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Israël / St-Siège : un jubilé d’argent, un accord en attente

Christophe Lafontaine
17 juin 2019
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Israël / St-Siège : un jubilé d’argent, un accord en attente
Préparatifs de la venue du pape François en mai 2014 à la résidence du Président israélien, à Jérusalem © Yonatan Sindel / Flash90

Pour les 25 ans de liens diplomatiques entre Israël et le Saint-Siège, le cardinal secrétaire d’Etat, P. Parolin a dit espérer voir « bientôt » un accord sur les questions financières de l’Eglise catholique en Israël.


Le 15 juin 1994 deux Missions diplomatiques, l’une à Tel Aviv (Jaffa) et l’autre au Vatican, ouvraient leurs portes. Elles incarnaient l’établissement des relations diplomatiques entre le Saint-Siège et Israël nées de l’Accord Fondamental signé le 30 décembre 1993. Cet accord portant sur de nombreux points dont la reconnaissance de l’Etat d’Israël par le Vatican est entré en vigueur le 10 mars 1994.

C’était l’époque de l’effondrement de l’Union soviétique, du traité de paix entre Israël et la Jordanie (1994) et des fameux Accords d’Oslo (1993).

Pour marquer ce jubilé d’argent, le « numéro 2 » du Vatican s’est rendu le 13 juin pour un concert de musique sacrée juive au Tempio Maggiore, la Grande Synagogue de Rome (Italie) qui a vu la présence de trois papes. Dans son discours à Oren David, l’ambassadeur d’Israël près le Saint-Siège, le cardinal Secrétaire d’Etat, Pietro Parolin, a souligné les bonnes relations qui existent entre Israël et le Saint-Siège et qui ne se limitent pas à la politique, mais touche également à la coopération universitaire, aux pèlerinages en Terre sainte et au dialogue interreligieux.

En remontant plus loin que ces 25 dernières années, le cardinal a également affirmé qu’au cours des cinquante dernières années, la compréhension et la confiance mutuelles ainsi que l’amitié entre juifs et catholiques s’étaient développées et approfondies. On peut le dire, notamment, dans le sillage du Concile Vatican II (1965).

C’est dans cette perspective, moins de 75 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale et la Shoah, au regard de la montée actuelle de l’antisémitisme en Europe et dans le monde, que le Saint-Siège par la voix de son numéro 2 a lancé un appel aux deux Etats afin d’« unir leurs forces pour favoriser la liberté religieuse, de culte et de conscience, cette condition indispensable pour protéger la dignité de tout être humain, et de travailler ensemble pour combattre l’antisémitisme. » L’Accord fondamental commun, a encouragé le Cardinal, « doit se poursuivre en combattant toute forme d’intolérance religieuse et en promouvant la compréhension réciproque entre les Nations, la tolérance entre les communautés et le respect pour la dignité et la vie humaine. »

Le Cardinal a par ailleurs voulu profiter de l’occasion pour rendre hommage à l’engagement pris par Israël de permettre à l’Église catholique « d’accomplir sa mission et d’apporter sa contribution à la société israélienne. » En insistant notamment sur le rôle des écoles catholiques, qui, « à travers l’éducation aux valeurs fondamentales, au dialogue et au respect réciproque, favorisent la création d’une société plus juste et pacifique. »

Encore des virages à négocier

Le Saint-Siège par la voix de son numéro 2 a dit souhaiter que « la cohérence avec l’esprit de l’Accord fondamental pour une collaboration renouvelée et fructueuse avec l’Eglise catholique en Israël ne faiblisse pas. » Car célébrer ce qui a été accompli, « apprécier le chemin parcouru » pour reprendre les mots du cardinal Parolin, ne signifie pas ignorer les questions en cours. Après la reconnaissance d’Israël par le Saint-Siège le 30 décembre 1993, et la convention diplomatique du 15 juin 1994, un accord juridique et financier était censé compléter ce dispositif.

Les diplomates des deux côtés continuent à essayer de négocier un accord sur toutes les questions en suspens relatives aux propriétés et aux impôts, afin que l’Eglise bénéficie d’une sécurité juridique et fiscale qui lui permette de mener à bien sa mission. L’accord fondamental entre le Saint-Siège et l’Etat d’Israël de 1993 – a ainsi affirmé le cardinal Parolin – « a ouvert une nouvelle phase dans les relations bilatérales, en entamant un chemin de coopération significatif. Ce dernier s’est concrétisé dans la signature de l’Accord sur la personnalité juridique de l’Eglise, dont le processus d’application est proche de la conclusion, et a ouvert un processus de négociation long et délicat au sein de la Commission bilatérale permanente de travail entre le Saint-Siège et l’Etat d’Israël pour parvenir à un Accord sur les questions financières, qui nous le souhaitons pourra bientôt se conclure. »  Un espoir qui ressemble à plus à un vieux serpent de mer à l’heure actuelle.

Le Saint-Siège encourage Israël à défendre l’égalité des droits pour tous

Le cardinal Secrétaire d’Etat Pietro Parolin a aussi insisté dans son discours sur la nature particulière des relations entre Israël et le Saint-Siège issue du caractère unique de la Terre Sainte. En particulier de Jérusalem pour laquelle le Saint-Siège réclame des garanties internationales.

Et le prélat de rappeler que « la ville de la paix est, en son cœur, l’héritage commun de tous les fidèles des trois grandes religions monothéistes et du monde entier », partageant l’espoir que la Ville Sainte soit « un lieu de réconciliation et de rencontre entre les religions » et devienne « un symbole de respect et de cohabitation pacifique. »

Dans ce contexte, le « numéro 2 » du Vatican a déclaré que le Saint-Siège souhaitait qu’Israël « puisse démontrer avec fierté la viabilité de sa démocratie en garantissant à tous des droits égaux et des opportunités égales pour la construction d’un avenir de paix et de concorde. » Pour mémoire, la semaine dernière, les évêques catholiques ont pris part à une déclaration signée par les Eglises chrétiennes de Terre Sainte contre la vente de propriétés de l’Eglise grecque-orthodoxe à des groupes radicaux juifs dans la vieille ville de Jérusalem, validée par la Cour suprême israélienne.