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Le pape François: la bonne politique au service de la paix

Terrasanta.net
3 janvier 2019
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Chaque année pour le nouvel an, depuis 1968, les papes nous proposent de réfléchir sur le bien de la paix. Cette fois-ci, le pape François l’associe à la politique, mais aussi à l'engagement quotidien de chacun.


(g.s) – Ce premier jour de l’année 2019, le pape François emboîte le pas à son prédécesseur, saint Paul VI, qui, en 1968, voulut proposer à l’Eglise et à l’humanité d’entamer l’année en réfléchissant sur le bien précieux de la paix.

Dans son Message pour la 52ème Journée mondiale de la paix, le pape François propose comme thème La bonne politique est au service de la paix, apparemment loin de la réalité des faits que la presse internationale nous relate au quotidien. D’autant plus si l’on s’arrête au Moyen-Orient, qui traverse une phase historique plutôt conflictuelle et caractérisée par un réarmement massif et des affrontements sur les théâtres de guerre (cf. Irak, Syrie et Yémen), qui impliquent des puissances régionales (Arabie Saoudite, Iran, Israël, Turquie) et mondiales (notamment les États-Unis et la Russie).

« La politique – définit le Pape dans un passage clé de son message – est un moyen fondamental pour promouvoir la citoyenneté et les projets de l’homme, mais quand elle n’est pas vécue comme un service à la collectivité humaine par ceux qui l’exercent, elle peut devenir un instrument d’oppression, de marginalisation, voire de destruction. »

Le pape François insiste : « En effet, la fonction et la responsabilité politique constituent un défi permanent pour tous ceux qui reçoivent le mandat de servir leur pays, de protéger les habitants et de travailler pour asseoir les conditions d’un avenir digne et juste. Accomplie dans le respect fondamental de la vie, de la liberté et de la dignité des personnes, la politique peut devenir vraiment une forme éminente de charité. »

En faisant référence à un passage de l’encyclique de Benoît XVI Caritas in Veritate, le pape François rappelle que « quand elle est inspirée et animée par la charité, l’action de l’homme contribue à l’édification de cette cité de Dieu universelle vers laquelle avance la famille humaine. » « C’est un programme – souligne le pape François – dans lequel peuvent se retrouver tous les politiciens, de n’importe quelle appartenance culturelle ou religieuse, qui souhaitent œuvrer ensemble pour le bien de la famille humaine, en pratiquant ces vertus humaines qui sous-tendent le bon agir politique : la justice, l’équité, le respect réciproque, la sincérité, l’honnêteté, la fidélité.  »

Le Pape insiste sur les vertus de la politique, et nous propose également des critères pour discerner une mauvaise politique : « Nous en sommes certains – écrit le Pape – la bonne politique est au service de la paix ; elle respecte et promeut les droits humains fondamentaux, qui sont également des devoirs réciproques, de sorte qu’un lien de confiance et de gratitude soit créé entre les générations présentes et futures. »

Dans la politique non plus, comme dans toute réalité humaine, les vices ne manquent pas, et sont dus – explique le pape François – « soit à une inaptitude personnelle soit à des déformations dans l’entourage et dans les institutions. Il est clair pour tous que les vices de la vie politique ôtent de la crédibilité aux systèmes dans lesquels elle s’exerce, ainsi qu’à l’autorité, aux décisions et à l’action des personnes qui s’y consacrent. » « Ces vices, qui affaiblissent l’idéal d’une authentique démocratie, sont la honte de la vie publique et mettent en danger la paix sociale : la corruption – sous ses multiples formes d’appropriation indue des biens publics ou d’instrumentalisation des personnes -, la négation du droit, le non-respect des règles communautaires, l’enrichissement illégal, la justification du pouvoir par la force ou par le prétexte arbitraire de la ‘‘raison d’État’’, la tendance à s’accrocher au pouvoir, la xénophobie et le racisme, le refus de prendre soin de la Terre, l’exploitation illimitée des ressources naturelles en raison du profit immédiat, le mépris de ceux qui ont été contraints à l’exil. »

