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Bethléem dans la guerre: « C’est comme une prison ici »

Cécile Lemoine
15 novembre 2023
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Bethléem dans la guerre: « C’est comme une prison ici »
À Bethléem, ville de la paix, la crispation de l'occupation militaire depuis le début de la guerre met en péril l'économie locale ©Cécile Lemoine/TSM

Isolée depuis le 7 octobre, Bethléem subit les prémices d’une crise économique et les incursions répétées de l'armée israélienne qui y fait des morts comme dans les autres grandes villes de Cisjordanie occupée.


Les harangues des marchands comblent le vide laissé par l’absence des passants. Nous sommes samedi dans la ville de naissance du Christ. Les ruelles du souk devraient grouiller de vie et de gens venus faire leurs emplettes. Mais depuis le 7 octobre la ville s’est comme repliée sur elle-même. “Je vends deux fois moins de viande que d’habitude, soupire Hamdi, 57 ans, un des bouchers du marché. D’une part parce que les habitants de Jérusalem et des villages alentour ne viennent plus, et d’autre part parce que les gens ont moins d’argent. »

Bethléem vit sous cloche : dès le début de la guerre, les principaux points d’entrée de la ville ont été fermés par l’armée israélienne. Si la mesure est habituelle lors de période de tensions, elle reste ponctuelle. Or cela fait un mois et demi que seule une entrée est ouverte aux voitures, à l’extrémité sud de la ville, sous la surveillance de soldats qui mettent les passants en joue. Deux bus aux horaires irréguliers font la navette depuis Jérusalem. Se déplacer et acheminer les produits d’une ville à une autre relève du parcours du combattant.

 

Majdi, qui tient une boutique de souvenirs dans la rue qui mène à la Basilique de la Nativité a voulu aller faire le plein de keffieh dans la boutique-usine d’Hébron, la seule qui produit encore l’emblématique foulard palestinien. « Normalement on met 20 minutes pour y arriver, explique le commerçant de 54 ans. À cause des routes bloquées et du trafic, j’ai mis plus de trois heures ! »

Chômage et pauvreté

Même problématique pour les fruits et légumes, cultivés dans la région de Jénine, au nord de la Cisjordanie occupée. Au début de la guerre, on a fait acheminer les légumes par l’intermédiaire de quatre voitures différentes. On se passait le relais à chaque grande ville : Jénine, Naplouse, Ramallah puis Bethléem parce qu’il était impossible de faire l’aller-retour en une journée”, raconte Jalal derrière ses piles de concombres et de clémentines. Des difficultés qui se répercutent sur les prix : +20% ou 30% sur les fruits, les légumes, mais aussi le sucre, le riz, l’essence… Certains produits israéliens comme le chocolat ou certaines marques de chips n’entrent plus en Cisjordanie.

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Beaucoup ne sortent plus. Par peur de l’armée, des colons, des bouchons. « C’est comme une prison ici », souffle Jalal, chauffeur de taxi qui limite ses courses à Bethléem, et aux deux communes voisines, Beit Jala et Beit Sahour.

La situation a rarement été aussi difficile, souffle Anton Salman, maire de Bethléem entre 2017 et 2022, qui s’apprête à reprendre du service suite à un accord avec son successeur Hanna Hanania. Au-delà de la hausse des prix, l’économie de Bethléem repose sur trois sources de revenus, toutes coupées : l’arrêt du tourisme a vu les hôtels et les restaurants congédier leurs employés, les permis des 16 000 personnes qui travaillaient en Israël ont été révoqués, et l’Autorité Palestinienne n’a toujours pas payé les salaires de ses employés.

 

Selon un rapport des Nations Unies, 24% des emplois ont été perdus en Cisjordanie, alors que le taux de chômage s’élevait déjà à 13% avant la guerre. “La Cisjordanie est au bord de la crise économique. On est asphyxié”, alerte Fadi Kattan, chef franco-palestinien qui a décidé de continuer à payer les salaires des six employés du tout nouvel hôtel “Kassa”, qu’il a co-fondé avec la chilienne Elizabeth Kassis, dans la vieille ville de Bethléem. “On a une responsabilité”, insiste l’entrepreneur. Selon ce même rapport des Nations Unies, 16 années de développement humain pourraient être annulées si la guerre se poursuivait un autre mois.

