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Un anneau mycénien en or de retour à Rhodes

Christophe Lafontaine
31 mai 2022
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Un anneau mycénien en or de retour à Rhodes
Le ministère grec de la culture a annoncé la restitution d’une bague en or mycénienne par la Fondation Nobel © Ministère grec de la culture

Ornée de deux sphinx ailés, une bague de plus de 3000 ans, trouvée en 1927 dans la nécropole mycénienne d'Ialyssos à Rhodes et volée pendant la Seconde Guerre Mondiale, va être restituée au musée archéologique de l’île.


Bien avant que Saint Paul la visite et y prêche (Ac : 21,01), et que l’ordre franciscain y soit lié depuis le passage de Saint François d’Assise, l’île de Rhodes fut envahie vers 1 400 av. J.-C. par le peuple des Achéens. Venus du Nord, ils y établirent la civilisation mycénienne (1600-1000 av. J.-C.), ancêtre de la Grèce antique.

Témoin de cette époque, un anneau en or avait été découvert en 1927 par l’Ecole italienne d’archéologie dans une tombe mycénienne près d’Ialyssos ancienne cité grecque de l’île de Rhodes, à une époque où cette île du sud-est de la mer Égée était sous contrôle de l’Italie jusqu’à ce qu’elle soit intégrée à la Grèce après la Seconde Guerre mondiale. 

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C’est au cours de ce conflit que la bague a ensuite été dérobée dans le musée archéologique de l’île de Rhodes avec des centaines d’autres antiquités, principalement des bijoux et des pièces de monnaie qui n’ont toujours pas été récupérés. 

Un tour du monde en 80 ans

Par le biais du trafic illicite d’objets culturels, l’anneau a ensuite refait surface aux Etats-Unis et a été acheté dans les années 1950 ou les années 1960 par Georg von Bekesy, biophysicien et lauréat du prix Nobel. Collectionneur d’art, il avait légué sa collection à la Fondation Nobel après sa mort en 1972. La bague est ensuite restée des années au Musée des antiquités méditerranéennes et du Proche-Orient de Stockholm en Suède.

C’est là qu’elle fut identifiée en 1975 par Carl Gustaf Styrenius, alors directeur du musée, archéologue et expert de l’ère mycénienne. Les autorités grecques furent alors contactées mais l’artéfact est resté à Stockholm pour des raisons qui ne ressortent pas clairement des archives existantes, a expliqué un communiqué du ministère grec de la culture.

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La Fondation Nobel, qui siège en Suède, a finalement officiellement restitué à la Grèce la bague, le 19 mai, a annoncé le ministère grec de la Culture au lendemain de la cérémonie qui a eu lieu dans la capitale suédoise. « Huit décennies après son retrait illégal, elle sera à nouveau exposée au Musée archéologique de Rhodes », a indiqué le ministère.

Une bague-cachet pour le commerce ou pour la tombe

La gravure de pierres précieuses était une spécialité de Mycènes. L’intaille en or rendu à la Grèce est clairement une bague-cachet, dont le chaton possède une forme ovale ciselé d’une paire de sphinx ailés se faisant face.

« La pratique du scellement avait pour vocation première de sécuriser, contrôler la qualité et retracer l’origine d’une marchandise. Cependant, dès la fin du Bronze Moyen [ndlr : 1600-1350 av. J.-C., soit en pleine période mycénienne], à cette fonction pratique va s’ajouter une fonction non utilitaire : des sceaux en pierres semi-précieuses et en or, spécialement dans les tombes, portent des compositions complexes et minutieusement exécutées qui définissent ces objets comme des parures raffinées et les marqueurs d’une élite sociale », explique le doctorant en archéologie Quentin Zarka de Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, qui a travaillé dans le passé sur les sceaux dans l’environnement de la mer Egée.

Au XIVe et XIIIe siècle av. J.-C., Rhodes fut l’un des principaux centres prospères de la civilisation mycénienne. Les fouilles entreprises autrefois dans la nécropole de Lalyssos atteste, par de nombreuses céramiques mycéniennes, d’échanges entre l’Egypte et les pays de la mer Egée, l’île de Rhodes se trouvant sur les routes commerciales avec les côtes d’Asie Mineure et l’Orient. 

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