Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

La zone E1 sur la route des pèlerins

Giorgio Bernardelli
12 décembre 2012
email whatsapp whatsapp facebook twitter version imprimable

Quand on visite la Terre Sainte, il faut aider les gens en faisant dialoguer les différents aspects de ce coin du monde. On ne peut pas vraiment retracer l'histoire du Salut sans tenir compte des histoires avec un ‘h’ minuscule. Y compris celles du conflit qui divise ce pays. Aussi faut-il apporter un éclairage sur le plan d'urbanisme E1 que Netanyahou a sorti du tiroir en guise de représailles au vote sur la Palestine aux Nations Unies.


Une des rares choses que j’ai apprises durant toutes ces années d’attention à la Terre Sainte, c’est qu’il faut aider les gens en faisant dialoguer les différents aspects de ce coin du monde. On ne peut pas vraiment retracer l’histoire du Salut sans tenir compte des histoires avec un ‘h’ minuscule. Y compris celles du conflit qui divise ce pays.

Pour cette raison, je m’interroge sur cet événement dont on a beaucoup entendu parler : le plan d’urbanisme E1 – que Netanyahou a sorti du tiroir en guise de représailles au vote sur la Palestine aux Nations Unies. Je me demande si un seul parmi les milliers de pèlerins qui chaque année vont en Terre Sainte, se souviendra être passé par là. Juste sur ce lopin de terre si contesté et capital pour que les Palestiniens ne soient pas coupés de Jérusalem.

Pourtant, lors d’un pèlerinage en Terre Sainte on est obligé de passer à côté de la zone E1. On la voit du bus lors de la montée à Jérusalem depuis Jéricho. Si on regarde par la fenêtre, le siège de la police de Ma’ale Adumim saute aux yeux. Le bâtiment est grand et isolé au centre d’un espace dont on peut penser qu’il serait construit si l’administration américaine n’y avait pas vu jusqu’à présent une ligne rouge infranchissable par Israël. C’est expliqué bien mieux que je ne peux le faire dans un article publié hier sur son blog par Paola Caridi. Le lien est ci-dessous (l’article est en italien).

Quant à ce que veut y construire Israël, il est intéressant de jeter un œil sur le document de travail d’Ir Amim. Une association israélienne pour une Jérusalem juste et durable qui traite de l’une des si nombreuses réalités de base pour essayer d’entrer dans une autre logique vis-à-vis du conflit. Parmi ses activités Ir Amin étudie les cartes d’urbanisme. À ce titre, elle indique que le projet – en plus de 3500 maisons – comprend une zone industrielle, un grand centre commercial, des hôtels, une université. Le projet comprend en outre un parc devant couvrir 75 % de la surface. Il ne s’agit pas de l’aménagement bucolique d’une colline déserte que domine Jérusalem. Mais d’un procédé élégant (et habituel) : mettre un obstacle à toute autre présence. Par exemple aux milliers de Bédouins qui vivent dans cette région.

Au-delà, l’important est de dire qu’on ne parle pas d’un autre endroit que de la Terre Sainte qu’on connait. La zone urbaine E1 c’est l’espace que l’on voit de la fenêtre du bus où souvent des bergers promènent leurs troupeaux, évoquant à chaque pèlerin photographe ceux de la crèche. Eux aussi seront évidemment emportés par le nouveau projet. Et puis c’est aussi la zone de la colline dite de Paul VI. Entre Béthanie et Ma’ale Adumim en 1965 – lorsque cette zone était encore sous contrôle jordanien – le roi Hussein de Jordanie avait fait don de la colline au Pape en reconnaissance de l’historique pèlerinage de l’année précédente. Le geste d’une époque où la terre n’était pas encore sur une carte mais un vrai trésor qu’on partageait encore dans un geste de paix.

Remplacer les visages et les gestes symboliques par des abréviations et des cartes géographiques est l’un des plus grands dangers qui existent quand il s’agit d’Israël et de la Palestine. L’une des routes qui nous éloignent du cœur de ce conflit. Et qui le rend chaque jour plus difficile à surmonter.

Cliquez ici pour lire (en italien) l’article sur le blog de Paola Caridi

Cliquez ici pour lire la carte Ir Amin (le Site de Ir Amin étant actuellement indisponible en anglais nous renvoyons vers un site qui a publié les cartes de l’ONG)

Cliquez ici pour voir une galerie de photos publiées par le Guardian sur la zone urbaine E1