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Pâques tous ensemble

Louise Couturaud
11 février 2013
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Une seule fête de Pâques pour tous les chrétiens de Terre Sainte… un événement qui comblera les attentes des familles chrétiennes et sera un signe fort d’unité des chrétiens pour les communautés musulmanes et juives.

En 2013, la plupart des catholiques de Terre Sainte fêteront Pâques à la même date que leurs frères orthodoxes, comme l’a annoncé le Patriarcat Latin au mois d’octobre. Cette décision fait suite à une directive de l’Assemblée des Ordinaires Catholiques de Terre Sainte. Elle a pour but de renforcer l’unité de l’Église de Terre Sainte. Jusqu’ici, les Églises orthodoxe et catholique suivaient un calendrier liturgique différent. Le calendrier grégorien, du nom du pape catholique Grégoire XIII qui l’introduisit en 1582 est postérieur au calendrier julien dont il corrige certaines erreurs. Le calendrier julien bien que fort précis pour son temps demeurait tout de même inexact : une année julienne dure en moyenne 11 minutes et 12 secondes de plus qu’une année tropique. Or, les orthodoxes n’ont pas adopté le calendrier grégorien, et plus le temps passe, plus le différentiel augmente. Il est aujourd’hui de treize jours.

Vox populi, vox Dei

Pourquoi les catholiques de Terre Sainte se rallient-ils aujourd’hui au calendrier julien, c’est-à-dire orthodoxe, pour la fête de Pâques ? C’est tout d’abord une mesure populaire : de nombreuses familles chrétiennes de Terre Sainte sont issues de mariages mixtes entre catholiques (ou protestants) et orthodoxes. Les membres de ces familles ne pouvaient fêter Pâques le même jour. Comme l’explique Mgr Shomali, évêque auxiliaire des Latins à Jérusalem, cette décision est le fruit de la pression des fidèles et, comme l’affirme le dicton, « Vox populi, vox Dei » ! C’est aussi un geste œcuménique, « un acte d’humilité » de la part de l’Église, nécessaire, car « l’orgueil est la cause de nombre de divisions entre les Églises ». La réunification de la date de Pâques est aussi un signe d’unité pour les non-chrétiens de Terre Sainte : « Nous espérons que ce geste sera un témoignage aux yeux des musulmans et des juifs de ce pays qui sont majoritaires ».

Cette annonce a été très bien accueillie par les fidèles chrétiens, catholiques et orthodoxes, qui l’espéraient ardemment. Mais des réserves se sont cependant fait entendre de part et d’autre. On reproche à cette mesure de couper l’Église catholique locale de l’Église Universelle. En de telles situations, explique Mgr Shomali, choisir, c’est renoncer : « Certes, nous nous distinguons de nos frères catholiques du monde, mais pour nous rapprocher de nos frères qui sont proches ».

La grande majorité des Églises catholiques ont décidé d’appliquer cette mesure dès Pâques 2013. Une nouveauté pour les paroisses du Patriarcat Latin en Israël, qui n’avaient jamais tenté l’expérience, contrairement à certaines paroisses de Palestine, de Jordanie et de Chypre.

Exception à la règle

Les villes de Jérusalem, de Bethléem et de ses environs font néanmoins figure d’exceptions. Une décision qui ne s’explique pas par le Statu quo comme on le dit souvent, mais pour des raisons pastorales. Le frère Stéphane Milovitch, gardien de la basilique de la Nativité à Bethléem, explique le choix des Franciscains : « Nombre de chrétiens dans le monde choisissent la date de Pâques selon le calendrier grégorien pour se rendre en Terre Sainte et baigner dans l’atmosphère de Pâques dans les Lieux Saints. Comme Gardiens des Lieux Saints, nous voulons permettre aux pèlerins de vivre ici ce qu’ils sont venus chercher ». De fait, plus de la moitié des pèlerins qui visitent la Terre Sainte sont catholiques.

Par ailleurs, la Qehilla, la communauté catholique d’expression hébraïque, composée de nombreux migrants, conservera le calendrier grégorien pour la fête de Pâques pour que les fidèles puissent bénéficier des vacances de la Pâque juive, proches de la fête de Pâques catholique.

Enfin, la communauté maronite a choisi de ne pas appliquer ce changement de date – qui n’est pas obligatoire cette année – pour rester en communion avec l’Église du Liban toute proche.

Pour les fêtes de Pâques suivantes, un décret rédigé par l’AOCTS sera soumis au Saint Siège pour approbation. « Cette décision sera accueillie, respectée et mise en exécution par tous les catholiques de rite oriental et latin, par les catholiques du pays et étrangers résidant dans nos diocèses » explique la directive.

Mais fêter Pâques ensemble, ce ne sera pas fêter Pâques de la même façon. Chaque communauté continuera à donner à la liturgie de la Terre Sainte toutes les couleurs de l’unique Église de Dieu.

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