Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

Terra Sancta Museum: les parures de mariage palestiniennes à l’honneur

Marie-Armelle Beaulieu
30 mai 2023
email whatsapp whatsapp facebook twitter version imprimable
Coiffe portée par les femmes hébronites, et iznaq en argent, attachée sur les deux oreilles pour encadré le visage de la femme ©Terra Sancta Museum

La section historique du Terra Sancta Museum s’apprête à exposer le Trésor du Saint-Sépulcre. Au milieu des prestigieuses collections offertes par les cours européennes, on trouvera, entre autres, des bijoux palestiniens. Le frère Stéphane Milovitch en charge des Biens culturels de la Custodie s’en explique.


« On a découvert une nouvelle pièce du trésor palestinien ». Frère Stéphane est tout heureux. Responsable des Biens culturels de la Custodie, il continue de répertorier les objets confiés aux franciscains au fil des siècles.

« Nous avons voulu inventorier les ex-voto offerts à l’autel de la Vierge des Douleurs au Saint-Sépulcre. Parmi eux, nous avons découvert trois nouveaux éléments de parures de mariage palestiniennes : deux bracelets, dont l’un en ambre et un iznaq (collier) en or massif. Ils correspondent exactement à ceux que l’on peut voir dans les peintures du XIXe siècle et viennent en complément de ce que nous avions déjà. »

En Palestine, c’est dans les années 1930 que la robe blanche a pris le pas sur le costume traditionnel des mariées. Celui-ci était composé de plusieurs pièces : la robe, la coiffe et les bijoux.

Lire aussi >> Un trésor oublié redécouvert à l’église Saint-Sauveur de Jérusalem

À ce jour, frère Stéphane ne sait pas encore avec précision comment les franciscains sont entrés en possession des coiffes et des bijoux de mariées, encore que la récente découverte puisse être un indice : les ex-voto. Toujours est-il que ces objets sont de précieux témoins des relations que les franciscains ont entretenues (et continuent d’entretenir) avec les autochtones chrétiens, juifs et musulmans. « Et ils entreront au musée », annonce fièrement le religieux.

“Bien sûr nous sommes les gardiens des Lieux saints et à ce titre, nous sommes en relation avec l’Église Universelle toujours désireuse de garder le lien avec l’Église-mère de toute la chrétienté. Mais nous sommes aussi “gardiens de nos frères”, les habitants du pays, avec qui et pour qui nous déployons depuis huit siècles toutes nos activités pastorales et caritatives.” Frère Stéphane exprime avec passion cette double vocation de la Custodie. C’est pourquoi elle sera inscrite dans le parcours muséal de la section historique du musée. “Ces œuvres locales n’ont peut-être pas la qualité des œuvres en provenance d’Occident mais elles n’en sont pas moins des trésors.” En effet, il y a quelques mois le Louvre a fait jouer son droit de préemption sur une maquette du Saint-Sépulcre en bois incrusté de nacre. On en recense 30 dans le monde. La France en exposait déjà une au Mucem, la plus proche ensuite est au British Museum. Quant à la coiffe de mariée qui sera exposée, elle fait partie des 12 pièces répertoriées dans le monde (dont 3 appartiennent à la Custodie). On peut aujourd’hui en voir au British Museum de Londres, au musée du Quai Branly à Paris ou au musée américain d’Histoire naturelle de New York. “À la différence de ces musées, tout ce que nous exposons fait partie de notre vie d’ici. Les coiffes et colliers au même titre que la pharmacie, les firmans ottomans, ou le trésor liturgique” ajoute avec satisfaction le frère Stéphane.

La représentation par Albrecht de Vriendt (Gand 1843-1900 Anvers) d’une jeune femme de Bethléem est, par son réalisme, une œuvre remarquable et rare dans le contexte de l’orientalisme franco-flamand de la fin du XIXe siècle. À son poignet gauche on voit les exactes répliques des bijoux offerts en ex-voto mentionnés dans l’article.

Avec l’aide de deux membres du comité scientifique du Terra Sancta Museum, Raphaëlle Ziadé, conservatrice des collections byzantines du Petit Palais et spécialiste du christianisme oriental et George Al ’Ama, collectionneur et expert en art palestinien, frère Stéphane travaille à donner une place de choix à ces œuvres. “Dans la proue du musée, nous envisageons une salle sur l’art chrétien local, icones, nacre, éventuellement des documents. Cet espace est suffisamment grand pour accueillir des expositions temporaires. Nous avons de quoi faire tourner nos collections. Nous sommes également en contact avec nos frères des Églises orientales, et certains semblent intéressés à exposer chez nous quelques-unes de leurs œuvres, pour faire connaître leurs trésors alors qu’ils ne disposent pas aujourd’hui des lieux, des personnes et des moyens pour les mettre en valeur. Nous serons heureux de leur offrir cette visibilité. D’expérience nous savons que cela peut entraîner un cercle vertueux et faire venir à eux les experts dont ils ont besoin. Les maquettes, les canons d’autel en nacre, la plus belle des coiffes de mariées, iront respectivement dans la salle des sanctuaires, celle de l’autel italien, celle de l’apostolat franciscain ou celle des conduites. Précisément parce que ce contact avec la population locale est l’étoffe de notre vie.”
Ouverture prévue : octobre 2025 !

 

Dernière mise à jour: 20/05/2024 10:29

Sur le même sujet