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Ces journalistes palestiniens emprisonnés par Israël

Mélinée Le Priol
4 mai 2016
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A l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse du 3 mai 2016, « focus » sur la situation des journalistes palestiniens. Leur situation semble s’être dégradée ces derniers mois.


A l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse du 3 mai 2016, « focus » sur la situation des journalistes palestiniens. Leur situation semble s’être dégradée ces derniers mois, alors qu’Israël en a arrêté 19 depuis octobre et que 10 sont encore en prison.

Le 23 avril dernier, Omar Nazzal s’apprêtait à traverser le Jourdain pour prendre l’avion à Amman. De là, il devait s’envoler pour Sarajevo, en Bosnie, où il avait prévu de participer à un congrès de la Fédération européenne des journalistes. Mais juste avant de gagner la Jordanie, ce journaliste palestinien de 53 ans a été arrêté par les autorités israéliennes sur le pont Allenby. Le 2 mai, elles l’ont placé en détention administrative à la prison d’Ofer pour une durée de quatre mois.

Le service de sécurité du Shin Beit soupçonne Omar Nazzal d’être lié à des « organisations terroristes ». La chaîne de télévision qu’il dirigeait jusqu’en décembre, Palestine al-Youm (La Palestine aujourd’hui), avait d’ailleurs été fermée par les autorités israéliennes le 11 mars dernier. « Mon père est membre de longue date du FPLP (Front populaire de libération de la Palestine) mais il n’est plus très actif aujourd’hui », explique sa fille Marah par téléphone. L’organisation est classée comme terroriste par l’Union européenne. Mais pour elle, c’est clair, son père n’a été arrêté que parce qu’il « osait dire la vérité sur le traitement des Palestiniens par Israël, et plus spécifiquement des journalistes ». Elle ajoute qu’il critiquait aussi l’Autorité palestinienne, et pas seulement l’occupation israélienne. 

Le président de la Fédération internationale des journalistes, le Britannique Jim Boumelha, s’est quant à lui dit « choqué » d’apprendre qu’un participant à un congrès européen de journalisme a été arrêté en tentant de s’y rendre, puis « frappé sans raison à la prison d’Etzion ». « Ce n’est pas un hasard si Omar Nazzal a été placé en détention administrative le 2 mai, veille de la Journée mondiale de la liberté de la presse », renchérit Maher Awawdeh, du ministère de l’Information palestinien : « C’est de l’intimidation ! Il s’agit de faire peur aux journalistes palestiniens pour les empêcher de faire leur travail. »

Depuis le mois d’octobre, Israël a arrêté 19 journalistes palestiniens, selon le quotidien Haaretz. Dix seraient encore en prison à l’heure actuelle, dont six en détention administrative : ce régime très critiqué permet d’incarcérer un individu sans procès ni inculpation. Le Shin beit assure que les journalistes arrêtés ne le sont pas pour leurs activités professionnelles mais pour leur proximité avec des organisations considérées comme terroristes, comme le Hamas ou encore le Djihad islamique. Plusieurs journalistes l’ont aussi été pour « incitation à la violence » contre les Israéliens, notamment sur Facebook.

Pour Maher Awawdeh, du ministère de l’Information palestinien, entendre la voix de ces journalistes est pourtant d’autant plus important aujourd’hui que les médias occidentaux suivent surtout, d’après lui, la position des médias israéliens, par exemple au sujet des attaques au couteau. « Si les autorités israéliennes n’avaient rien à cacher, pourquoi auraient-elles si peur ? », reprend-il en accusant les médias israéliens de couvrir « les crimes de l’armée » et de s’en rendre ainsi « complices ».

Cet hiver aura aussi été marqué par la grève de la faim du journaliste Mohammed al-Qiq entre novembre et février. Longue de 94 jours, elle a ému de nombreux Palestiniens, qui se sont régulièrement réunis pour réclamer la libération de ce salarié d’une chaîne de télévision saoudienne. Al-Qiq protestait contre sa détention sans procès par les autorités israéliennes.  Le 26 février, il a mis fin à sa grève alors qu’Israël promettait de le libérer le 21 mai.

A l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, Reporters sans frontières a publié les positions relatives de 180 pays au regard de la latitude d’action de leurs journalistes. Israël figure à la 101e place. La Palestine à la 132e place.

Avec l’Afrique du Nord, le Moyen Orient (50,8) reste la région du monde où les journalistes sont les plus soumis à des contraintes de toutes sortes.