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Pas de zone mixte devant le Mur des Lamentations à Jérusalem

Christophe Lafontaine
26 juin 2017
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Le gouvernement israélien a officiellement retiré hier le projet d'un espace de prière mixte devant le Mur des Lamentations à Jérusalem. Au risque de brouiller la communauté juive internationale.


C’est un rétropédalage dans les règles de l’art. Le gouvernement israélien a abandonné le projet d’un lieu de prière mixte devant le Mur Occidental (Kotel), dit des Lamentations. Effectivement, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé dimanche 25 juin le gel de la mise en place de ce projet. Pourtant, ce plan avait été approuvé au début 2016 par le gouvernement. Or, dans un communiqué daté d’hier, le bureau du Premier ministre a finalement informé que Benjamin Netanyahu avait chargé le secrétaire du cabinet gouvernemental, Tzahi Braverman, et le ministre de la Coopération régionale, Tzahi Hanegbi, de formuler un nouveau projet, fait savoir le Times of Israel.

Les pressions exercées par les partis ultra-orthodoxes présents dans la coalition gouvernementale ont assurément participé au retournement de veste du Premier ministre alors que le rabbinat ultra-orthodoxe, qui a le monopole sur les affaires religieuses, rejette la mixité au Mur des Lamentations. Le ministre de la Santé Yaakov Litzman du parti ultra-orthodoxe YaHadout HaTorah s’est félicité de la décision prise par le gouvernement. « Cette décision envoie un message clair au monde entier : le Judaïsme réformé n’a ni accès ni reconnaissance au Mur Occidental, a-t-il déclaré. Je remercie le rabbin du Mur Occidental, Shmuel Rabinowitz, et les grands rabbins d’Israël. Grâce à eux, nous avons été en mesure de sanctifier le nom de Dieu », a-t-il ajouté.

De son côté, le ministre de la Défense Avigdor Liberman a déclaré que le gel de l’accord du Mur Occidental allait nuire aux relations entre Israël et les juifs de diaspora. De fait, la grande majorité des juifs américains appartiennent aux courants non orthodoxes du judaïsme. A noter que le judaïsme libéral reste minoritaire en Israël contrairement aux Etats-Unis. Seulement 7,1% des juifs israéliens se définissent comme tels, contre 26,5% qui disent appartenir au judaïsme orthodoxe, les autres se définissant traditionalistes – respectant les principales fêtes mais pas le shabbat – ou non religieux, selon le centre de recherches Israel Democracy Institute (IDI). C’est pour cela qu’Avigdor Liberman a appelé ses collègues du gouvernement à « reprendre leurs esprits » et à « empêcher le fossé [de se creuser] au sein du peuple juif. » Dans le même sens, Natan Sharansky, le président de l’Agence juive pour Israël, (l’une des principales organisations de la communauté juive à l’étranger), considère qu’il s’agit là d’un véritable « retour en arrière ». « Cela va rendre notre travail toujours plus difficile pour unifier Israël et le monde juif », regrette-t-il. Le président de l’organisation était au cœur du projet d’espace de prière mixte au Mur des Lamentations depuis cinq ans.

Plusieurs groupes de militants juifs progressistes et libéraux à la fois à l’étranger et en Israël, y compris le Mouvement israélien pour la réforme et le judaïsme progressif et les Femmes du Mur, demandent depuis longtemps la création d’une section de prière mixte – et non orthodoxe – au Kotel. Anat Hoffman, présidente de l’association Women of the Wall, qui lutte pour changer les règles sur le Mur des Lamentations, a estimé amèrement qu’il s’agissait d’une « terrible journée pour les femmes en Israël », accusant Benjamin Netanyahu de « céder à une poignée de religieux extrémistes ».

Du rififi au Mur

Extrêmement sensible, le lieu le plus sacré du judaïsme, à Jérusalem n’en finit pas d’être au cœur de l’actualité et des polémiques. Dernièrement, le 11 juin, la police  israélienne a interpellé une femme qui s’était totalement dénudée devant le Mur des Lamentations. Des femmes présentes sur les lieux ont tenté de la recouvrir de châles de prière pour mettre un terme à l’outrage publique à la pudeur. La jeune femme de 23 ans de nationalité israélienne a ensuite tenté de rejoindre la section réservée aux hommes avant d’être embarquée vers le poste de police loin de la place du Kotel. Elle a été interrogée et  a subi une évaluation psychologique a indiqué Micky Rosenfeld, le porte-parole de la police. Au vu des premiers éléments de l’enquête, ce geste surprenant n’aurait pas de connotation politique ou religieuse.

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Rétropédalage de Netanyahou sur l’accord au Mur Occidental 29 mars 2016

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