Un passage du Message du Pape s’adresse aux jeunes : « Quand la politique se traduit, concrètement, dans l’encouragement des jeunes talents et des vocations qui demandent à se réaliser, la paix se diffuse dans les consciences et sur les visages. Elle devient une confiance dynamique, qui veut dire ‘‘j’ai confiance en toi et je crois en toi’’, dans la possibilité de travailler ensemble pour le bien commun. La politique est pour la paix si elle se manifeste donc, dans la reconnaissance des charismes et des capacités de chaque personne. (…) Chacun peut apporter sa pierre à la construction de la maison commune. La vie politique authentique, qui se fonde sur le droit et sur un dialogue loyal entre les personnes, se renouvelle avec la conviction que chaque femme, chaque homme et chaque génération portent en eux une promesse qui peut libérer de nouvelles énergies relationnelles, intellectuelles, culturelles et spirituelles. Une telle confiance n’est jamais facile à vivre, car les relations humaines sont complexes. En particulier, nous vivons ces temps-ci dans un climat de méfiance qui s’enracine dans la peur de l’autre ou de l’étranger, dans l’angoisse de perdre ses propres avantages, et qui se manifeste malheureusement aussi, au niveau politique, par des attitudes de fermeture ou des nationalismes qui remettent en cause cette fraternité dont notre monde globalisé a tant besoin. Aujourd’hui plus que jamais, nos sociétés ont besoin d’‘‘artisans de paix’’ qui puissent être des messagers et des témoins authentiques du Dieu Père, qui veut le bien et le bonheur de la famille humaine. »

Cent ans après la fin de la Première Guerre mondiale, le Pape se souvient des nombreux jeunes tombés durant ces combats et rappelle l’enseignement de cette page de l’histoire « à savoir que la paix ne peut jamais être réduite au seul équilibre des forces et de la peur. Maintenir l’autre sous la menace veut dire le réduire à l’état d’objet et en nier la dignité. C’est pourquoi nous réaffirmons que l’escalade en termes d’intimidation et la prolifération incontrôlée des armes sont contraires à la morale ainsi qu’à la recherche d’une vraie concorde. La terreur exercée sur les personnes les plus vulnérables contribue à l’exil d’entières populations en quête d’une terre de paix. Les discours politiques qui tendent à accuser les migrants de tous les maux et à priver les pauvres de l’espérance ne sont pas justifiables. Au contraire, il faut réaffirmer que la paix se fonde sur le respect de chaque personne, quelle que soit son histoire, sur le respect du droit et du bien commun, de la création qui nous a été confiée et de la richesse morale transmise par les générations passées. »

Le pape François a eu une pensée particulière envers les enfants : « Dans le monde – nous rappelle-t-il – un enfant sur six est touché par la violence de la guerre ou par ses conséquences, quand il n’est pas enrôlé pour devenir lui-même soldat ou otage de groupes armés. Le témoignage de ceux qui œuvrent pour défendre la dignité et le respect des enfants n’en est que plus précieux pour l’avenir de l’humanité. »

Enfin, le Pape rappelle le soixante-dixième anniversaire – le 10 décembre – de la Déclaration universelle des droits de l’homme, et alerte sur le fait que la paix est « le fruit d’un grand projet politique qui se fonde sur la responsabilité réciproque et sur l’interdépendance des êtres humains. Mais elle est aussi un défi qui demande à être accueilli jour après jour. La paix est une conversion du cœur et de l’âme ; et il est facile de reconnaître trois dimensions indissociables de cette paix intérieure et communautaire : la paix avec soi-même, en refusant l’intransigeance, la colère et l’impatience et, comme le conseillait saint François de Sales, en exerçant ‘‘un peu de douceur avec soi-même’’, afin d’offrir ‘‘un peu de douceur aux autres’’ ; la paix avec l’autre : le proche, l’ami, l’étranger, le pauvre, le souffrant… ; en osant la rencontre et en écoutant le message qu’elle porte avec elle ; la paix avec la création, en redécouvrant la grandeur du don de Dieu et la part de responsabilité qui revient à chacun d’entre nous, en tant qu’habitant du monde, citoyen et acteur de l’avenir. »