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Rapport sur les églises endommagées en Syrie : quel crédit ?

Christophe Lafontaine
12 septembre 2019
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Ruines de l’église syro-orthodoxe Notre-Dame à Deir ez-Zor (26 novembre 2018), 10 lieux de cultes chrétiens, selon le SNHR, ont été endommagés dans cette ville syrienne © Hamed Jafarnejad

Une ONG a rapporté le 5 septembre que plus de 120 lieux de culte chrétiens ont été endommagés par la guerre en Syrie fustigeant surtout le régime syrien. A prendre avec du recul selon l’évêque catholique chaldéen d’Alep.


De mars 2011 à septembre 2019, 124 lieux de culte chrétiens ont été endommagés par toutes les forces qui ont combattu sur le territoire syrien. La province d’Alep, dans le nord du pays, a été la plus durement touchée avec 34 attaques, dont 24 par des rebelles et six par le gouvernement syrien. C’est ce qu’indique un rapport du Réseau syrien pour les droits de l’Homme (SNHR) paru le 5 septembre dernier. Cette ONG syrienne, fondée en 2011 et établie au Qatar, est associée à l’opposition au régime de Damas. Une précision qui a son importance.

Intitulé « Frapper des lieux de culte chrétiens en Syrie constitue une menace pour le patrimoine mondial », le rapport précise que certaines des attaques à l’encontre des lieux de culte chrétiens, étaient délibérées. Comme ce fut le cas en 2015 quand le groupe Etat islamique a utilisé des bulldozers pour détruire le monastère (et son cimetière) syro-catholique de Saint-Elian (monastère de saint Julien l’Ancien), fondé au Vè siècle à al-Qaryatayn dans la province de Homs. Le rapport note cependant que la majorité des dommages ont été causés par des combats et des bombardements.

Dans le rapport d’une vingtaine de pages, les auteurs ont particulièrement voulu insister sur un point : 61% des attaques contre des lieux de culte chrétiens (églises et monastères) sont attribuées aux forces du régime syrien. Y voyant « une forme d’intimidation contre la minorité chrétienne en Syrie et un moyen de la déplacer. » A noter, selon la même source, que le plus grand nombre d’attaques perpétrées par les forces gouvernementales a eu lieu dans la province de Homs (27 sur 29).

En comparaison, les auteurs du rapport, soutiennent que les forces de l’opposition armée sont responsables de 27% des attaques contre des lieux de culte chrétiens dans le pays. Et 10% des attaques de ce type sont imputées aux militants de l’Etat islamique et au groupe de coordination des milices liées à Al-Qaïda, Hayat Tahrir Al Sham. Le reste à d’autres groupes de combattants.

Autre information : 11 églises ont été transformées en sièges militaires ou administratifs par les principaux acteurs du conflit. Parmi ces agissements, au moins six doivent être attribués au gouvernement syrien ou aux milices qui le soutiennent, énonce le rapport du SNHR qui reproche aussi aux alliés du gouvernement syrien, la Russie et l’Iran, d’autres attaques sans toutefois préciser leur nombre.

En définitive, ce qu’il faut retenir, c’est que le rapport accuse le régime de Bachar al-Assad, sans manquer de relever que le chef de l’Etat se targue pourtant d’être le défenseur des chrétiens en Syrie. « Le régime syrien a toujours publié de bons slogans, mais sur le terrain, il a agi dans le sens opposé », signe Fadel Abdel Ghany, président du SNHR et responsable du rapport.

Des informations à prendre avec précaution

Pour l’évêque catholique chaldéen d’Alep, les conclusions du rapport sont à prendre avec des pincettes. « Dans le pays, les fidèles, ainsi que les évêques et les prêtres, sont convaincus que la question est plus compliquée », avance-t-il. Se confiant à l’agence de presse Asianews, Mgr Antoine Audo considère en effet qu’un tel rapport soulève véritablement une question « complexe et délicate », qui nécessite une « extrême attention » et surtout une évaluation minutieuse des sources, des groupes et des factions qui diffusent ou évoquent certains types d’informations, pouvant alimenter de ce fait une guerre de propagande entre le gouvernement syrien et les groupes rebelles. « Lorsque les groupes armés perdent du terrain sur le plan militaire, ce genre de propagande est réactivé », souligne l’ancien président de Caritas Syrie. Il faut être « très attentifs à cet aspect », note-t-il. « Certaines personnes utilisent ces informations (ndlr, comme celles émanant du rapport du SNHR) pour affirmer que le gouvernement exploite la communauté chrétienne comme moyen de défense », a encore souligné le prélat. Certes, dit-il, le gouvernement peut parfois « utiliser la religion à des fins politiques, mais le tableau est plus complexe ». Et, rajoute l’agence de presse catholique, « il est indéniable que la propagande contre Assad exploite également ʺl’aspect confessionnel pour attaquerʺ », reprenant l’expression de Mgr Antoine Audo.

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