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Un journaliste israélien se déguise en franciscain et se fait cracher dessus

Rédaction
28 juin 2023
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Un journaliste israélien se déguise en franciscain et se fait cracher dessus
Le frère Alberto Paris (à gauche) et le journaliste israélien Yossi Levi, déguisé en franciscain, déambulent dans le quartier juif de la vieille ville de Jérusalem ©Capture d'écran/Channel 13

Pour enquêter sur la multiplication des gestes anti-chrétiens dans le pays le journaliste Yossi Levi s'est immergé dans le quotidien d'un prêtre à Jérusalem. Les conclusions de son reportage sont, pour lui, "très difficiles à digérer".


Il s’est fait cracher dessus seulement 5 minutes après avoir commencé à déambuler dans la vieille ville de Jérusalem. Habillé de la bure franciscaine, le journaliste israélien Yossi Eli était accompagné du frère Alberto Pari, secrétaire de la Custodie de Terre Sainte, et enquêtait sur la recrudescence des actes anti-chrétiens dans la villepour la chaîne israélienne Channel 13.

Pour que les téléspectateurs israéliens prennent la mesure des incivilités quotidiennes dont les prêtres chrétiens peuvent être la cible, la Custodie de Terre Sainte a joué le jeu : elle a prêté un habit au journaliste qui y a dissimulé une petite caméra.

Yossi Levi déguisé en franciscain discute avec le frère Alberto ©Capture d’écran / Channel 13

Durant leur promenade le journaliste et le frère Alberto, parfaitement hébréophone, ont traversé le quartier juif de la vieille ville, où un homme les a raillé en hébreu : « Pardonnez-moi, mon père, car j’ai péché ». Un peu plus loin, c’est un enfant de 8 ans qui leur crache dessus. Au niveau du mont Sion, lieu où les tensions inter-religieuses sont régulières, les deux franciscains croisent un groupe de soldats en service militaire. L’un crache à leurs pieds. L’interaction choque le journaliste, qui enlève son habit et explique sa démarche au groupe de jeunes.

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Ces gestes de haine ne sont ni isolés ni nouveaux. Le phénomène connaît cependant une croissance exponentielle ces derniers mois. Les rapports de police les justifient régulièrement par « l’instabilité mentale » de leurs auteurs. « Ce n’est pas vrai, explique le journaliste Yossi Eli, dans un post Facebook. Notre enquête a prouvé que les attaques ne provenaient pas vraiment de malades mentaux, mais de personnes qui détestent tout ce qui est différent. On leur a lavé le cerveau avec l’idée que Jésus est mauvais. »

Renversement

Le crachat en signe de mépris est un phénomène ancien. « Même dans les récits de la Passion, il y a des gens qui crachent sur Jésus : des juifs, pendant son procès, mais aussi des Romains », soulignait le frère Matteo Munari, professeur au Studium Biblicum Franciscanum à l’occasion d’une conférence polémique qui est revenue sur l’histoire et les enjeux de cet acte, interdit par la loi israélienne, mais jamais puni.

« Imaginez quelle aurait été la réaction de ces juifs si un chrétien leur avait craché dessus en Europe », commente Yossi Levi, avant d’écrire : « L’enquête a été difficile à digérer. »

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Si les Juifs ont craché sur les non-Juifs en Europe, où ils étaient une minorité, ils l’ont fait pour se défendre, pour montrer qu’ils résistaient à l’humiliation de l’antisémitisme, expliquait Iris Shagrir, de l’Université Ouverte d’Israël : « Aujourd’hui, un renversement s’est produit ici en Israël, un renversement qui a lieu tous les jours, parce que les Juifs, qui constituent la majorité de la population, perpétuent désormais cet acte alors qu’ils ne sont plus provoqués. »

Interviewé dans le documentaire de Channel 13, le frère Francesco Patton, Custode de Terre Sainte, note que les attitudes antichrétiennes se sont multipliées « lorsque le langage politique est devenu plus violent » et souligne « la responsabilité des dirigeants, de ceux qui ont le pouvoir ».

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Le mardi 27 juin, le porte parole de la Knesset, Amir Ohana a reçu le patriarche latin de Jérusalem, Mgr Pierbattista Pizzaballa pour discuter des 30 années de relations diplomatiques qui unissent le Vatican à l’Etat d’Israël.

Dans un tweet qui a suivi la rencontre, Amir Ohana a affirmé qu’il condamnait « les récents actes de violence commis par une minorité extrémiste à l’encontre de citoyens chrétiens et de membres du clergé. » Il a également voulu souligner que « Israël a été fondé sur les valeurs de la liberté de religion et j’ai réaffirmé notre engagement à garantir la sécurité et la liberté de tous. »

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