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Les premiers touchés sont les classes moyennes. Le petit matelas de sécurité mis de côté après le Covid, en prévision de tensions, s’épuise.“Une dizaine de famille environ nous demandent de l’aide toute les semaines, contre deux avant la guerre, indique une religieuse. On paye des factures d’électricité, on donne des sacs de nourriture… On fait ce qu’on peut car pour l’instant, les virements et les dons ne parviennent pas sur notre compte palestinien.”

Crispation de l’occupation militaire

Parmi les bénéficiaires, des habitants du camp d’Aïda. Peuplé de réfugiés de 1948 et sous la responsabilité de l’UNRWA, la résistance armée y a été écrasée en 2002, contrairement aux camps de Jénine, Tulkarem ou Naplouse. L’armée israélienne y procède à des opérations et des arrestations quotidiennes. Depuis le 7 octobre, 2 540 personnes ont été arrêtées en Cisjordanie, et 195 Palestiniens ont été tués dont 7 à Bethléem.

 

En ce samedi 11 novembre, le camp d’Aïda est en deuil. La veille, vers 5 heures du matin, un jeune de 17 ans, Mohammad Ali est mort. « Un sniper, placé dans la tour d’observation lui a tiré une balle en pleine poitrine. Il était sur le toit, il ne faisait rien, il allait passer son bac », gémit Hayat, sa mère, le visage inondé de larmes alors qu’elle donne le sein au dernier de ses cinq enfants. Le visage de Mohammad a été peint sur l’un des angles de sa maison, comme il est de coutume pour les habitants du camp tués par l’armée. 

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“La semaine précédente, un garçon de 12 ans s’est pris une balle dans les parties génitales alors qu’il revenait de l’école. Jamais la violence n’a été aussi gratuite, rage Abdelfattah Abusrour, directeur d’une des institutions du camp, le centre culturel Al-Rowwad. Les Israéliens veulent qu’on soit toujours sous pression. Ils tirent pour tuer. Ce qu’ils n’ont pas fait en 1948, ils sont en train de le faire maintenant.

Des chrétiens dans la guerre

Dimanche. Bethléem résonne de chants et de prières en arabe. Les églises n’ont jamais été aussi pleines, constatent les curés des paroisses. « Il y a un besoin de spiritualité en ces temps difficiles et l’église est aussi un lieu pour se retrouver, quand beaucoup de gens ont perdu leur travail », souligne frère Sandro Tomašević, qui chapeaute le « Boys Home » des franciscains à Bethléem et donne parfois la messe à l’église Sainte-Catherine dans un arabe parfait.

Que dit-il à ses paroissiens ? « Que les chrétiens doivent être une lumière, qu’ils ne doivent pas se laisser contrôler par les récits qui sont faits de part et d’autre du mur. Qu’aujourd’hui plus que jamais, les chrétiens doivent être des missionnaires et partager le message d’amour de Jésus. »

Noël aura une saveur particulière cette année. Par respect pour les souffrances générées par la guerre, les chefs des Eglises de Jérusalem ont annoncé l’annulation de toutes les festivités relatives à l’Avent, pour mieux se concentrer sur « le sens spirituel de Noël ». Les célébrations religieuses auront bien lieu, mais les activités emblématiques comme l’allumage des sapins, les marchés de Noël et les parades scoutes n’auront pas lieu. A Bethléem, la municipalité a décroché les décorations lumineuses, laissées en place depuis Noël dernier.

 


Chers fidèles, amis et bienfaiteurs,

Dans la situation de conflit que connaît la Terre Sainte, il est urgent que nous, Franciscains, restions proches des communautés chrétiennes vivant sur cette terre.

Le manque de pèlerinsl’activité économique en bernela difficulté de se rendre au travail, rendent difficile la vie quotidienne et la possibilité d’avoir une vie digne.

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 Fr. Francesco Patton, ofm, Custode de Terre Sainte

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