Le Rabbin Schneerson: un messie ?

Le mouvement Chabad se distingue par une dévotion exceptionnelle envers le rabbin Menachem Mendel Schneerson, le Rebbe, perçu comme le porteur de l’ère messianique. À travers l’enseignement du rabbin Yisroel Goldberg, une vision dynamique du messianisme Chabad émerge, invitant chacun à participer activement à la rédemption.
Au cœur des quartiers animés de Jérusalem la présence du mouvement Chabad est reconnaissable à son drapeau jaune orné d’une couronne bleue. Ses adeptes, répartis à travers le monde, partagent une dévotion envers le rabbin Menachem Mendel Schneerson, le Rebbe, figure centrale de leur foi. Si ce nom est reconnu dans les milieux juifs, il est aussi porteur d’une charge messianique unique. Pour les membres les plus fervents du mouvement, le Rebbe n’est pas simplement un guide spirituel, mais le Messie, celui qui incarne l’ère de la rédemption universelle.
Le rabbin Yisroel Goldberg, représentant de Chabad à Jérusalem et directeur du centre Chabad pour les forces de Défense israéliennes, dévoile la vision de ce messianisme et de l’héritage du rabbin Schneerson. Goldberg offre un témoignage nuancé, se concentrant sur le message central du mouvement : l’accomplissement de la mission divine de chaque être humain dans la perspective de la rédemption.
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“Le Rebbe était un grand leader, pas seulement dans le passé, mais son influence se poursuit aujourd’hui”, explique le rabbin Yisroel Goldberg. Pour lui, Schneerson n’est pas simplement un érudit ou un éducateur. Son enseignement, loin d’être figé dans le temps, continue d’inspirer de nombreux juifs, y compris en dehors des cercles Chabad. Selon Goldberg, “la sagesse et les enseignements du Rebbe sont toujours sources d’inspiration, même dans les défis contemporains, comme la situation actuelle en Israël”.
Le messianisme un processus actif
Cette vision du Rebbe comme une figure messianique s’inscrit dans une tradition qui dépasse le simple cadre d’un rabbin charismatique. Le mouvement Chabad, né au XVIIIe siècle, profondément attaché aux principes de la Torah et de la Kabbale, voit en lui celui qui mène l’humanité vers un monde de paix et de perfection, l’ère messianique. Pour eux, chaque acte vertueux contribue à hâter cette révélation divine.
Yisroel Goldberg rappelle que, selon les enseignements du rabbin Schneerson, la rédemption est un processus actif. “Chaque bonne action que nous accomplissons accélère la venue du Messie. Nous sommes la génération finale de l’exil et la première génération de la rédemption. C’est ce que nous a révélé le Rebbe.”, explique-t-il. Ainsi, la quête du Messie n’est pas une attente passive, mais un engagement dans un monde en perpétuelle évolution.

Selon la tradition Chabad, l’accomplissement des mitsvot (commandements) par les juifs et le respect des 7 lois noachides (1) par les nations sont essentiels pour préparer le monde à l’arrivée du Messie. Pour Yisroel Goldberg, il ne s’agit pas seulement d’une quête spirituelle, mais d’un appel à l’action. “Chaque personne dans ce monde est comme une pièce d’un grand puzzle. Dieu nous a créés pour accomplir une mission”, rappelle-t-il. Ce “Tikkun Olam” – la réparation du monde – est au cœur de la mission de chaque individu, une idée qui traverse le mouvement Chabad.
Vous avez dit Chabad ?
Le nom Habad (orthographié Chabad en français pour traduire la gutturale comme dans J.-S. Bach) est un acronyme hébraïque de 3 mots qui désignent 3 facultés intellectuelles fondamentales dans la kabbale et la pensée hassidique : (hokhmah – la sagesse) (binah – l’intelligence) + (da‛at -la connaissance, la connexion profonde). Ce nom a été choisi par le fondateur du mouvement, Rabbi Schneur Zalman de Lyadi (1745-1812), aussi appelé l’Admour Hazaken (le vieux Rabbi). Il a fondé le Chabad-Loubavitch à la fin du XVIIIe siècle en Biélorussie, comme une branche du hassidisme qui met l’accent non seulement sur la ferveur et la foi, mais aussi sur la compréhension intellectuelle profonde de la divinité.
Un Messie déjà parmi nous ?
Le rôle de Rabbi Schneerson en tant que Messie fait débat au sein même du mouvement. Certains de ses partisans croient fermement que le Rabbi est déjà le Messie et qu’il reviendra pour accomplir la rédemption. D’autres, tout en reconnaissant son potentiel messianique, estiment que la génération actuelle n’a pas été assez vertueuse pour mériter sa révélation pleine et entière.
