Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

Un dialogue peu connu

Frans Bouwen, m.afr.
30 mars 2017
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Le Concile de Chalcédoine s’est tenu en 451. Plus de 1 500 ans plus tard, les théologiens
en parlent encore. Puisqu’il s’agit de comprendre les raisons des déchirures
qu’il a causées dans l’unité de l’Église.


Le dialogue entre l’Église catholique et l’Église orthodoxe de traditions byzantine, grecque et slave, est assez bien connu ; cette rubrique en a parlé plusieurs fois. Un dialogue théologique bien moins connu est celui entre l’Église catholique et les Églises orthodoxes orientales, c’est-à-dire les Églises qui n’ont pas reconnu le concile de Chalcédoine en 451, et étaient dans le passé appelées “monophysites”. Ce sont les Églises arménienne, syriaque, copte, éthiopienne, érythréenne et malankare orthodoxes.
Ce dialogue a commencé en 2004. La Commission mixte internationale, chargée de ce dialogue, s’est depuis lors réunie chaque année, alternativement à Rome ou dans un des pays de l’orthodoxie orientale : en Arménie, en Syrie, au Liban, en Égypte, en Éthiopie et en Inde. Après un début un peu hésitant, la Commission a publié un premier document commun en 2009, sous le titre : “Nature, constitution et mission de l’Église”. Sur la base de l’ecclésiologie de communion, il affirme une large compréhension commune sur la nature de l’Église, l’épiscopat, la succession apostolique, l’autorité des conciles et la mission. Il prend aussi note de quelques points qui demandent encore une étude ultérieure, comme le nombre des conciles œcuméniques et le rôle d’un ministère de communion au niveau universel de l’Église. C’est ce dernier thème que la Commission commence à étudier dans le deuxième document commun publié en 2015, “L’exercice de la communion dans l’Église ancienne et ses implications pour notre recherche de la communion aujourd’hui”. Cette étude examine comment la communion entre les Églises était exercée à l’époque où il n’y avait de séparation qu’entre Occidentaux et Orientaux sans schisme, à savoir avant 451, comme source privilégiée d’inspiration pour la recherche de l’unité aujourd’hui. Dans le but d’assurer leur fidélité à la tradition apostolique, toutes les Églises ont toujours eu le souci d’entretenir la communion avec les autres Églises, de manière officielle par des visites, des lettres et des synodes, mais aussi par beaucoup d’autres aspects de la vie ecclésiale comme la prière, la liturgie, le monachisme, le martyre, la vénération des saints et les pèlerinages. Le texte constate que “cette communion est multidimensionnelle et ne peut être réduite à la seule communion officielle, hiérarchique”. La conclusion est importante : “Les membres de la Commission sont à même d’observer avec satisfaction que, pour une grande part, la communication qui existait entre leurs Églises aux premiers siècles a été ravivée ces dernières années”. Leurs études futures s’inscriront dans cette perspective : “Ils se demanderont dans quelle mesure la restauration des relations qui existaient aux premiers siècles est suffisante pour rétablir la pleine communion sacramentelle aujourd’hui”.

Dans la cathédrale éthiopienne de Jérusalem, lors de la semaine pour l’Unité des chrétiens 2017. De gauche à droite un éthiopien (de dos), un franciscain, un arménien, l’évêque éthiopien, un copte.

C’est une vision très encourageante pour l’avenir du dialogue qui a maintenant entrepris l’étude des sacrements : le baptême et la confirmation, au Caire en 2016, et l’eucharistie, à Rome en 2017. Quelques questions subsistent sur la reconnaissance mutuelle du baptême, mais il existe un accord complet sur l’eucharistie. L’esprit confiant du dialogue a même permis de surmonter deux polémiques historiques sans devoir y consacrer une étude spéciale : la dispute de savoir si le moment consécratoire de l’eucharistie est constitué par les paroles de l’institution ou par l’épiclèse, et l’usage de pain fermenté ou non fermenté. Tous reconnaissent que ces diversités ne constituent pas un problème dogmatique.
C’est le signe d’une compréhension mutuelle grandissante et le fruit de l’esprit fraternel et cordial qui caractérise ce dialogue et le rend différent de beaucoup d’autres. Il est donc permis de regarder l’avenir avec confiance, surtout si l’on y ajoute les relations fraternelles qui existent entre catholiques et orthodoxes orientaux un peu partout dans le monde.♦

 

Dernière mise à jour: 11/01/2024 13:39