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Bibliothèques d’Orient: 7000 trésors partagés en ligne

Christophe Lafontaine
12 septembre 2017
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Le portail Bibliothèques d’Orient est lancé officiellement ce 12 septembre. Elaboré par la BnF en partenariat avec sept institutions du Proche-Orient, il donnera accès à près de 7000 documents patrimoniaux d’exception.


Encore mieux que la caverne d’Ali Baba ! Le portail numérique Bibliothèques d’Orient, mis en ligne aujourd’hui par la Bibliothèque nationale de France (BnF), recèle de vrais trésors. Livres imprimés et manuscrits, articles de presse, cartes, estampes, gravures, poèmes, partitions, œuvres d’art ou encore photographies viennent donner vie à des siècles d’histoire et ouvrir les portes de l’Orient à tout un chacun. En tout, pas moins de 7 000 documents consultables à portée de clic. Des documents remarquables peu connus du public car dispersés entre différents pays et de multiples institutions. A coup sûr, c’est une grande page de culture qui s’ouvre. L’ambition est d’illustrer les échanges entre la France et sept pays du Proche-Orient : l’Egypte, l’Irak, la Jordanie, le Liban, la Palestine, la Syrie et la Turquie. Les corpus documentaires numérisés témoignent des relations entre ces différents pays, de la façon dont chacun a été appréhendé et représenté par l’autre durant des siècles de contact.

Cette bibliothèque numérique géante couvre principalement la période 1798-1945 en trois langues (français, arabe et anglais).  Pour bâtir ce portail numérique collaboratif, la BnF a réuni ses collections avec sept bibliothèques patrimoniales et de recherche présentes au Proche-Orient et spécialisées dans les études orientales. Les partenaires espèrent ouvrir de nouveaux champs pour la recherche universitaire. Parmi les protagonistes, on compte deux institutions dominicaines. La BnF s’est en effet associée à l’Institut dominicain d’études orientales au Caire et à l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem (l’Ebaf). A noter que le couvent Saint-Etienne conserve à Jérusalem plus de 150 000 volumes et 1000 titres de revues spécialisées traitant d’archéologie et de littérature du Proche-Orient ancien et récent ainsi qu’une importante collection de plans et de cartes topographiques. Sa collection des photos remonte à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle et contient environ 15 000 négatifs en verre et plusieurs milliers de photos de la région. Quant à l’Institut dominicain d’études orientales au Caire, il gère l’une des plus importantes bibliothèques spécialisées dans le domaine de l’islamologie, avec plus de 125 000 volumes et 1 800 titres de périodiques. Il propose plus de 20 000 textes du patrimoine arabo-musulman. Participent également au projet Bibliothèques d’Orient, l’Institut français d’archéologie orientale au Caire, le Centre d’Etudes alexandrines à Alexandrie, l’Institut français du Proche-Orient et la Bibliothèque orientale de l’université Saint-Joseph, toutes deux à Beyrouth et enfin l’Institut français d’Études anatoliennes à Istanbul. Dès le mois de janvier 2018, de nouveaux partenaires institutionnels français et étrangers devraient rejoindre le projet, annonce la Bnf dans son communiqué.

Sélectionnés avec soin par un conseil scientifique composé de conservateurs de la BnF, de représentants des établissements partenaires et de scientifiques de haut niveau, les 7000 documents réunis sur le portail numérique sont  répartis à travers sept rubriques thématiques : Carrefours, Communautés, Religions, Savoirs, Politiques, Imaginaires et Personnalités. Les collections rassemblent notamment de précieux manuscrits hébreux, des cartes qui ouvrent de nouvelles perspectives pour l’histoire sociale et économique de la Turquie, la première revue féministe, L’Egyptienne, en langue française fondée en 1925, ou encore Le Caire immortalisé par le photographe italien Beniamino Facchinelli (1839-1895). Voire même des notes manuscrites authentiques de la main de Gérard de Nerval tirés de son fameux Carnet de voyage en Orient.

Le patrimoine documentaire en danger

Mille et une œuvres donc qui sont autant de vestiges qui doivent non pas seulement être valorisés mais protégés comme le rappelle dans le communiqué officiel, la présidente de la BnF, Laurence Engel : « Bibliothèques d’Orient permet non seulement de faire découvrir au grand public un patrimoine d’exception, mais aussi de contribuer concrètement à sa sauvegarde. C’est un engagement fort de la BnF, qui agit pour protéger le patrimoine documentaire en danger. » De fait, le patrimoine écrit, support essentiel de la transmission des savoirs et des mémoires, est souvent la cible des actions de destruction dans les situations de conflit et d’instabilité.

Le temps joue son œuvre également. Si l’accent est plutôt placé sur la période du XIXème siècle et la première moitié du XXème siècle, une attention particulière est toutefois portée à la préservation de patrimoines menacés. Deux recueils liturgiques syriaques des XIème et XVIIème siècles, conservés au monastère de Charfet au Liban, et deux évangéliaires – également du pays du Cèdre – datant des XIVème et XVIème siècles, appartenant au couvent Salvatorien Melkite de Jounieh, ont ainsi été restaurés avant d’être numérisés et mis en ligne sur Bibliothèques d’Orient.

C’est grâce aux deux mécènes, Total et Plastic Omnium, que le chantier de numérisation et la mise en ligne des documents des bibliothèques partenaires a pu être financé et voir le jour. Le site Bibliothèques d’Orient sera présenté à l’Institut du monde arabe du 26 septembre 2017 au 14 janvier 2018, et au musée des beaux-arts de Tourcoing du 17 février au 5 juin 2018 dans le cadre de l’exposition « Chrétiens d’Orient, 2000 d’histoire ».  Pour mémoire, l’Œuvre d’Orient, pour l’occasion, présentera une exposition sur Jérusalem rédigée par Terre Sainte Magazine.