Une découverte archéologique extraordinaire, serait-ce encore possible en Israël ? Les deux installations de canaux déterrées lors des fouilles menées au parking Givati, situé près de la cité de David, sur le flanc sud du Mont du Temple, semblent bien sortir de l'ordinaire. Les archéologues s'interrogent encore sur la raison de leur présence à cet endroit.
(IAA-O.J) – « Il n’existe rien de semblable à ce site. Cette découverte est la première de ce type jamais identifiée en Israël », ont conjointement annoncé l’Autorité des antiquités d’Israël (IAA) et l’Université de Tel-Aviv dans un communiqué à la presse le 30 août 2023.
Débutées en 2007, les fouilles du parking Givati, conduites par Doron Ben-Ami et Yana Tchekhanovets de l’IAA, et commandées par la City of David Foundation avaient déjà permis de découvrir plusieurs édifices antiques, tels le palais de la reine Hélène, un des premiers monuments exhumés en 2007, ou encore un trésor de 264 pièces d’or datant de l’ère byzantine.
Plus récemment, les archéologues ont mis au jour une nouvelle trouvaille « mystérieuse » : deux installations de canaux de grande dimension taillés dans la roche, dont l’utilisation remonterait au IXe siècle avant J-C, soit à 2 800 ans, à l’époque du premier temple.
Les recherches ont jusqu’à maintenant permis de distinguer deux zones de canaux, séparées d’une dizaine de mètres, composant une grande ère d’installation située aux frontières de la cité de David. La première zone a été localisée au nord-est du parking Givati, et la seconde au sud de celui-ci.
Des canaux utilisés entre 30 et 50 ans
Selon Yiftach Shalev, directeur des fouilles auprès de l’Autorité des antiquités d’Israël, cette deuxième zone regrouperait au moins cinq canaux, qui auraient servi au transport de contenus liquides : « En élargissant les fouilles, nous avons trouvé une deuxième installation de canaux similaire à la première, qui nous donne plus d’information sur le lieu, la date et la fonction de ces constructions. Nous savons maintenant de source sûre, grâce aux poteries retrouvées sur les lieux, que ces canaux ont cessé d’être utilisés vers la fin du IXe siècle ».
Les premières explorations indiquent en effet que leur achèvement remonterait à quelques décennies avant les règnes du roi Joas et de son fils Amasias, soit autour de 850 avant J-C. Leur utilisation aurait donc duré de trente à cinquante ans.
Comme l’explique le professeur Yuval Gardot, du Département archéologique de l’Université de Tel Aviv, à cette époque Jérusalem correspondait à un territoire qui englobait la cité de David et le Mont du Temple, deux lieux qui représentaient le cœur de la ville. Ainsi, il est fort probable que ces installations, frontalières à ces deux centres proéminents, aient eu un rôle à jouer dans l’économie de la ville et du palais ou dans les activités de cultes rendues au temple.
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La question que se posent désormais les archéologues est de savoir quelle était l’utilité de cette zone, qu’est-ce-qu’on y faisait précisément. Pour faire avancer les recherches, les archéologues ont eu recours à la police médico-légale afin d’analyser le sol, détecter des possibles traces de sang, de résidus organiques qui aideraient à comprendre les activités qui avaient lieu dans cet espace. « Rappelons que les activités rituelles comportaient souvent l’offrande d’animaux agraires ou de plantes produites près du Temple », rappelle le Dr. Gardot.
Une possible production de lin
Et le Dr. Shalev d’ajouter : « De plus, comme les canaux ne conduisent pas à un large bassin d’eau et que la direction de leurs cours semble varier, il se pourrait qu’ils aient été utilisés pour rincer ou laver des produits, et non pour drainer de l’eau ». De ce fait, les conjectures se tournent vers une possible production de lin, utilisé à l’époque pour faire des draps, et qui nécessitait d’être trempé longtemps dans l’eau pour adoucir sa matière, ou bien de dates, qui étaient rincées puis laissées séchées au soleil pour faire du silan (miel de dates).
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Il existe d’ailleurs des constructions analogues découvertes à Oman, Bahrain ou encore en Iran, qui abritaient le même type d’activités. « Nous allons continuer les recherches et les prélèvements pour parvenir à identifier les composants présents dans le sol qui pourraient nous aider à trouver la clef de ce mystère ».
Ainsi Jérusalem, ville de plus de 3 000 ans d’histoire, berceau de l’humanité, n’en finit pas de fasciner par les innombrables mystères qu’elle recèle, et dont beaucoup restent encore inexplorés.