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L’hébreu restera-t-il du chinois ?

Terresainte.net
4 mars 2012
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L’hébreu restera-t-il du chinois ?
Entrée d'un Oulpan dans les années 50 © Agence juive

L'Agence juive ne déroule plus vraiment le tapis rouge devant les olims, les juifs qui, bénéficiant de la loi du retour votée en 1950, décident de venir s'installer en Israël. Dès le 15 mars 2012, elle fermera ses oulpans. C'en est fini de l'apprentissage gratuit de l'hébreu pour les nouveaux arrivants.


(Jerusalem/f.h.) Shalom (bonjour), toda (merci), bevakasha (s’il vous plaît) ! L’image du nouvel arrivant juif, choisissant de monter en Israël, choyé et bichonné par l’État qui accueille son « retour » est largement répandue, mais on ignore combien il est difficile de quitter son pays d’origine et d’être plongé dans un univers familier et qui demeure pourtant étranger.

Parmi les obstacles à une intégration rapide figure la langue : tous les nouveaux immigrants doivent apprendre l’hébreu, et c’est peu de dire que la tâche est ardue.

Depuis 60 ans, le gouvernement israélien offrait, en coopération avec le Ministère de l’Intégration, le Ministère de l’Education et l’Agence Juive, 500 heures de leçons gratuites à tout nouvel immigrant âgé de 18 ans ou plus.

Ces heures de cours se déroulent dans ce qu’on appelle des oulpanim (pluriel du mot oulpan), mot issu de l’araméen signifiant « lieu d’étude ».

Depuis 1949 et la création du premier institut, les oulpanim délivrent leurs services dans les villes, universités et kibboutz répartis sur le territoire d’Israël. Apprentissage de la langue, de la culture, des grands faits socio-économiques du pays… les 5 mois de cours matinaux sont bien chargés !

Cependant, les résultats ne sont pas à la hauteur des attentes.  Des études menées par le Ministère de l’Intégration font état du faible niveau voire très médiocre des élèves, parmi lesquels moins d’un tiers serait capable de lire ou écrire correctement à la fin du programme. Par ailleurs, tandis qu’à peine 60% des inscrits finissent le cycle d’études, 24% n’assistent pas du tout aux cours et 17% abandonnent très vite.

 

Dès 2007, les résultats décevants de ces instituts avaient conduit le Ministère de l’Intégration à annoncer des réformes, une fermeture possible d’un grand nombre d’oulpanim, le renvoi de centaines de professeurs et des campagnes d’incitation pour que les nouveaux immigrants aillent étudier dans des écoles privées.

Rien de tout cela n’est arrivé, mais c’est maintenant l’Agence Juive qui menace de cesser son co-financement. Selon certaines sources, l’Agence commencera la fermeture de ses oulpanim le 15 mars 2012. Si l’information est juste, des milliers de nouveaux immigrants en Israël devront alors trouver de nouvelles façons d’apprendre l’hébreu ou les mêmes mais par le truchement de cours privés.

« L’Agence Juive demande de favoriser l’alyah (l’immigration d’un Juif en Israël) mais ne plus enseigner l’hébreu aux nouveaux immigrants est complètement aberrant », estime un ancien employé de l’Agence.

La fin d’une époque ? Pas vraiment. Il faut tout de même rappeler que l’Agence Juive ne finance pas tous les oulpanim et qu’elle n’apporte “que” 8% du budget nécessaire au maintien des instituts. Pour les nombreux oulpanim gérés par les Ministères de l’Intégration et de l’Education, il n’est donc pas question  ni d’arrêter, ni de cesser leur financement.

Au cours des dernières années, plus de 20 000 immigrants ont fréquenté les oulpanim. La fermeture de certains instituts portera pour sûr un coup au moral de beaucoup d’immigrants, car même si on ne devient pas bilingue en cinq mois, avoir la possibilité d’acquérir les bases grammaticales et de se sentir « accueilli » par le gouvernement était important pour eux.