Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

Basile Talatinian, franciscain arménien

Marie-Armelle Beaulieu
21 septembre 2010
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Les Franciscains de Terre Sainte comptent dans leurs rangs
des frères de divers rites orientaux. Actuellement sept frères sont arméniens. Parmi eux, le frère Basilio Talatinian est, à 97 ans, le doyen de la Custodie.


À 97 ans, le frère Basilio vient de mettre un point final à son dernier ouvrage sur le sujet de l’évolution de l’espèce humaine. Il l’a écrit de la chambre de l’infirmerie de son couvent à Jérusalem où il réside depuis quelques années déjà. Quelques rares scientifiques qui ont eu l’occasion de le parcourir sont stupéfaits : ils s’attendaient à trouver des théories dépassées or c’est étonnamment juste et assez bien actualisé !

Né en février 1913, en Cilicie, dans son autobiographie il précise entre parenthèses « Turquie », le petit Kerop fut baptisé dans le rite arménien catholique. Le récit de son enfance ressemble à celui de tant de rescapés du génocide. C’est dans un orphelinat américain, où lui et ses frères trouvèrent refuge, qu’il apprit ses premiers rudiments d’arménien, lui qui ne parlait que le turc. Arrivé en Palestine et entré dans l’orphelinat des Salésiens à Bethléem, il choisit d’apprendre le métier de cordonnier, qualification qu’il conclut à l’examen par une médaille de bronze. Désireux de devenir franciscain, il y apprendra « le latin, l’italien, l’arabe, un peu de français, l’histoire et la géographie, les mathématiques et le catéchisme. » Il prononça ses premiers vœux en 1931 et c’est cette année-là que sa vive conscience d’être arménien le poussa à renouer avec cette culture. Dans sa courte biographie, il dit qu’au séminaire il faisait en sorte de passer pour intelligent mais ne s’estimait pas l’être. Il ne dupa personne et ses supérieurs furent à ce point sûrs de ses capacités qu’ils l’envoyèrent à l’université pontificale Antonienne de Rome.

Il se spécialisera en Droit canonique dont il deviendra Docteur en 1942 en soutenant une thèse sur « Le contrat matrimonial selon les Arméniens ». En 1945, et malgré la guerre, il réussit à retourner en Terre Sainte dans un bateau d’émigrés juifs fuyant par l’Italie.

Sa première affectation pour la Custodie fut curé de paroisse en Syrie, au service de la communauté arménienne catholique locale. Mais bien vite on le rappela en Palestine pour enseigner au Séminaire. C’est durant ces années qu’il devint le vice-postulateur pour la béatification de Salvatore Lilli, un franciscain italien mort en martyr avec sept compagnons arméniens en Turquie en 1915. En fait, malgré les charges importantes que ses supérieurs et ses frères lui confieront durant tant d’années de vie religieuse, (il vient de fêter 80 ans de prise d’habit !) il n’aura de cesse de s’intéresser aux Arméniens et d’écrire sur ce sujet. Son dernier article publié en 1999 rassemble ses deux passions et s’intitule « L’apostolat des Franciscains auprès des Arméniens. » Du reste durant trois ans et demi, il devint lui-même curé de la paroisse arménienne de Jérusalem pour remplacer le curé malade, puis il fut vicaire de la paroisse « en remplacement de l’évêque quand il s’absentait. »

Dans son humilité, le père Talatinian mentionne comme tout à fait accessoire le fait d’avoir été nommé expert au Concile Vatican II pour les travaux touchant aux Eglises Orientales. Si l’en est un qui ne va perdre une miette de ce que le prochain synode va produire comme documents et comme fruits, c’est bien lui. Souhaitons que ses frères franciscains arméniens les plus jeunes sachent suivre les traces d’un si illustre et si modeste exemple.

Dernière mise à jour: 21/11/2023 10:03

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