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Toujours pas de Président de la République pour le Liban

Antoine Noura Charpentier
1 août 2016
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Toujours pas de Président de la République pour le Liban
Le drapeau libanais ©Parlemement Libanais

Voilà un peu plus de deux ans que le Liban n’a plus de président. Pourtant à 42 reprises le parlement a essayé de désigner un chef d’État. Les chrétiens libanais suivent le feuilleton présidentiel avec attention.


Depuis le 25 mai 2014, date de la fin du mandat présidentiel de Michel Sleiman, le Liban connaît la plus longue période de vacance présidentielle depuis son indépendance en 1943. Quarante-deux tentatives n’ont pas permis l’élection d’un nouveau président de la République.

Pour élire le chef de l’Etat, la Constitution libanaise exige un quorum de 86 députés sur 128, ou une majorité absolue de 64 députés. Quant au Pacte National [1], qui répartit le pouvoir entre les différentes communautés religieuses, il précise que le président de la République doit être absolument chrétien de confession maronite. Le Liban vit actuellement une période compliquée de son histoire moderne. Les libanais évoluent dans un contexte politique régional très tendu, avec une guerre interminable en Syrie voisine, et un flux de réfugiés sans précédent.

Les chrétiens du Liban, à l’exemple des autres chrétiens au Moyen-Orient, se sentent actuellement en danger. De ce fait les élections présidentielles constituent pour eux un enjeu politique majeur. Hiam, jeune libanaise appartenant au Courant patriotique libre affirme que : « L’arrivée d’un président fort comme le Général Michel Aoun favoriserait au moins un redressement moral et psychologique des chrétiens libanais». Tandis qu’Elie aussi chrétien proche de la coalition dite du 14 mars pense que : « Le Général Aoun n’a que des ambitions personnelles, mais actuellement il y a un consensus autour de sa personne ». Une chose est sûre : les chrétiens du Liban ne souhaitent pas voir la présidence de la République leur échapper.

Le feuilleton des élections présidentielles libanaises devient de plus en plus complexe avec la candidature de l’ancien ministre Sleimane Frangié. Ce dernier est un allié de longue date du Général Michel Aoun, faisant partie de son bloc parlementaire « Réforme et Changement ». Carole, militante du parti Marada présidé par Sleiman Frangiè, trouve une cohérence dans la candidature de ce dernier à la présidence de la République, de par sa forte popularité notamment dans le nord du Liban ainsi que son héritage politique [2].

Les accords de Taëf [3] de 1989 ont enlevé une grande partie des prérogatives au président de la République libanaise, le seul chrétien sur les 22 pays de la Ligue arabe, au profit du premier ministre sunnite de confession. Néanmoins, pour beaucoup de chrétiens du Pays des cèdres, la présidence de la République conditionne en partie leur participation à la vie politique libanaise. Tandis que les deux anciens alliés Aoun et Frangié s’affrontent, un autre leader chrétien, Samir Geagea chefs des Forces libanaises longtemps opposé à l’un comme à l’autre, soutient désormais depuis le 18 janvier 2016 la candidature du général Aoun à la présidence de la République.

Enfin, le manque de capacité du parlement libanais à élire un président révèle malheureusement la décomposition des institutions politiques libanaises. Un point que le patriarche maronite Raï a lui-même dénoncé: « La crise politique, et notamment l’absence d’un président de la République, a abouti à la détérioration de l’État ». Les chrétiens libanais espèrent beaucoup du prochain président de la République, qui tarde à être élu.

 

[1]Le Pacte National permet une répartition confessionnelle de l’exécutifs.

[2]Le grand père de l’ancien ministre dont il porte l’homonyme fut président de la République de 1970 à 1976.

[3]Cet accord a été signé le 22 octobre 1989, par les députés libanais à Taëf en Arabie-Saoudite mettant terme à 20 ans de guerre.