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Les Églises de Terre Sainte se mobilisent contre une nouvelle offensive fiscale

Augustin Bernard-Roudeix
25 juin 2024
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Février 2018, les Eglises de Terre Sainte fermaient la basilique du Saint-Sépulcre en guise de contestations aux décisions unilatérales prises par Israël ©MAB/TSM

Alors que la guerre et ses conséquences économiques pèsent dramatiquement sur toutes les Églises de Terre Sainte, plusieurs municipalités israéliennes ont engagé des procédures visant à taxer leur patrimoine. Les représentants des Églises visées ont co-signé une lettre au Premier ministre pour exiger l’arrêt de ces tentatives et la résolution définitive d’une question qui n’en finit pas d’irriter les relations avec les autorités israéliennes.


Dans une lettre commune adressée le 18 juin au Premier Ministre Benyamin Netanyahu et qui a fuité dans la presse, les chefs des Églises de Terre Sainte ont dénoncé « une attaque coordonnée contre la présence chrétienne en Terre Sainte ».

Cette protestation est une réponse aux procédures initiées par plusieurs grandes municipalités israéliennes, notamment Jérusalem, Tel Aviv-Jaffa, Nazareth et Ramla. Ces dernières réclament aux Églises le paiement de prétendues dettes fiscales et ont envoyé des lettres de mise en demeure ou saisi les tribunaux pour y parvenir.

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Ces initiatives constituent le dernier épisode d’un litige qui opposent les Églises de Terre Sainte aux autorités israéliennes sur la question de l’arnona, équivalent de la taxe d’habitation en France.

Les Églises soutiennent qu’elles sont exemptées de toutes taxation depuis une époque qui remonte au moins jusqu’à la souveraineté ottomane en Terre Sainte (début du XVIe siècle). Ces dispositions ont été entérinées par des traités internationaux successifs jusqu’au plan de partage de la Palestine adopté en 1947. La Jordanie, souveraine à Jérusalem-Est jusqu’en 1967, n’avait pas non plus levé cette exemption.

Bras de fer

En soutien de leurs demandes, les autorités israéliennes affirment que ces dispositions ne s’appliquent qu’aux lieux de cultes stricto sensu et ne concernent pas les biens affectés aux nombreuses autres activités des Églises comme l’hôtellerie, la restauration ou le commerce de souvenirs. Elles évoquent aussi une distorsion de concurrence nuisible aux professionnels israéliens et une importante perte de recettes fiscales.

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La municipalité de Jérusalem est aux avant-postes de ce litige : sa population est une des plus pauvres du pays et une large part (juifs ultra-orthodoxes, palestiniens) n’est donc pas imposable. Nir Barkat, alors maire de Jérusalem, s’était engagé dans un bras de fer avec les Églises dès 2018 pour taxer leurs « bien fonciers non cultuels » pour un montant de 650 millions de Shekel (plus de 162 millions d’euros), allant jusqu’à ordonner le gel de leurs comptes bancaires.

Leurs représentants s’y étaient fermement opposés, allant jusqu’à fermer le Saint-Sépulcre en février 2018 en signe de protestation. Face à un tollé aux répercussions mondiales, Benjamin Netanyahu avait dû personnellement reprendre le dossier, écarter les prétentions du maire et nommer un médiateur chargé de résoudre définitivement cette question.

« Assez est assez, arrêtez la persécution des Eglises », cette banderole avait été déployée en 2018 sur une des façades du parvis du Saint-Sépulcre. Sans parler de persécution, le ton de la lettre des chefs des Eglises exprime une interrogation sur des mesures qui conduiraient les communautés religieuses à quitter l’Etat d’Israël.

 

Six ans après, force est de constater que rien n’est réglé. Un dialogue est pourtant officiellement en cours depuis l’établissement de relations diplomatiques entre le Saint-Siège et l’État d’Israël. Signé en 1993, cet « Accord fondamental » dispose « l’établissement de négociations sur les problèmes de propriété et les questions économiques et fiscales » entre les parties. L’Église catholique évoquait déjà en 2018 ce contentieux de fiscalité locale comme une des raisons qui ralentissait l’aboutissement des tractations.

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Au-delà des seules institutions, cette « attaque générale contre les Églises et tous les chrétiens qui considèrent Jérusalem comme leur foyer spirituel » pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour des populations déjà très fragilisées. Cette exemption permet en effet aux Églises de Terre Sainte « d’investir massivement dans les services qui profitent à toute la société. Cela inclut des écoles construites et gérées par les Églises, des jardins d’enfants, des hôpitaux, des couvents, des églises, des maisons de retraite et d’autres activités diverses qui complètent le travail de l’État lui-même ».

Dénonçant « une nouvelle tentative des autorités de chasser la présence chrétienne de la Terre Sainte » et un « piétinement d’un respect mutuel existant jusqu’à présent », les signataires appellent le gouvernement à « prendre toutes les mesures en son pouvoir pour alerter les municipalités des conséquences de leurs actions et à leur ordonner d’annuler les procédures judiciaires et de recouvrement en cours ».

Le message est clair : dans l’attente d’une solution durable, pourtant promise en 2018, à une situation qui empoisonne régulièrement les relations entre les Églises et les autorités israéliennes, les prélats ne « resteront pas les bras croisés ». Reste à savoir si le gouvernement israélien répondra favorablement à cette « démarche de la dernière chance » ou s’il choisira d’infliger une nouvelle crise à une Terre Sainte déjà accablée par les épreuves.

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