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Jérusalem: le Patriarcat latin se dote d’un Conseil économique

Christophe Lafontaine
22 juin 2018
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Jérusalem: le Patriarcat latin se dote d’un Conseil économique
Siège du Patriarcat latin à Jérusalem © C.L.

L’Administrateur apostolique du Patriarcat latin de Jérusalem, a institué mardi 19 juin, un Conseil économique chargé d'assister le Patriarcat dans la gestion de ses affaires financières, économiques et administratives. 


« Des erreurs ont été commises et des décisions erronées ont été prises qui ont affecté la vie du Patriarcat, sur les plans financier et administratif », avait écrit Mgr Pizzaballa à l’occasion du carême 2017, près d’un an après sa nomination en tant qu’Administrateur apostolique du Patriarcat latin de Jérusalem. Son courrier fut à l’époque adressé à tous les évêques, prêtres, religieux, religieuses, et laïcs du diocèse. Il pointait du doigt la situation de l’Université Américaine de Madaba, première université catholique de Jordanie et affiliée au Patriarcat latin.

La première pierre de l’université avait été posée par le Pape Benoît XVI en 2009 et l’université avait été officiellement inaugurée le 30 mai 2013 en présence du roi de Jordanie, Abdallah II.  Mais à la fin de l’année 2014, le Saint-Siège avait dû intervenir pour prendre en charge des difficultés administratives et financières. Pour ce faire, une commission ad hoc, établie par la Secrétairerie d’Etat du Vatican, avait identifié son travail sous trois axes. Primo : la stabilité financière, la viabilité et la probité de l’Université. Secundo : la gouvernance et les structures administratives de l’Université. Tertio : le planning académique de l’Université. Cette commission ad hoc avait à son tour confié à un comité local d’administration, présidé par Mgr Giorgio Lingua, alors nonce apostolique en Jordanie, la mission de « suivre de près et coordonner (…) les travaux de l’Université. »

Voilà entre autres pourquoi, le 19 juin dernier, l’Administrateur qui a déjà opéré maints changements et nominations au sein de la direction du diocèse, en deux ans de mandat, a décidé de créer un conseil économique. L’organe – consultatif – sera chargé de conseiller et d’assister le Patriarche (ou en l’occurrence l’Administrateur apostolique) dans ses affaires financières, économiques et administratives, d’après les informations du site arabe d’informations chrétiennes abouna.org, que l’agence Fides a relayées.

Il s’agit d’un conseil économique qui a vocation à se réunir en session plénière trois à quatre fois par an. Il  aura pour mission d’examiner et de discuter du budget annuel préparé par le délégué financier et les bureaux administratifs du Patriarcat, de consulter les nominations dans les bureaux administratifs ainsi que les questions économiques et financières les plus importantes (telles l’achat et la vente de biens immobiliers), ainsi que le suivi des projets financés du patriarcat et de l’examen des budgets des écoles.  Le nouveau Conseil économique sera divisé en deux sous-conseils. L’un pour la Jordanie et l’autre pour Israël-Palestine. Chacun étant  appelé à se réunir une fois par mois.

De la logique et de l’esprit de l’Eglise

Pour éviter la possibilité de confusion (comprendre conflit d’intérêt) entre la gestion des ressources du patriarcat et les intérêts individuels ou familiaux, il est établi que les membres de la famille du Patriarche (ou de celui qui le remplace) ne peuvent pas faire partie du Conseil économique, jusqu’au quatrième degré de parenté.

Au total, le nouveau conseil comprend neuf membres qui seront nommés (ou renommés) tous les cinq ans. Outre le chef de l’Eglise catholique latine en Terre Sainte (le Patriarche ou l’Administrateur Apostolique) et le délégué financier du Patriarcat, le conseil compte six laïcs (trois de Jordanie, un d’Israël, un de Jérusalem et un de Palestine), tous experts du secteur économique et financier. La neuvième personne du conseil est un prêtre du diocèse. Le père Issa Hijazin. Rien ne prédisait pour autant que ce professeur d’Ecriture Sainte rejoigne le conseil. « En réalité, a-t-il confié à l’agence Fides, je n’entends rien aux questions économiques. Quand j’ai demandé à l’Administrateur Apostolique quel devrait être mon rôle, il m’a dit que je devrais simplement aider les autres membres à ne pas oublier que l’Eglise a une nature sui generis, qu’elle n’est pas une société économique à but lucratif, et donc que les questions économiques doivent également être confrontées à une logique et à un esprit différents de ce qui se passe dans les sociétés multinationales ou les sociétés financières. »

Un écho précis à la fameuse « lettre de Carême 2017 » signée par l’Administrateur apostolique qui écrivait alors : « nous avons échoué dans certains domaines importants, peut-être lorsque nous n’avons pas été suffisamment concentrés sur notre mission première : prêcher l’Evangile et nous consacrer aux activités pastorales. »

Chiasme et nominations

Dans cette optique, il est par ailleurs intéressant de noter une sorte de chiasme dans les dernières nominations au sein du Patriarcat latin. La nomination du père Hijazin au sein du nouveau Conseil économique renvoie dans une sorte de symétrie centrale à celle – il y a un an – de Sami al-Youssef, un laïc et non plus un prêtre, en tant que délégué à la direction financière du Patriarcat. Il était auparavant directeur de la Mission pontificale, et avait clairement fait ses preuves sur le terrain. Lors de cette nomination en juin 2017, Mgr Pizzaballa avait de prime abord annoncé qu’il assurerait désormais personnellement la conduite de l’administration générale du Patriarcat. En cohérence totale avec son mandat d’administrateur apostolique.

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