Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

Faire honneur à D.ieu qui m’a créée

Eliora Mischler
30 juillet 2013
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Parité, évolution de la société israélienne, voici certains des combats
de la Rabbine Anna Gerrard, juive libérale. Anna est à la fois juive laïque, croyante et pratiquante à sa façon. Indépendante, elle ne laisse pas la religion lui imposer son mode de vie.


Anna Gerrard est une jeune femme très charismatique. Elle a voulu que la rencontre ait lieu au YMCA de Jérusalem dirigé conjointement par des Israéliens juifs et arabes. Sous les arches du restaurant elle déclare vivement avant même de commander son repas : “Le fruit de la connaissance ayant été consommé à la fois par Adam et Ève, l’homme et la femme sont totalement égaux en droits et en devoirs devant D.ieu. C’est pourquoi, chez les juifs libéraux, à 13 ans, la jeune fille, tout comme le jeune garçon font leur bar-mitzva (l’entrée dans la vie adulte pour un jeune juif) en lisant le rouleau de la Torah à haute voix et peuvent tous deux mettre une kippa (calotte), porter le châle de prière et les phylactères. Le judaïsme libéral ne conçoit aucune forme de soumission ; chacun est libre de pratiquer ce qu’il veut et comme il veut”. Elle boit quelques gorgées d’eau fraîche et renchérit : “Ce qui se passe au mur des Lamentations contre ces femmes est une violation des droits de la femme par l’État d’Israël et l’institution orthodoxe religieuse” s’insurge Anna. “Chacun et chacune devrait pouvoir prier comme il l’entend et faire ce qui lui semble juste. Même si je n’attribue aucune valeur religieuse spécifique au mur des Lamentations – car les juifs libéraux ne souhaitent pas particulièrement que le Temple soit reconstruit – je soutiens activement ces femmes et j’ai même participé plusieurs fois à leurs prières”. Car pour la rabbine Anna, ce qui est en jeu dans le combat des femmes du Mur va au-delà de la querelle religieuse. “Il faut se battre sur cette terre pour l’égalité et la dignité et pour moi, la solution serait une séparation en trois parties et non pas deux : une pour les hommes, une pour les femmes et une pour les juives et juifs qui sont égalitaires et ne souhaitent pas une séparation entre les sexes pendant les prières”.

Agir pour une société meilleure

Diviser pour mieux régner. Mais si les juifs libéraux ne se sentent pas tenus d’observer les commandements divins ni attachés d’aucune manière aux 613 commandements, qu’est-ce qui fait de lui un juif pratiquant ? En quoi se distingue-t-il d’un juif laïc ? De quoi est faite sa vie de tous les jours ? “Ma vie de tous les jours est différente tous les jours ! s’exclame Anna. Je veux vivre une vie qui fasse honneur à D.ieu qui m’a créée à son image. Personnellement, je ne prie pas de manière structurée (avec un texte) sauf durant le shabbat. Je prends beaucoup de temps de silence. La loi juive n’est pas vraiment importante pour moi. Je préfère agir pour une société meilleure ; je ne me sens pas commandée par D.ieu de faire quoi que ce soit mais je me sens obligée de comprendre les idées et les concepts qui guident ces commandements”.
Quand on lui demande des exemples concrets, Anna répond avec la même liberté de ton et d’opinion. “Les lois de la cacherout ont été faites par les hommes pour que nous mangions de façon saine et éthique ; c’est aussi bon pour l’environnement. Le porc et les fruits de mer étaient des aliments dangereux pour la santé il y a 4000 ans car nous n’avions pas de réfrigérateur. Par ailleurs, peu de juifs savent que le fait d’interdire le mélange entre la viande et le lait “tu ne cuiras pas un veau dans le lait de la mère” est un commandement formulé en réaction contre un rituel polythéiste cananéen. La femme qui voulait être fertile mangeait ce mélange qui a été interdit aux juifs. Cela nous enseigne à ne pas copier les pratiques des religions polythéistes. Les valeurs véhiculées par les lois de la cacherout, je les retrouve mieux dans la nourriture biologique ; par le simple fait de manger de façon responsable en ne gâchant pas de nourriture par exemple et en recyclant au maximum plutôt que d’acheter de la viande casher qui a été égorgée et élevée dans une cage.”


Fiche d’identité Anna Gerrard. Profession : rabbine libérale

Anna Gerrard a 34 ans ; elle est originaire de Grande Bretagne. Elle est venue s’installer en Israël en 2008 au cours de ses études rabbiniques à Jérusalem au sein du mouvement juif libéral. Elle est à présent la première femme Rabbine depuis la Deuxième Guerre mondiale, dans la région de Gloucestershire et à Dublin.

Dernière mise à jour: 30/12/2023 21:44

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