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Un chantier école ouvert dans la basilique de Gethsémani

Cyrille David
9 novembre 2012
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L’atmosphère feutrée, la relative pénombre de la basilique de Gethsémani sont un peu mises à l’épreuve depuis quelques mois. En hauteur, dans des échafaudages et sous le feu des projecteurs, on s’active pour redonner à l’église son lustre d’antan.


La basilique de Gethsémani devrait retrouver ses couleurs originelles. Construite et décorée en 1924, ses mosaïques, intérieures et extérieures, se sont abîmées au fil du temps. D’autant que le tremblement de terre de 1927 avait accéléré leur dégradation. Jusqu’à présent, aucune véritable restauration de la basilique n’avait été entreprise.

C’est chose faite et la restauration est engagée conjointement par l’ONG de la Custodie (l’Association Pro Terra Sancta dite ATS[1]) et le Mosaic Center de Jéricho. Le Studium Biblicum franciscain, institut de recherche et d’enseignement des sciences bibliques et de l’archéologie, assure, quant à lui, la supervision scientifique.

Il faut intervenir sur la toiture de l’église pour refaire son étanchéité. Il faut aussi restaurer les mosaïques intérieures et extérieures. Selon Ousama Hamdan, directeur du Mosaic Center, le chantier devrait durer 18 mois.

Ces objectifs techniques ne suffisent pas à Carla Benelli de l’ATS. Encore doivent-ils être réalisés dans l’esprit des chantiers qu’a menés le père Michele Piccirillo, aujourd’hui décédé mais initiateur du projet. Elle veut donc impliquer, comme le faisait père Michele, la communauté locale. Pour cela un chantier école a été mis en place. Des jeunes Palestiniens sont formés à la conservation du patrimoine. Notamment à la restauration des mosaïques.

Le chantier-école

Raed et Rasmi sont experts mosaïstes formés au Mosaic Center de Jéricho fondé par le père Michele. Tous les matins, arrivant de Sébaste, dans le nord de la Cisjordanie, ils viennent sur place pour enseigner l’art de la restauration à cinq jeunes de Jérusalem. Ces apprentis – Anas, Salam, Muntasser, Raed et Dana – sont tous assez jeunes. Certains viennent juste de terminer leurs études secondaires, d’autres sont déjà inscrits à l’université. Mais tous montrent beaucoup d’enthousiasme alors que débute leur formation dans le cadre du chantier école.

À l’intérieur de l’église, sous les voûtes, ils se sont mis au travail. À l’eau et aux pinceaux, ils nettoient les mosaïques, espérant raviver leur ancienne splendeur.

« J’ai participé au premier projet de ce type […], explique Raed. Un projet de trois ans, qui prévoyait la restauration du palais omeyyade de Hisham à Jéricho et la formation de jeunes mosaïstes. Après cette expérience, j’ai travaillé à la restauration de la basilique de la Nativité de Bethléem, de diverses synagogues, du Saint-Sépulcre et d’autres lieux encore. Je peux à présent transmettre les enseignements reçus et l’expérience accumulée durant ces années, à ces jeunes qui deviendront les spécialistes de demain et qui pourront à leur tour enseigner à d’autres ».

Transmettre un patrimoine

Transmettre les techniques de restauration du patrimoine. Transmettre l’intérêt de sa conservation aux générations suivantes. Voilà les deux buts du chantier école pour ATS et le Mosaic Center. On entend sensiblement le même son de cloche chez les formateurs : « Les objectifs de ces formations  sont doubles : conserver au mieux notre patrimoine culturel et créer des opportunités de travail pour des jeunes, leur transmettant la passion pour l’art de la mosaïque. Au Mosaic Center, il y a en ce moment onze personnes expertes en restauration, et avec elles, nous pouvons poursuivre de nombreux projets ».

À la fin des travaux, il est prévu que les écoliers de Jérusalem viennent découvrir le projet. Car l’objectif du projet intitulé « Gethsémani : conserver le passé et préparer l’avenir » est aussi d’approfondir la connaissance et le lien de tous les jeunes de Jérusalem avec leur territoire si riche par son histoire et la diversité de ses productions artistiques.

Au plafond, les blasons reprennent peu à peu des couleurs. Ils rappellent aux visiteurs que le deuxième nom de la basilique est : Église de Toutes les Nations.  Durant les travaux, les échafaudages essaient de se faire le plus discret possible. Quelque cinq mille pèlerins passent chaque jour sur le site qui fait mémoire de l’agonie du Christ.

Le chantier est d’importance pour ce lieu saint entretenu par la Custodie depuis le XIVe siècle. Espérons que dans l’avenir les mosaïques restaurées attireront nos regards.


[1] Voir La Terre Sainte N° 620, Juillet-Août 2012 «Une ONG franciscaine».

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