Depuis plusieurs années, Terre Sainte Magazine suit les recherches archéologiques menées sur le site d’Hippos-Sussita, cette cité de la Décapole perchée au-dessus du lac de Tibériade, encore méconnue des pèlerins. Les dernières campagnes de fouilles confirment que ce site, ouvert au public en 2023 et progressivement aménagé pour les visiteurs, est l’un des plus passionnants de Galilée.
L’Autorité de la nature et des parcs a publié la nouvelle, ce jour, de la découverte à Hippos Sussita, d’un trésor de bijoux et de monnaies. La 25e année de fouilles de cette antique ville de la Décapole se conclut en beauté après une campagne estivale décidément riche.
Plus tôt dans l’été en effet, Michael Eisenberg de l’Institut Zinman d’archéologie (Université de Haïfa), qui fouille le site depuis le tout début en 2000, annonçait la découverte d’une bague en or – de petite taille elle était probablement portée par une fillette – et d’une paire de boucles d’oreilles à la facture raffinée. Ces objets datent des premiers siècles de notre ère, à l’époque où Hippos connaissait une prospérité exceptionnelle sous l’Empire romain.
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La bague a été mise au jour dans un quartier résidentiel, au cœur de la ville, tandis que les boucles d’oreilles ont été trouvées près de la nécropole. Elles pourraient avoir été déposées comme offrandes funéraires. Pour Michael Eisenberg, codirecteur des fouilles avec Arleta Kowalewska (Université de Haïfa), ces objets soulignent l’opulence d’Hippos, perceptible également dans son architecture monumentale : blocs massifs de basalte, colonnes de marbre importées, fragments de stucs peints aux couleurs vives, mausolées de plusieurs étages sculptés avec raffinement.
Au-delà de leur beauté, ces bijoux rappellent que les habitants de la Décapole vivaient dans un environnement marqué par le luxe, au moment même où les Évangiles évoquent le passage de Jésus « en Galilée et dans la Décapole » (Mt 4, 23-25). Eisenberg aime à rappeler que les dalles de basalte qui pavent encore le Decumanus ou le Cardo furent très probablement foulées par Jésus lui-même.
Une maison pour personnes âgées au Ve siècle ?
Quelques semaines après cette annonce, une autre découverte faisait sensation : une mosaïque portant l’inscription grecque « La paix soit avec les anciens ». Les archéologues y voient l’entrée d’une institution dédiée aux personnes âgées, construite à la fin du IVe ou au début du Ve siècle.

Si cette hypothèse se confirme, il s’agirait de la plus ancienne maison de retraite connue au Proche-Orient. Située au cœur d’un quartier résidentiel byzantin, à proximité des églises et des places publiques, elle témoigne de l’attention portée aux personnes âgées par les communautés chrétiennes. Eisenberg et son équipe rappellent que ce type d’institution reflète une évolution des modes de vie chrétiens, marqués notamment par le monachisme, qui confiait désormais à la communauté certaines responsabilités autrefois assumées par les familles.
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Un trésor d’or face à l’invasion sassanide
La fin de l’été 2025 a vu surgir une nouvelle surprise : un trésor de 97 pièces d’or, accompagnées de boucles d’oreilles serties de perles et de pierres semi-précieuses, découvertes lors des fouilles près d’un mur effondré.

Ces monnaies couvrent une période allant de l’empereur Justin Ier (518-527) aux premières années d’Héraclius (610-613). Parmi elles, une pièce rarissime (trémissis ou triens ou tiers de sou à cause de sa valeur) frappée à Chypre vers 610, dont seules deux ont été trouvées en Israël. Certaines pièces étaient encore enveloppées dans des fragments de tissu, vestige du sac dans lequel elles avaient été cachées.
Les chercheurs estiment que ce trésor a été dissimulé par des habitants effrayés par l’invasion sassanide au début du VIIe siècle, lorsque la ville chrétienne d’Hippos fut partiellement détruite, notamment par l’incendie de l’église du Martyr Théodore. Ces découvertes éclairent la richesse de la cité byzantine, mais aussi la fragilité de son destin, prise entre luttes impériales et révoltes locales.
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Un site à redécouvrir
Ces trouvailles – bijoux, mosaïque, trésor – viennent s’ajouter à une série impressionnante de découvertes qui font d’Hippos-Sussita un site archéologique majeur. Elles révèlent non seulement la prospérité et la diversité culturelle de la ville – successivement grecque, romaine, byzantine puis abandonnée après le séisme de 749 – mais aussi son importance spirituelle, comme centre chrétien et siège épiscopal doté d’au moins sept églises.
Aujourd’hui, grâce au patient travail des archéologues et à l’ouverture du site, Hippos sort de l’oubli. Peu fréquentée encore par les pèlerins, elle offre une vue panoramique unique sur le ministère de Jésus en Galilée et sur la complexité religieuse et culturelle de la région il y a 1 400 ans.
En rendant compte régulièrement de ces découvertes, Terre Sainte Magazine souhaite inviter ses lecteurs et les pèlerins à porter un regard nouveau sur ce site, où l’histoire biblique se croise avec les traces tangibles des civilisations antiques. Hippos-Sussita, la « montagne du cheval », est désormais une montagne de surprises, selon les mots du Dr. Dror Ben-Yosef, archéologue et commissaire au patrimoine dans la province Nord de l’Autorité de la nature et des parcs.
