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Israël-Palestine : demain, deux États partenaires ?

Cyrille David
30 juillet 2013
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Sur le terrain le statu quo est de mise après la reconnaissance par l’ONU de l’État de Palestine. Un statu quo qui glisse – à mesure que la colonisation progresse – vers une “disparition impossible” de la Palestine et des Palestiniens. Jacques Bendelac, s’il traite le sujet de l’occupation, parlera peu de la colonisation dans son livre Israël-Palestine : demain, deux États partenaires ? Il pense d’abord en économiste.
Ancien professeur d’économie à l’université hébraïque de Jérusalem, chercheur en science sociale, c’est l’intérêt d’Israël qui le préoccupe. Il affirme dans son dernier livre qu’Israël doit accompagner la création d’un État de Palestine. Parce que c’est dans l’intérêt économique de “l’État juif d’Israël”. Il ajoute que cet État doit être “économiquement viable et politiquement gouvernable”. Son travail s’appuie sur les statistiques officielles israéliennes et palestiniennes et sur les données d’un think-tank israélien.
“Israël a besoin d’un État palestinien au moins autant que la Palestine a besoin de l’État d’Israël.” Voilà la conclusion de sa réflexion. En 250 pages environ, Jacques Bendelac analyse les tenants et les aboutissants économiques de l’Occupation de ce qu’il nomme la Judée-Samarie ; sans omettre le rôle des décisions politiques et les impacts sociaux.
Il dissèque l’imbrication des économies israéliennes et palestiniennes, interdépendantes, spécialement depuis les accords d’union douanière signés à Paris en 1994. 75 % des importations et 90 % des exportations de la Palestine se font avec Israël (chiffres officiels palestiniens, 2009). Alors qu’Israël est dépendant de la main d’œuvre “bon marché et travailleuse” palestinienne et du marché captif qu’est la Palestine, son deuxième marché d’exportation.

L’occupation: un fardeau

Il estime le coût – très élevé – de l’Occupation. Selon lui, les premiers à en faire les frais en Israël sont les bénéficiaires des programmes sociaux. Entre 2004 et 2009 le nombre de personne concernées par l’indicateur israélien de pauvreté a presque doublé passant de 11 à 21 % de la population.
Sa conclusion est sans appel, l’Occupation est un vrai fardeau ; et pas qu’en terme d’image donnée à l’ONU. Environ 15 % du PIB israélien annuel – en temps de paix, le double en temps de guerre – est consacré à l’armée.
En outre, l’économiste israélien souligne qu’un État binational mettrait en danger le rêve sioniste d’un État à majorité juive. Pour toutes ces raisons, il faut accompagner selon lui la constitution d’un État palestinien viable. Il liste les atouts de la Palestine : une diaspora nombreuse et d’un niveau socio-professionnel élevé, une aide internationale importante, un fort potentiel touristique etc.
La réflexion économique et sociale du chercheur s’inscrit dans le contexte politique israélien. Menahem Begin accéda au pouvoir en 1992, après 15 ans de gouvernements à dominante nationaliste. Traditionnellement, la droite nationaliste adoptait pour les Territoires Occupés une politique “d’intégration forcée” à l’État d’Israël. Certaines tendances de ce courant prônant même la constitution du Grand Israël des rives de la Méditerranée au Jourdain. La première intifada (1987) ébranla le projet d’annexion discrète des Territoires Occupés. Le gouvernement travailliste élu en 1992 changea de logique et furent signés les accords d’Oslo (1993) qui débouchèrent sur la création d’une entité palestinienne autonome. Pour l’auteur, on est passé d’une période d’ “intégration forcée” à une période de “séparation négociée”. Suite à la deuxième intifada (2000-2005), la séparation deviendra “murée” et unilatérale. On peut utiliser cette lecture que fait Jacques Bendelac de l’échiquier politique israélien pour le placer lui-même. Il s’inscrirait donc dans une tradition plutôt travailliste.
L’auteur s’est par ailleurs intéressé aux arabes israéliens (Les arabes d’Israël, entre intégration et rupture, 2008).

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Israël-Palestine : demain, deux états partenaires ?
Jacques Bendelac
Editions : Armand Colin (Collection
“Eléments de réponse”)
260 pages.
Paru en 06/2012
Disponible au format numérique

 

Dernière mise à jour: 30/12/2023 22:26