Après des siècles d’abandon, le monastère Saint-Maroun au Liban accueillera de nouveau pèlerins et fidèles. Officialisation fut faite le 31 juillet, lors d’une messe célébrée par l’évêque de Baalbek-Deir el-Ahmar.
L’Eglise maronite peut se réjouir. Et le Liban aussi. A l’heure où le Saint-Siège veut remettre le pays du Cèdre sur la liste officielle des pays de pèlerinages catholiques qu’il publie chaque année. Car, la dernière bonne nouvelle en date, relayée par l’agence Fides a été l’annonce faite par Mgr Hanna Rahmé, évêque maronite de Baalbek-Deir el-Ahmar, concernant la réouverture aux pèlerinages et aux célébrations liturgiques, du monastère rupestre dédié à Saint Maroun (Deir Mar Maroun), le fondateur de l’Eglise maronite au IVe siècle apr. J.-C. L’évêque intervenait lors d’une messe qu’il présida le 31 juillet 2018 sur ces lieux emprunts d’histoire pour les maronites comme pour la nation libanaise, non loin de la ville de Hermel au nord-est de la Békaa. La cérémonie s’est déroulée en présence des représentants du monde politique libanais et des membres de l’Eglise maronite.
L’évêque de Baalbek – indiquent des sources de l’agence Fides – a même annoncé que, bientôt dans le monastère, serait célébrée au moins une messe par jour.
Outre la joie, « la réouverture du lieu à la liturgie et à la dévotion est vécue par de nombreux chrétiens avec gratitude », explique l’agence de presse catholique. Un lieu « cher à la mémoire historique et spirituelle des chrétiens maronites ». Le premier patriarche maronite y aurait été élu.
Certaines voix prétendent de manière bien moins certaine que les grottes qui composent le monastère troglodyte furent occupées par saint Maroun lui-même. En tous les cas, ce qui est largement plus sûr, c’est que certains de ses premiers disciples, pendant la fondation de l’Eglise maronite s’y sont installés. Selon les chercheurs, l’un des disciples de saint Maroun aurait, à la mort de ce dernier, choisi cette grotte comme lieu d’ermitage, lui donnant le nom de son maître.
Situé dans le nord-est du Liban, non loin de la frontière avec la Syrie et à 50 mètres de la source du fleuve Oronte, le monastère appelé également la Grotte des moines est une ancienne caverne creusée dans le roc solide et se détache sur le flanc d’une falaise, à 90 mètres au-dessus de la rivière. L’accès est un chemin très escarpé.
A cause de sa position stratégique, le monastère a fait l’objet, tout au long de son histoire, de convoitises et de vicissitudes judiciaires. Si bien que les moines l’ont laissé à l’abandon au cours de la période ottomane. Et ce, pendant plusieurs siècles. Les ruines, en proie aux intempéries, ont ensuite servi d’abri pour les moutons, les chèvres et les bergers de passage.
En 1930, détaille l’agence Fides, un litige opposa le diocèse maronite de Baalbek-Deir el-Ahmar et d’influentes familles musulmanes locales (notamment la famille Dandash), qui accusaient le diocèse de s’être approprié la zone du monastère qui leur appartenait en 1923, après qu’elles ont été contraintes de quitter la zone et de s’établir en Syrie sous mandat français. Une autre querelle plus récente a vu s’opposer le diocèse et le ministère de l’Energie et de l’Eau libanais sur une question de titres de propriété. Litige qui s’est résolu lorsque le gouvernement a accordé au diocèse la possibilité de débuter la reconstruction du Monastère et la réouverture de ses grottes.
« Nous sommes parvenus à reprendre ce couvent, après la fraude des années 1930 concernant la zone dans laquelle elle se trouve – a déclaré Mgr Hanna dans son homélie – et nous voulons maintenant le partager en tant que lieu sacré, avec nos frères chrétiens et musulmans. »
Les grottes du monastère sont aménagées sur trois niveaux, et sont reliées entre elles par des escaliers rocheux, jalonnés de plusieurs autels et de petites cellules taillées à même le roc. Un puits – actuellement bouché – profond de 42 mètres, donnant sur une nappe phréatique, a été creusé à l’intérieur de l’édifice.
La grotte des moines, dont les couleurs jaunes et ocres sont typiques du Hermel, était au tout début habitée par plusieurs tribus préhistoriques. La structure que l’on connaît aujourd’hui reposerait sur des vestiges de l’époque romaine dus aux architectes romains qui y auraient élu domicile pour construire les canalisations de l’Empire de Palmyre (provinces romaines de Syrie, de Palestine, d’Egypte et de grandes parties de l’Asie Mineure).
Les grottes auraient été ensuite habitées et réhabilitées par les Croisés (les voûtes et les meurtrières en témoignent), puis désertées par les moines quand la zone est tombée sous le contrôle des Mamelouks et des Ottomans. Il y a 20 ans, L’Orient-Le Jour indiquaient dans ses colonnes que selon, les habitants de la localité, tous de confession chiite, « aucun Musulman, Mamelouk, Ottoman n’a habité la grotte de saint Maroun ».
Sur le même sujet
Le Saint-Siège veut refaire du Liban un pays de pèlerinage – 16 juillet 2018