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Elections parlementaires au Liban : quels enjeux ?

Antoine Charpentier
10 mars 2017
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Elections parlementaires au Liban : quels enjeux ?
L'Assemblée Nationale libanaise réunie en session plénière ©Parlement libanais

Alors que le Liban prévoit de tenir des élections légilsatives en mai ou a l’été, le général Aoun, à la tête de l’Etat libanais depuis octobre 2016, propose une loi pour réformer le mode de scrutin.


Les prochaines élections législatives au Liban pourraient se tenir au mois de mai. Ce seraient les premières depuis 2014. Mais la vie politique n’est pas un long fleuve tranquille. C’est pourquoi la date n’est toujours pas fixée d’autant que le Président de la République, Michel Aoun, en place depuis le 31 octobre, a proposé une nouvelle loi électorale visant à instituer un scrutin à la proportionnelle.

La classe politique libanaise est partagée. Celles et ceux qui ont accepté (à contre cœur) l’élection du Général Michel Aoun à la tête de l’Etat tentent de lui mettre des bâtons dans les roues. Ils ne veulent pas que cette nouvelle loi voie le jour.

Le président Aoun prétend avec cette nouvelle loi et à la chambre parlementaire qui sortirait du scrutin, lutter contre la corruption, le féodalisme et espère pouvoir ainsi restaurer les institutions étatiques.

Une chose est sûre, des élections législatives à la proportionnelle permettraient certainement que davantage de composantes de la société libanaise soient représentées.

Les normes de scrutin en vigueur sont régies par loi dite loi de 1960. S’agissant de la représentation chrétienne à l’Assemblée nationale, par exemple, la loi de 1960 aboutit à ce que les communautés musulmanes majoritaires soit en mesure d’élire les députés de la communauté chrétienne, en faisant l’impasse sur les courants chrétiens minoritaires.

Ainsi 49 des 64 députés du groupe chrétiens sont élus par les musulmans, tandis que les chrétiens ne peuvent élire que 15 de leurs représentants. Un scrutin à la proportionnelle permettrait donc de corriger – à défaut de la simplifier – la représentativité des chrétiens dans le processus politique libanais.

Le Président Aoun s’est donc d’ores et déjà jeté dans la bataille des législatives refusant que loi dite de 1960 continue à présider aux choix de la nation. Il n’entend pas non plus que le parlement soit renouvelé une troisième fois sans vote[1], ce qui n’est pas constitutionnel.

De son côté, M. Walid Joumblat, un des grands chefs druzes, a déjà fait connaître son opposition à la proportionnelle. Ses détracteurs estiment que son attachement à la loi en vigueur est lui proportionnel à l’influence que le système actuel lui donne sur les sièges druzes dans le Chouf et sur ceux des chrétiens. De fait, le mode de scrutin actuel tend à surreprésenter les Druzes eu égard à leur poids démographique réel. Du moins Joumblat en manifestant son opposition a-t-il permis que le débat politique s’ouvre sur le sujet. D’autres partis politiques, que le maintien de la loi 1960 pourraient intéresser, se gardaient jusqu’ici de réagir.

Le président du parlement M. Nabih Berry est quant à lui favorable à la nouvelle loi ainsi que son allié le Hezbollah, mais il insiste sur le fait que cette dernière doit être acceptée par tous les partis politiques afin d’éviter les mêmes injustices envers les chrétiens que pendant les périodes antérieures.

La complexité des débats politiques libanais tient grandement au fait que le paysage politique est marqué par le confessionnalisme politique. Or on compte rien moins que 18 communautés religieuses. Et c’est sur la base de l’appartenance religieuse que sont distribuées les fonctions officielles et administratives. De quoi pimenter d’avantage le débat.


[1] A deux reprises et à l’échéance du parlement, les députés libanais se sont réunis pour renouveler à eux même leur mandat de 4 ans.