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Exil des juifs orientaux: Israël veut demander réparation

Christophe Lafontaine
9 janvier 2019
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Exil des juifs orientaux: Israël veut demander réparation
Famille juive yéménite traversant le désert pour rejoindre un camp de transit près d'Aden (Yemen), avant de se rendre en Israël, en 1949 © Kluger Zoltan / Wikimedia Commons

Israël prévoit de réclamer une compensation à l’Iran et à sept pays arabes au nom des juifs ayant dû quitter ces pays après la création d'Israël. Une mesure qui s’inscrit dans l’attente du plan de paix américain.


Selon l’organisation Justice for Jews from Arab Countries (Justice pour les Juifs des pays arabes), 856 000 juifs issus de neuf pays arabes et d’Iran, ont – dans les années qui ont suivi la fondation de l’Etat d’Israël et le conflit israélo-arabe – fui leur pays (volontairement ou sous la contrainte, selon les pays) ou en ont été expulsés, souvent en abandonnant tous leurs biens derrière eux. Sans compter que le jeune Etat hébreu poussa aussi des organisations à favoriser l’émigration de certaines communautés juives d’Afrique du Nord.

En définitive, l’exil des juifs du monde perso-arabe sonna le glas d’une présence parfois millénaire dans la région. 800 000 d’entre eux sont arrivés en Israël à l’heure où beaucoup de pays arabes déclarèrent la guerre, ou supportèrent la guerre contre Israël.

Gila Gamliel, l’actuelle ministre israélienne de l’Egalité sociale a déclaré le 5 janvier dernier sur la chaîne de télévision Hadashot qu’il était temps de « corriger » cette « injustice historique » en restituant les biens auxquels les juifs originaires d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient ont droit.

« La lutte pour l’indemnisation des biens juifs pillés dans les pays arabes est l’une des luttes les plus importantes de mon mandat. Il est inutile de parler du Moyen-Orient sans reconnaître l’injustice faite aux Juifs. Pour tous les juifs. » a twitté le même jour la ministre qui a étudié l’histoire du Moyen-Orient à l’université Ben Gourion du Néguev.

Selon Hadashot, le gouvernement israélien entend donc demander officiellement une indemnisation. D’après la chaîne israélienne, « les demandes de restitution des biens sont déjà en cours de finalisation » avec la Tunisie (35 milliards de dollars), la Libye (15 milliards de dollars). Les autres pays concernés sont aussi le Maroc, l’Irak, la Syrie, l’Egypte, le Yémen et l’Iran. En tout, le montant du préjudice s’élèverait à 250 milliards de biens et d’actifs, selon Hadashot qui explique que le calcul a été mené par un cabinet international d’expertise comptable pour le compte de l’Etat hébreu.  A noter que l’Algérie et le Liban ne figurent pas dans la liste des pays pour lesquels des demandes de dédommagements de bien seront faites.

Cette initiative de la part d’Israël s’inscrirait d’après Hadashot dans l’attente du plan de paix israélo-palestinien prévu par l’administration américaine de Donald Trump, encore non dévoilé, et, s’imposerait alors comme condition préalable à un accord de paix, fondé comme le rappelle le Times of Israel, sur une loi israélienne datant de 2010, stipulant que tout accord de paix israélo-arabe devra comporter une indemnisation pour les avoirs des juifs qui furent contraints à l’exil, originaires des pays arabes et d’Iran. En 2012, un rapport du ministère israélien des Affaires étrangères avait aussi souligné la nécessité de soulever la question de ces indemnisations dans toutes les discussions avec les Etats membres de la Ligue arabe ou les Palestiniens en vue de parvenir à un accord de paix, a rappelé le HuffPost Maghreb.
On l’aura compris, une telle mesure – comme le sous-entend le Times of Israel – pourrait servir de monnaie d’échange aux Israéliens dans les négociations avec les Palestiniens, qui réclament pour leur part plus de 100 milliards de dollars de compensation pour les biens qu’eux-mêmes ont laissés sur ce qui est aujourd’hui le territoire d’Israël. Une revendication formulée il y a une dizaine d’années.