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Eglises au Liban: il faut «immédiatement» un président

Christophe Lafontaine
15 novembre 2022
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Eglises au Liban: il faut «immédiatement» un président
Le patriarche des maronites, dimanche 13 novembre, à Bkerké ©Patriarcat maronite

Au Liban, les chefs catholiques réunis du 7 au 11 novembre ont redit la priorité pour le parlement d’élire un président. Dimanche, le patriarche maronite a aussi demandé une conférence internationale pour le pays.


Le mandat présidentiel de six ans de l’ancien président Michel Aoun a expiré le 31 octobre. Le siège est donc vacant depuis 15 jours. La chambre monocamérale libanaise s’est réunie cinq fois, en vain, depuis le début de la période électorale fin août pour tenter d’élire un nouveau président.

Faute de consensus et de dialogue entre les partis politiques, une autre session est prévue le 17 novembre. De plus, Michel Aoun a signé, la veille de son départ du pouvoir, un décret « acceptant la démission » du gouvernement intérimaire du pays, contestant de ce fait au Premier ministre démissionnaire le droit de diriger le pays.

A cause du blocage politique et de la paralysie des institutions qui en découle, beaucoup craignent que l’absence d’un chef à la tête de l’Etat empêche de mettre en œuvre les réformes demandées par le Fonds monétaire internationale (FMI) dans le cadre d’un accord qui fournirait au Liban – si tant est que sa finalisation soit possible – une aide de trois milliards de dollars.

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Face à cette vacance du pouvoir exécutif, dans une longue déclaration à l’issue de leur 55e session annuelle ordinaire au siège patriarcal maronite de Bkerké du 7 au 11 novembre, l’Assemblée des patriarches et évêques catholiques du Liban a alerté sur le fait qu’ «un Etat sans président tombe dans une paralysie totale ». Pour eux, « aucune priorité n’est supérieure à celle d’élire un Président de la République ».

Ils exhortent ainsi vivement les représentants à élire « immédiatement un président de la république ».  Au Liban, le président de la république doit être un catholique maronite, le premier ministre un musulman sunnite et le président du parlement un musulman chiite.

De la responsabilité des représentants de la nation

L’assemblée épiscopale de la semaine dernière était présidée par le Cardinal Bechara Boutros Raï patriarche des maronites, avec la participation notamment des patriarches Mor Ignace Youssef III Younan, patriarche pour les Catholiques syriens, Mor Youssef Al-Absi, patriarche pour les catholiques melkites, Mor Raphael Pedros, patriarche des catholiques arméniens. Le nouveau Nonce apostolique au Liban, Mgr Paolo Borgia était également présent.

Alors que plus de 80% de la population libanaise vit en dessous du seuil de pauvreté, « le Liban traverse l’étape la plus dangereuse de son histoire politique, sociale, économique et financière », se sont émus les prélats. Et sans président, ont-ils ajouté, « il ne peut y avoir de protection de la constitution, de contrôle sur le travail régulier des institutions de l’Etat, de séparation des pouvoirs et d’issue à la paralysie politique, économique et financière », faisant porter la responsabilité « aux représentants de la nation et de leurs blocs ».

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A ce sujet, le pape François, de retour de sa visite apostolique au Bahreïn du 3 au 6 novembre (à laquelle a d’ailleurs participé le cardinal Raï), a abordé dans l’avion papal le vide du pouvoir au Liban, en confiant : « le Liban a une importance énorme pour nous tous. Et le Liban souffre en ce moment. C’est pourquoi je prie, et je profite de cette occasion pour lancer un appel aux politiciens libanais : laissez de côté les intérêts personnels, prêtez attention au pays et parvenez à un accord ». Et d’ajouter : « D’abord Dieu, puis le pays, puis les intérêts personnels ». A noter que le voyage du Pape au Liban, qui avait été annulé, n’a pas encore été replanifié.

Raï pour une conférence internationale sur le Liban

Le 13 novembre, dans son homélie dominicale, le patriarche pour les maronites a remis une couche sur le sujet : « le président de consensus souhaité ne peut être choisi que par des scrutins quotidiens successifs et des consultations entre les autres blocs parlementaires ». Ne mâchant pas ses mots, il a aussi déploré : « l’échec lamentable du Parlement à élire un président durant cinq séances qui ont été une farce » et « l’échec de tous les dialogues ».

Face à cela, le chef de l’Eglise catholique maronite a déclaré ne pas voir d’autre solution qu’une conférence internationale pour le Liban. Et ce, « pour renouveler la garantie de l’existence libanaise indépendante, de l’entité et du système démocratique, et le contrôle de l’État seul sur son territoire sur la base d’abord de sa constitution, puis de toutes les résolutions internationales émises concernant le Liban ».

Le patriarche Raï soutient en outre que « les Nations Unies souhaitent que chaque pays qui se considère comme un ami du Liban se déplace pour organiser cette conférence ». Et fait valoir à ce titre que « lorsque ces pays veulent réaliser quelque chose, ils le réalisent immédiatement, quels que soient les obstacles »

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