Ces cinq derniers mois, le séisme du 7-Octobre a occasionné de fortes répliques au Liban et en Syrie. Les deux pays, qui font partie de la Terre Sainte élargie et du territoire de la province franciscaine de la Custodie, n’en finissent pas d’accumuler les crises. Dans les 11 couvents, quatre au Liban, sept en Syrie, les 24 frères (12 par pays) poursuivent inlassablement leur service pastoral et le soutien concret aux populations qui leur sont confiées.
Au lendemain de l’attaque meurtrière du Hamas sur les villages israéliens frontaliers de la bande de Gaza, le Hezbollah, basé au Liban, commença à tirer des roquettes et des obus d’artillerie sur des positions israéliennes. Entre le 8 octobre 2023 et la mi-septembre 2024, quelque 8 500 roquettes furent tirées par le groupe paramilitaire chiite, principalement sur les zones frontalières du nord d’Israël, entraînant le déplacement de 60 000 habitants.
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Depuis, les bombardements israéliens sur le sud Liban n’ont pas cessé. Frère Toufic Bou Merhi en sait quelque chose. Avec frère Pierre Richa, il partageait sa semaine entre Tyr et Deir Mimas, d’un bout à l’autre de l’axe ouest-est de leur paroisse. Tyr se situe sur la côte méditerranéenne, à 20 kilomètres au nord de la frontière libano-israélienne. Deir Mimas est à la frontière avec le Golan. L’axe nord-sud du territoire va de Sidon (40 kilomètres au sud de Beyrouth) jusqu’à Naqoura, à 3 km de la frontière libano-israélienne. “Sur ce territoire, nous desservons près de 300 familles”.
De crise en crise
Depuis le 8-octobre 2023, frère Toufic continuait seul à visiter à Deir Mimas les onze familles qui étaient restées. “Ils sont trop pauvres pour partir”. Frère Toufic venait les ravitailler au risque de sa vie par une route où il y a des voitures bombardées. “Il m’est même arrivé de passer devant des cadavres.”
À la mi-septembre, la situation s’est considérablement dégradée des deux côtés de la frontière. Sur le territoire de la paroisse, s’est abattu un déluge de feu et le couvent de Tyr a ouvert ses portes aux réfugiés. “Nous avons accueilli près de 150 personnes. Des familles parties sans rien emporter sont venues camper dans les dépendances du couvent et dans la cour”. Le 27 octobre c’était au tour du couvent de subir la déflagration des bombes. “Nous sommes partis pour Beyrouth quand tous les réfugiés furent partis.”
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Depuis quelques semaines déjà, tous les couvents franciscains du pays, jusqu’à celui de Tripoli au nord, accueillaient des réfugiés. “Avec le vicaire apostolique de Beyrouth, Mgr César Essayan, il a été décidé que les communautés religieuses latines accueilleraient des réfugiés chrétiens dans la mesure de leurs possibilités, tandis que les écoles ont été ouvertes aux musulmans.” Un million de Libanais ont été déplacés par les bombardements israéliens.
En cinq ans, c’est la troisième grosse crise qui mobilise les franciscains comme les autres communautés religieuses chrétiennes du pays, après la grave crise économique qui sévit depuis 2019 et l’explosion du port de Beyrouth en 2020.
Frère Toufic et frère Pierre après avoir assisté les réfugiés depuis Beyrouth, sont retournés début décembre à Tyr à la faveur de la trêve. “Certains de nos fidèles sont déjà rentrés dans le sud. À Deir Mimas, ils sont retournés dans des maisons sans eau ni électricité du fait des bombardements parce qu’ils n’avaient pas les moyens de vivre à Beyrouth. Des villages entiers sont bombardés dans notre secteur et dans la ville de Tyr des quartiers sont rasés.” Le couvent de Tyr nécessite des réparations, les conditions de vie y sont précaires mais frères Toufic et Pierre ont fait de leur mieux pour faire sentir l’ambiance de Noël. Ils espéraient pouvoir reprendre la catéchèse et les animations après les fêtes. “Si nous avons des paroissiens à servir, alors nous sommes là.”