Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

L’unité se fera dans le respect réciproque

Frédéric Manns ofm, Studium Biblicum Franciscanum
20 juillet 2010
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Église d’Orient, Église d’Occident. Le père Manns ne veut pas d’opposition. Il appelle au rapprochement de conceptions différentes qui se complètent dans la célébration d’un unique Mystère.


Plusieurs livres ont attiré l’attention sur les chrétiens d’Orient. Le premier fut celui de Jean-Pierre Valogne, Vie et mort des chrétiens d’Orient. Des origines à nos jours, Paris 1994. Le second fut celui de Catherine Dupeyron, Chrétiens en Terre Sainte : Disparition ou mutation ? Paris 2007. Parmi les autres je ne retiendrai que le livre de René Guitton, Ces chrétiens qu’on assassine, Flammarion 2009 et celui de Annie Laurent, Les chrétiens de l’Orient vont-ils disparaître ? Paris 2008.

Depuis la création de l’État d’Israël les chrétiens sont devenus une petite minorité divisée et avec l’arrivée des russes il n’est pas exclu que de nouveaux éléments entrent en jeu. A en rester au niveau des statistiques, le découragement risque de nous surprendre, mais tout le monde sait que rien n’est plus menteur qu’une statistique. Si l’Eglise est l’œuvre de l’Esprit de Dieu, elle n’a rien à craindre, tout en sachant qu’elle ne sera qu’un petit troupeau.

J’ai souvent entendu proclamer par des pèlerins de passage que l’Eglise latine n’avait rien à voir en Orient et qu’elle ferait mieux de laisser la place aux Eglises orientales qui célèbrent le Seigneur dans leur liturgie très digne et très belle. J’ai toujours rappelé à ces pèlerins que les centurions romains qui se sont convertis étaient probablement d’origine romaine et que des romains ont été intégrés très tôt dans l’Eglise orientale.

Je préfère souligner cependant que l’Eglise a deux poumons : l’Orient et l’Occident. Tandis que la théologie mystique occidentale met l’accent sur la nuit obscure de l’âme, la théologie orientale souligne l’illumination. Ténèbres et lumière font partie de l’expérience religieuse. En Occident François d’Assise reçoit les stigmates du Christ crucifié, tandis qu’en Orient Silvain, comme Moïse, est marqué par la lumière du Christ qui resplendit sur son visage. Les chrétiens occidentaux parlent de la basilique du Saint Sépulcre, tandis que les orientaux l’appellent l’Anastasis, la résurrection.

Le théologien orthodoxe Evdokimov définissait le problème des Eglises séparées de cette façon : « Nous ne nous opposons pas les uns aux autres, nous sommes les uns à côté des autres face au mystère de Dieu qu’il est impossible de renfermer dans une seule formule de foi. Rome célèbre Pierre et Paul par lesquels la foi lui fut transmise. En Asie, Ephèse et Patmos célèbrent le théologien Jean. L’Inde loue saint Thomas, l’Egypte saint Marc et la Russie rend hommage au prince Vladimir  ».

L’Occident contemple le mystère de l’Incarnation de Dieu comme rédemption, alors que l’Orient voit dans ce mystère la divinisation de la nature et de l’homme.

Les Pères de l’Eglise occidentale ont orchestré la figure du rédempteur qui libère l’homme du péché. De là découlent la liturgie sacrificielle, le culte du crucifix. Les Pères grecs et orientaux soulignent l’aspect mystérieux, voire secret de la liturgie et décorent les coupoles de leur Eglise avec la figure du Pantocrator. La croix n’est pas absente, mais elle signifie que le sang du Christ atteint le crâne d’Adam. De plus, le Christ en croix est revêtu de sa tunique de grand prêtre. Toute l’humanité est sauvée. La Résurrection du Christ signifie la résurrection de l’homme, puisque le Christ descend aux enfers et empoigne Adam et Eve qui sont invités à sortir de leurs tombeaux. L’Esprit Saint est le maître de la vie intérieure qui transfigure l’homme et l’illumine. Le culte des icônes dans les Eglises orientales rappelle à tous les chrétiens que le Christ continue à diffuser sa lumière sur le visage des saints.

Les Eglises orientales et occidentales se complètent de façon merveilleuse. Si elles se respectent mutuellement, l’Esprit Saint leur fera le don de l’unité : « Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix ». Elles pourront alors être le levain dans la pâte de l’Occident et de l’Orient.

Dernière mise à jour: 20/11/2023 18:10

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