Ces implantations illégales en territoire palestinien font réagir l’Europe. Mais elles sont aussi, pour beaucoup d’observateurs, le triste indice de l’impossibilité de voir advenir un Etat palestinien souverain.

Charles Enderlin, spécialiste du conflit israélo-palestinien n’est pas optimiste : « C’est fini ! Tout le monde sait en Israël que le processus de paix est mort. A Ramallah, lorsque je rencontre des dirigeants palestiniens, je leur demande : « Croyez vous que vous aurez un Etat, avec 380 000 colons ? Croyez-vous que les juifs vont vous donner la souveraineté sur les quartiers arabes de Jérusalem-Est, sur l’Esplanade des mosquées, qui est le troisième lieu de l’Islam, mais le seul lieu saint juif ? » Et ils me répondent : « Nous savons très bien que nous n’aurons pas d’Etat, la Cisjordanie est devenue une peau de panthère, et il n’est plus possible de créer un Etat qui ait une continuité territoriale. » Pour  Enderlin, la reconnaissance de l’Etat palestinien ne pourra qu’envenimer les choses : « C’est avant tout symbolique et ne change rien sur le terrain, si ce n’est renforcer le sentiment largement répandu en Israël : « Le monde est contre nous ! » Et donc… apporte de l’eau au moulin de la droite israélienne. »

La problème semble insoluble : plus Israël colonise, plus les Palestiniens se révoltent, et plus les Palestiniens se révoltent, plus Israël resserre l’étau sur eux.  Benyamin Netanyahu ne connaît aujourd’hui aucune opposition politique sérieuse. La communauté internationale condamne la colonisation sans prendre de réelles mesures coercitives. Et pour ne rien arranger, la Palestine peine à se donner un leader charismatique et l’image d’un pays uni.

Selon Elie Barnavi, ce serait « le pire cauchemar du gouvernement actuel d’avoir face à lui des Palestiniens unis, déterminés, guidés par des buts clairs. Cette propagande cache une vérité: il n’y a pas de partenaire de notre côté non plus ». Tout est dit.