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Caritas Jordanie, aux côtés des réfugiés syriens

Carlo Giorgi, inviato
3 avril 2014
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Seulement 10 % des Syriens vivant en Jordanie (130 000 sur 1,3 million) ont pu trouver refuge dans des camps. La majeure partie restante, dépourvue de toute ressource après avoir fui la Syrie, est dispersée dans toute la Jordanie, et survit dans de très mauvaises conditions, tant sur les plans du logement et de la santé, que sur le plan humain. À Amman, l’organisme Caritas fait partie des centres qui les soutiennent.



(Amman) – Selon les opérateurs, seulement 10 % des Syriens vivant en Jordanie (130 000 sur 1,3 million) ont pu trouver refuge dans des camps. La majeure partie restante, dépourvue de toute ressource après avoir fui la Syrie, est dispersée dans toute la Jordanie, et survit dans de très mauvaises conditions, tant sur les plans du logement et de la santé, que sur le plan humain.

Dans la capitale, Caritas Jordanie a ouvert deux centres de santé réservés exclusivement aux réfugiés syriens, afin de leur fournir la plus grande aide possible. L’un d’eux est situé dans le centre d’Amman, dans des locaux mis à disposition par l’ « Hôpital Italien », tout premier hôpital construit dans ce pays : une structure historique construite en 1926 par l’Association nationale pour secourir les missionnaires italiens (ANSMI), qui porte encore sur sa façade l’inscription « Hôpital de l’association italienne pour les missionnaires », ainsi que le blason royal de la Maison de Savoie.

«Nous avons ouvert le centre en septembre 2013 – raconte Hania Bsharat, de Caritas Jordanie – et nous offrons aux réfugiés syriens des soins de santé de base. Et pour les patients qui ont besoin de soins plus spécifiques, nous les dirigeons vers l’hôpital italien, qui est tout proche, ou alors vers d’autres hôpitaux d’Amman ».

Une petite cour clôturée surplombe les bureaux de Caritas et sert de salle d’attente. Cette cour est envahie par des dizaines de personnes : hommes, femmes et enfants, chacun attend son tour. A l’entrée se pressent les plus impatients, tenus au calme par une jeune fille à l’air décidé portant la tunique bleue de l’organisation.

« Chaque jour, nous recevons entre 150 et 200 Syriens – dit Hania – . En effet, le centre reçoit sur rendez-vous et nous essayons de fixer un certain nombre de visites, entre 70 et 90. Mais à ces visites il faut ajouter les cas d’urgence que nous ne pouvons bien sûr pas prévoir, comme les gens qui ont besoin de médicaments immédiatement. Il y a aussi des cas qui se présentent la nuit. Chaque jour, par exemple, nous avons une moyenne de 15 urgences que nous dirigeons vers l’hôpital. La demande est si forte que nous avons récemment prolongé notre temps de travail de deux heures ».

Le personnel du centre se compose de dix opérateurs, quatre affiliés à l’organisation et au secrétariat, et deux responsables. Les opérateurs reçoivent les patients et créent un dossier personnel, pour en apprendre davantage sur leur histoire, leurs parcours de réfugiés, et pour connaître leurs besoins. Une fois le dossier constitué, les patients sont envoyés aux trois professionnels de médecine générale ou dentaire, ou vers la clinique psychologique composée d’un psychologue et de trois conseillers.

« De nombreux problèmes de santé sont causés par le manque d’hygiène dans lequel les réfugiés survivent. N’ayant aucune ressource financière, les logements qu’ils leur arrivent de trouver sont généralement en mauvais état – poursuit Hania – : des familles de dix personnes entassées dans des deux pièces, dans des maisons où la salle de bains et la cuisine ne sont séparées que par un bout de tissu faisant office de rideau. Parmi nos patients, la gale est une maladie commune. Les Syriens sont pauvres parce qu’ils ne peuvent pas travailler légalement – continue Hania. Les employeurs savent que les Syriens ont besoin de travailler, et ils les exploitent en les payant moins. J’ai entendu parler de nombreux cas de familles syriennes dans lesquels la mère est venue seule avec ses enfants en Jordanie parce que le père est mort ou parce qu’il a disparu. Ces femmes, ne sachant pas quoi faire finissent par demander à leurs enfants de quitter l’école pour aller travailler. Pour les aides, nous donnons la priorité aux mères célibataires ainsi qu’aux personnes âgées, qui sont les plus démunies ».

Le personnel de la clinique psychologique visite le centre chaque semaine : des dizaines de patients souffrent de troubles mentaux générés par la guerre. Pas seulement les femmes et les enfants. Il y a aussi beaucoup d’adultes de 40 et 50 ans. Dépression, anxiété ou encore schizophrénie… Suhad, une musulmane de Homs, fréquente le centre de Caritas afin de recevoir gratuitement des soins pour traiter la schizophrénie de son fils : « Depuis que j’ai ces médicaments, je suis  rassurée – dit-elle. Ils coûtent trop chers et je ne peux pas me le permettre. Mais mon fils devient violent et me bat lorsqu’il n’a pas ses médicaments. Ça a commencé pendant son service militaire : il a vu trop de gens mourir, et il en perdu la tête. Lorsqu’il a été mis à pied, nous sommes partis ».

« Il arrive qu’ici en Jordanie, les mères syriennes craignent pour la vie de leurs enfants s’ils vont jouer dans la rue avec d’autres enfants – raconte Hania. C’est le souvenir des bombes, des bombardements syriens… elles se mettent à hurler, pensant qu’un bombardier pourrait surgir».

Parmi les nombreux patients du centre, quatre ou cinq réguliers viennent chaque jour chercher leur traitement contre des infections causées par des éclats d’obus, encore coincés dans leur chair.