Ce soir-là, je sortais de mon bureau pour aller faire quelques courses avant de rentrer. Descendant de la porte Neuve vers la porte de Damas à pied
Ce soir-là, je sortais de mon bureau pour aller faire quelques courses avant de rentrer. Descendant de la porte Neuve vers la porte de Damas à pied, par l’extérieur de la ville, en longeant les remparts, un petit attroupement retint mon attention d’autant que la voix de celui qui parlait était portée par un mégaphone. La police surveillant alentour, je regardai plus attentivement quand il me sembla voir un homme avec une kippa enlacer un homme en douchdaché et keffieh, costume typique des Palestiniens. Je m’arrêtai donc pour m’assurer que je n’avais pas la berlue. Les derniers mois, voire les dernières années passées ici, ne m’ont pas habituée à voir des démonstrations d’amitié entre juifs et musulmans. C’est bien pourtant ce dont je suis témoin. Je suis partagée entre le désir de rester comprendre ce dont il s’agit et celui de retourner au bureau pour m’emparer de mon appareil photo. C’est ce que je choisi de faire. La montée est rude à faire en courant. Quand je reviens hors d’haleine, le groupe semble avoir disparu. Mince. Je scrute. Le mégaphone se fait de nouveau entendre. Je retrouve le groupe qui s’est étoffé sur les matches de la porte de Damas. Va que je t’embrasse, Va que je te serre dans mes bras. Ils appellent cela un «big Hug» un gros câlin pour Jérusalem.
Renseignement pris je suis au cœur d’une manifestation organisée par les « Jerusalem peace makers », les faiseurs de paix à Jérusalem. Leur discours est simple : « Assez de la politique, aimons-nous les uns les autres, nous qui sommes unis d’un même amour pour Jérusalem.» Les jeunes israéliens présents sont, pour la plupart, issus des milieux dits « alternatifs ». Ils ont surtout l’air d’alterner tabac et hachisch mais ils sont manifestement sincères dans leurs généreuses accolades. Certains, non moins sincères, semblent moins décalés. Il y a quelques chrétiens, quelques musulmans. C’est juste surprenant. Inattendu comme peut et sait l’être cette ville. Inattendue aussi la prière qui débute. Elle ne ressemble à rien des religions en présence, elle s’inspire très nettement des mantras bouddhiques et l’on répète à l’infini les mots shalom et salam, paix, tout d’abord très lentement, puis de plus en plus vite jusqu’à obtenir un rythme enivrant. Je trouve cela proprement « débile » et décevant… comment les trois grands monothéismes ont-ils besoin d’aller chercher ailleurs pour prier ensemble ? Pourtant, les deux heures que j’ai vécues avec ces gens m’ont mis du baume au cœur. Tout n’est pas perdu pour la paix à Jérusalem tant qu’il y a des gens qui veulent s’aimer/
Dernière mise à jour: 30/12/2023 01:22