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Les Palestiniens n’apprécient pas l’hôtel de Banksy

Terresainte.net
15 mars 2017
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Les Palestiniens n’apprécient pas l’hôtel de Banksy
©Wisam Hashlamoun/Flash90

L'ouverture, à côté du mur de séparation érigé par les Israéliens, d’un hôtel décoré par l’artiste Banksy a été annoncée voire louangée dans le monde entier. Mais qu'en pensent les Palestiniens?


(Jérusalem/AP) – Le désormais célèbre hôtel du graffeur Banksy à Bethléem, présenté aux journalistes le 3 mars, a ouvert ses portes au public le 11 mars. Comment les Palestiniens ont-ils réagi à cette ouverture très médiatisée ? Les habitants des maisons voisines, qui avaient avant lui « la pire vue au monde », n’apprécient guère le nouvel « Walled off », l’hôtel « séparé, emmuré » propriété de l’artiste.

Depuis longtemps Banksy peint en Palestine: il a plusieurs fois travaillé sur les murs qui entourent la Cisjordanie et Gaza. L’hôtel n’est pas loin de sa célèbre « colombe de paix en ligne de mire ». Grâce à ses images à connotation politique, l’artiste a attiré l’attention sur la réalité de l’occupation à plusieurs reprises. Mais l’homme, dont l’identité demeure un mystère, avait aussi su faire mystère de son projet. Et tout le monde a été surpris de découvrir sa nouvelle création, restée secrète jusqu’au début du mois, alors que les travaux ont pris plus d’un an. L’hôtel axe sa publicité en revendiquant avoir la primeur de… « la pire vue au monde ». En effet, l’édifice, situé au pied du mur qui enserre la Tombe de Rachel à Bethléem, ouvre ses fenêtre sur la barrière de béton qui sépare la Palestine et Israël.

L’ouverture du « Walled Off », jeu de mot avec la chaine d’hôtels de luxe Waldorf, a suscité des réactions contrastées. D’un côté les fans de Banksy attendent avec impatience de pouvoir passer une nuit parmi ses graffitis et aménagements. Le site internet de l’hôtel déclare que « le but du Walled Off est surtout de raconter l’histoire du mur, en vous donnant la possibilité de la découvrir. Les jeunes israéliens seront les bienvenus ».  De l’autre côté, les Palestiniens ont le sentiment que leur souffrance fait l’objet d’une exploitation malsaine.

Il y avait bien déjà une famille palestinienne qui avait ouvert une « Banksy Guest House » à Bethléem, il y a une dizaine d’années . Le propriétaire avait vu le mystérieux graffeur en train de peindre le mur à côté de son hôtel, et lui avait demandé l’autorisation d’utiliser son nom – Banksy – pour sa guesthouse». Mais l’hôtel fraichement inauguré est allé bien plus loin.

Selon Ayed Arafah, un artiste palestinien, « Les gens viennent ici pour prendre des photos des graffitis. Cet endroit devient un Disneyland, c’est comme si nous habitions dans un zoo… ».  Pour de nombreux Palestiniens, cette entreprise c’est du marketing « sur le dos des Palestiniens vivant sous occupation ». Le mur ne doit pas devenir une attraction touristique.  Selon Karim Kattan qui travaille au projet de réseau culturel palestinien el-Atlal : « On est colonisé même dans nos têtes. On est en train de célébrer un artiste qui profite de la situation d’occupation » d’un pays où « l’industrie du tourisme, avec des nombreux hôtels, est déjà en crise ».

A Bethléem, l’hôtel de Bansky, a tout l’air d’un projet pour Bobos en mal d’aventures qui rentreront chez eux avec de quoi meubler leurs rêves de révolution.