Goldberg, quant à lui, nuance cette question. “Nous croyons que le Rabbi avait le potentiel d’être le Messie, mais c’est Dieu qui décidera du moment où cela se réalisera. Nous prions pour que ce soit lui, car il est celui qui correspond le mieux à la prophétie”, explique-t-il. Pour lui, il est essentiel de ne pas se perdre dans les divisions internes sur cette question. “Ce qui est important, c’est de se concentrer sur l’essentiel : l’arrivée de l’ère messianique, quel qu’en soit le porte-étendard”, précise-t-il.
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La question de la nature de la rédemption est également fondamentale dans la pensée Chabad. Le judaïsme, et plus particulièrement le mouvement Chabad, conçoit la rédemption comme la perfection du monde. “Le monde a été créé pour atteindre un état de perfection. L’objectif n’est pas seulement de réparer les péchés, mais d’accomplir le but de la création elle-même : un monde purifié, sans mal ni souffrance”, explique Goldberg. Il poursuit en rappelant que le rôle des juifs, et plus largement de l’humanité, est de contribuer activement à ce processus. “Ce n’est pas le Messie qui accomplira seul la rédemption, mais nous avons tous un rôle à jouer dans ce Tikkun Olam”, insiste-t-il. Ce travail est collectif et nécessite l’engagement de chaque individu, dans une perspective de transformation spirituelle et morale du monde.
Le contexte actuel
La situation actuelle en Israël, marquée par la guerre, renforce la conviction messianique de nombreux adeptes de Chabad. Pour Goldberg, Israël est le cœur de la rédemption. “Israël est la terre que Dieu protège. Elle est le lieu où les miracles se manifestent de manière claire et évidente”, déclare-t-il.
Il fait référence aux événements des guerres passées, notamment la guerre de Yom Kippour (1973) et la guerre des Six-Jours (1967), où Israël a connu des victoires inexplicables, selon ses mots, aux yeux du monde. “Aucun raisonnement rationnel ne peut expliquer ces événements. C’était un miracle”, assure Goldberg, avant de souligner que, plus que jamais, la foi en la protection divine est essentielle pour faire face aux défis actuels.
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À travers les propos du rabbin Yisroel Goldberg, une image claire du messianisme Chabad émerge : un messianisme qui n’est pas une simple attente, mais un appel à l’action, un appel à réparer le monde par la vertu et la foi. Le rabbin Schneerson, à la fois guide et Messie potentiel, incarne cette vision d’un monde renouvelé, purifié des ténèbres du mal et de la souffrance.
Pour ceux qui suivent son enseignement, l’arrivée du Messie n’est pas une question de spéculation, mais une certitude qui se construit à chaque acte vertueux, chaque pas de foi, chaque sourire échangé dans l’esprit de la Torah. Et ainsi, à travers l’héritage du Rebbe, une ère de paix et d’harmonie se profile, un monde qui, pour les croyants, n’attend qu’à se dévoiler. t
- L’interdiction du meurtre ; de l’idolâtrie ; du blasphème ; du vol ; des relations sexuelles avec des proches parents ; de l’arrachage et de la consommation d’un membre toujours vivant ; le devoir d’installer un système légal en vue de faire respecter ces lois.
Un leader intemporel
Menachem Mendel Schneerson, né le 18 avril 1902 à Nikolaïev (Ukraine), fut le septième Rebbe de la dynastie Loubavitch et un leader spirituel majeur du judaïsme mondial. Fils de Levi Yitzchak Schneerson, érudit et kabbaliste, il grandit dans une famille marquée par l’étude religieuse. Dès l’enfance il fut éduqué à la connaissance approfondie du Talmud et de la Kabbale, notamment par son père. Après avoir épousé Chaya Mushka Schneerson en 1928, il se rendit à Berlin et Paris avant d’émigrer aux États-Unis en 1941, où il assuma des responsabilités importantes au sein du mouvement Chabad. En 1950, à la suite du décès de son beau-père, il devint le leader de la mouvance, poursuivant son œuvre d’expansion du judaïsme à travers le monde. Il lança des programmes éducatifs novateurs et encouragea l’utilisation des technologies modernes pour diffuser les enseignements du judaïsme. Son approche spirituelle prônait l’engagement personnel dans l’étude de la Torah et la diffusion de ses valeurs. Son héritage perdure à travers plus de 4 600 institutions mondiales. Le Rebbe décéda le 12 juin 1994, laissant un impact profond sur la communauté juive.