Tout un symbole

La kippa (au pluriel kippot), est une petite calotte que les hommes juifs pratiquants portent sur la tête. Sa racine, “kaf”, signifie
“la paume” ou “la cuillère” et réfère à un élément incurvé. Si elle est aujourd’hui un élément distinctif de la communauté juive,
la kippa n’a pourtant aucune origine biblique ou talmudique. Dans l’Antiquité, seuls les prêtres portaient un couvre-chef. C’est au XVIe siècle que son port se généralise, sous l’impulsion du rabbin Joseph Karo. Il décrète dans un abrégé de Loi juive qui fera date, qu’il est interdit de marcher quatre coudées (soit environ 2 m) hors de chez soi la tête nue (soit environ deux mètres). Si à l’époque le texte est contesté, la kippa finit par devenir un élément essentiel de l’habit juif et un signe de ralliement à la Torah. Signe d’humilité et de soumission à Dieu, la kippa rappelle la présence divine au-dessus de chacun tout en distinguant l’homme religieux de celui qui ne l’est pas. Chacun doit toutefois en revêtir une lorsqu’il entre dans une synagogue ou lors des prières familiales. Photo ©Goldberg/Flash90
Le velours noir des juifs haredim

Élégante et austère, la kippa de velours noir est portée par les hommes juifs les plus pieux, ceux qu’on appelle les haredim (littéralement, les “craignant Dieu”). Rejetant toute forme de modernité, cette communauté observe une pratique religieuse stricte et conservatrice
qui transparaît dans un style vestimentaire austère. La sobriété et le noir y sont à l’honneur, comme le veut la loi juive. Dans les sources kabbalistiques (judaïsme ésotérique), le noir incarne l’unicité de Dieu : c’est la seule couleur à absorber toutes les autres. Plus elle est large et épaisse, plus son propriétaire aura tendance à dédier sa vie à l’étude de la Torah et du Talmud. Il aimera aussi la recouvrir d’un chapeau borsalino ou d’un shtreimel en fourrure les jours de fête : un moyen de renforcer le rappel de la présence de Dieu. Photo ©Olivier Fitoussi /FLASH90
Le tricot blanc à pompon des hassidim de Bratslav

Elle ressemble à un bonnet, mais c’est bien une kippa. Blanche et ornée d’un pompon elle est très identifiable : son propriétaire sera immanquablement un membre de la dynastie hassidique de Bratslav. Les hassidim (“pieux”) sont une des franges du judaïsme ultra-orthodoxe dont la doctrine est axée sur la piété, la charité et la communion avec Dieu par les chants. La dynastie Bratslav, née en Ukraine à la fin du XVIIIe siècle, se distingue des autres courants hassidiques par sa croyance que nul ne peut succéder au Rabbi Nahman, son fondateur, dont le nom est parfois brodé en hébreu sur les bords de leur kippa. Photo ©Yaakov Naumi/Flash90.
L’épais crochet des colons

Quand elles sont larges et colorées, ces kippas srouga (“en crochet”) ont tendance à être arborées par les Israéliens qui vivent dans les colonies les plus idéologiques ou les avant-postes illégaux de Cisjordanie ou ceux qui sont favorables à ce mouvement. Initialement, la kippa tricotée symbolise l’appartenance au courant orthodoxe moderne, qui promeut un mode de vie inséré dans la société. Mais sa taille varie subtilement d’un groupe politique ou religieux à un autre. Les colons religieux-nationalistes et souvent suprématistes, portent les plus reconnaissables : certaines ressemblent presque à des bonnets.
On les voit beaucoup sur la tête des “jeunes des collines”, ces adolescents biberonnés
aux écoles talmudiques les plus radicales du mouvement de colonisation. Photo © Keren Freeman/FLASH90
Accessoire de mode

La grande majorité des juifs désireux de porter la kippa en possèdent plusieurs. C’est aussi un cadeau facile à faire. Il existe des magasins qui ne vendent que cela. On peut changer de kippa en fonction de son humeur, de la température extérieure ou de la couleur de sa chemise.
La kippa ne fait ni le degré de religiosité ni l’appartenance politique. À quelques exceptions près… (NDLR : BB pour BiBi, qui désigne affectueusement Benjamin Netanyahou). Photo © Johanna Geron/FLASH90
La kippa des juives féministes

Tout comme les hommes, les femmes juives doivent se couvrir la tête. Perruques, foulards… Tous les moyens sont bons, sauf un : la kippa, exclusivement réservée aux hommes. Une inégalité dénoncée par un groupe de femmes juives pratiquantes et féministes réunies au sein de l’association “Les femmes du Mur”. Depuis 1988, elles militent pour l’égalité des droits dans la prière au Mur Occidental. Tous les premiers des mois hébraïques, elles se rendent au Kotel pour y lire la Torah en portant le talith (châle de prière), les téphillin (cordes en cuir pour la tête et le bras) et la kippa. Elles bravent de ce fait la loi israélienne et sont régulièrement victimes de violences de la part d’hommes haredi. Photo ©Hadas Parush/Flash90

La touristique
C’est pour les touristes que les kippot gagnent en originalité. Un coup d’œil aux étals du souk
de la Vieille ville permet de mesurer la variété des matières, des couleurs et des styles : tricotées, satinées, brodées avec des étoiles de David… Il y en a pour tous les goûts. Achetées en guise de souvenir, elles servent aussi à entrer dans les synagogues et à se rendre au Mur Occidental. On y a d’ailleurs longtemps distribué des kippot en papier, un modèle à usage unique prisé par les non-juifs ou les juifs non-pratiquant de passage. Photo © Miriam Alster/Flash90.
La calotte des religieux catholiques

Les évêques et le pape portent-ils des kippot ? Semblables dans leur forme, la kippa et la calotte ne servent pas le même objectif. Si la première rappelle la présence de Dieu “au-dessus de nous”, la fonction de la seconde, aussi appelée submitrale, est plus pragmatique : elle permettait aux clercs de protéger leur tonsure du froid.
Si cette habitude de se raser une partie des cheveux en signe de renoncement aux vanités du monde a disparu après le Concile de Vatican II, le port de la calotte a perduré chez les évêques et les cardinaux. De la même couleur que leur soutane, elle est violette pour les évêques, rouge pour les cardinaux et blanche pour le pape. Photo ©Nati Shohat/FLASH90

Touche pas à ma kippa
La kippa, ce n’est pas le pompon des matelots ! Il est décommandé d’essayer de la toucher même si elle tombe à terre. Certains juifs parmi les plus religieux pourraient être gênés que sa kippa ait été touchée par une femme ou par un non-juif.
Si vous voyez un juif habillé de noir et blanc perdre sa kippa signalez-le lui – encore qu’il y a de très fortes chances qu’il s’en aperçoive dans l’instant – pour les autres… avisez… Photo © Nati Shohat/Flash90