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En Syrie, une église détruite par des bombes turques

Christophe Lafontaine
7 juin 2022
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En Syrie, une église détruite par des bombes turques
L'église assyrienne Mar Sawa al-Hakim à Tal Tamer, au nord-est de la Syrie, endommagée après les bombardements turcs ©ANHA Hawar news

Une église de la communauté assyrienne a été en partie détruite le 30 mai, par un bombardement turc au nord-est de la Syrie. Selon l'évêque syriaque orthodoxe Maurice Amseeh, la Turquie tente d'expulser les chrétiens.


Ce n’est pas la première fois qu’elle est une victime de la guerre. L’église Mar Sawa al-Hakim de Tal Tawil, un village de Tal Tamer, agglomération chrétienne formée d’une quinzaine de localités dans le gouvernorat de Hassaké, au nord-est de la Syrie, a une nouvelle fois été gravement endommagée. La zone dans laquelle elle se trouve, à majorité kurde, est proche de la frontière avec la Turquie.

L’église avait déjà été prise pour cible en 2015 par des miliciens de l’Etat islamique. Le 30 mai dernier, l’église – appartenant à l’Eglise apostolique assyrienne de l’Orient, une Eglise autocéphale de tradition syriaque orientale -, a été partiellement détruite mais cette fois-ci par des bombardements des forces turques et des factions syriennes proches d’Ankara, de l’Armée nationale syrienne (Sna). 

AsiaNews, l’agence de presse officielle de l’Institut pontifical pour les missions étrangères (PIME) s’est fait l’écho des témoignages locaux qui ont signalé d’importants dégâts matériels aussi sur les routes, les arbres, les maisons et le réseau électrique. 

Occupation et violence de l’Etat Islamique

L’église avait été rénovée après avoir été endommagée par l’occupation de l’Etat Islamique, selon les militants d’« Assyro-chaldéens, l’histoire continue », dont la page Facebook suit toute l’actualité concernant les Assyro-chaldéens de France et du monde.

La ville de Tell Tamer a été construite à l’origine par des réfugiés Assyriens irakiens dans les années 1930, après le massacre de Simelé en Irak, commis en août 1933 par le gouvernement irakien qui a touché les populations assyrienne et chaldéenne en Irak.

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La ville est maintenant principalement peuplée de Kurdes et d’Arabes. Jusqu’à la guerre civile en Syrie, les Assyriens restaient toutefois une minorité substantielle. Mais de plus en plus de chrétiens assyriens, Syriaques et Chaldéens ont quitté le nord-est de la Syrie, la région qui borde à la fois la Turquie et l’Irak, à cause de la violence de l’Etat islamique d’abord, en 2015, et maintenant de celle de l’armée turque.

Pour mémoire, le 23 février 2015, l’Etat islamique a enlevé environ 220 Assyriens des villages entourant Tell Tamer, et le 26 février, ce nombre était passé à 350. Seuls 24 otages assyriens ont été libérés courant mars 2015.

Des « ambitions expansionnistes » 

Ces dernières années, la Turquie a envahi et occupé des parties du nord de la Syrie en menant des opérations transfrontalières contre les Kurdes autonomistes, considérés comme terroristes aux yeux d’Ankara. Il y a 15 jours, Recep Tayyip Erdogan, le président turc, a menacé d’une nouvelle offensive en Syrie, qui, selon lui, permettrait de viser les combattants kurdes en instaurant une zone de sécurité de 30 km de profondeur le long de la frontière Sud de la Turquie.

Mais pour Mar Maurice Amseeh, l’archevêque syriaque orthodoxe dans la région d’al-Jazira et de l’Euphrate (nord-est de la Syrie), cité par AsiaNews, et qui définit ces opérations turques comme le résultat d’ « ambitions expansionnistes » au-delà de la frontière, le « but » d’Ankara est de « vider la région des chrétiens ». Il a par ailleurs lancé un appel, exhortant les parties du conflit à épargner les églises et tous les lieux de culte, a relayé AsiaNews.

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Mar Maurice Amseeh, soulignant le besoin de neutralité des Eglises face à tous les conflits militaires, a pour autant indiqué à Syriac press qu’il parlera de la situation douloureuse du peuple syriaque (araméen-chaldéen-assyrien) aux autorités concernées lors de sa tournée en Europe qui se déroule actuellement.

La zone autour de Tel Tamr, qui se compose de 32 villages et qui est mieux connue sous le nom de bassin de la rivière Khabur, était habitée avant la guerre par plus de 12 000 personnes, rapporte AsiaNews. Selon les estimations, leur nombre est déjà tombé à moins d’un millier. « Ces dernières semaines, la zone a fait l’objet de bombardements intensifs et quotidiens de la part des Turcs, qui ont semé encore plus de panique parmi les habitants », rapporte l’agence de presse.

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