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Israël et la Jordanie au chevet du Jourdain

Christophe Lafontaine
22 novembre 2022
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Un prêtre orthodoxe chrétien remplit une bouteille d'eau du Jourdain à Qasr el-Yahud, 2010 ©Nati Shohat /Flash 90

L’Etat hébreu et le Royaume hachémite ont signé le 17 novembre, une déclaration d’intention pour la protection du Jourdain. Un engagement à l’aune de la valeur écologique, religieuse et touristique du fleuve.


Main dans la main pour le développement durable. Lors d’une réunion bilatérale tenue en marge de la COP27, la conférence de l’Onu sur le climat à Charm el-Cheikh en Egypte qui s’est terminée dimanche dernier, une déclaration d’intention a été signé entre Israël et la Jordanie – l’un des pays les plus pauvres au monde en eau -pour la réhabilitation du Jourdain, la restauration de son débit et par ricochet pour améliorer les ressources hydriques de la mer Morte. « L’accord a été signé après un long travail préparatoire par Israël et la Jordanie au cours de la dernière année et demie », a indiqué Haaretz.

Outre sa haute valeur environnementale, le Jourdain recèle une grande importance religieuse, touristique et géopolitique. Importance religieuse et touristique parce que le fleuve est le lieu où Jésus a été baptisé et qu’il est devenu un lieu de pèlerinages sources de revenus économiques importants pour le tourisme religieux.

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Importance géopolitique aussi car le fleuve frontalier – long de 251 kilomètres -sépare également la Jordanie de la Cisjordanie et subi les affres du conflit en Terre Sainte. Pour autant, l’Autorité palestinienne n’est pas associée à la déclaration quand bien même des dizaines de milliers de Palestiniens vivent le long de la vallée du Jourdain.

Cela s’explique par le fait que le document concrétise ce qui est prévu dans l’accord de paix de Wadi Araba signé entre la Jordanie et Israël en 1994 avec des dispositions surune collaboration pour l’exploitation des ressources en eau concernant le fleuve.

Une étape historique

Mais les répercussions du conflit israélo-palestinien ont tendupendant plusieurs décennies les relations entre les deux pays et un refroidissement plus marqué ces dernières années a contribué à freiner les actions visant à sauvegarder l’approvisionnement en eau du Jourdain. La déclaration d’intention de la semaine dernièreest donc une première étape mais qui a son importante car « il s’agit du premier accord environnemental depuis l’accord de paix » entre les deux pays, a twitté Tamar Zandberg, ministre israélienne de l’environnement qui a signé la déclaration d’intentionaux côtésdu ministre jordanien de l’Eau et de l’Irrigation, Mohammad al-Najjar.

Le ministère de l’Eau de la Jordanie a dit espérer que cela puisse contribuer à fournir « davantage d’eau pour les habitants sur chaque rive du fleuve, dont les Palestiniens », d’après un communiqué publié par Petra, l’agence officielle jordanienne. En plus de créer des opportunités d’emplois.

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Le fleuve frontalier est l’une des principales ressources en eau de la région mais menacée par le dérèglement climatique qui a accéléré le processus d’évaporationet la diminution des pluies. Le fleuve souffre aussi depuis des années de la pollution, de la pression démographique, de pompages en amont et de détournements d’eau pour l’agriculture.

Réduire la pollution et favoriser une agriculture durable

Ce qui a de graves répercussions sur la santé des habitants, sur l’écosystème naturel de la faune et la flore locales et sur la mer Morte puisqu’une seule fraction du débit d’eau d’origine du Jourdain atteint aujourd’hui son embouchure dans le lac salé. L’ONG EcoPeace Middle East, qui réunit des écologistes jordaniens, palestiniens et israélien,en saluantla déclaration israélo-jordanienne, a fait savoir que le débit du fleuve était passé de 1,3 milliard de mètres cubes à 30 millions en l’espace de 50 ans.

Il n’y a pas encore de détails précis sur la manière dont les deux gouvernements comptent travailler ensemblesur ce plan. Mais selon une communication du gouvernement israélien, Israël et la Jordanie souhaitent réduire la pollution du fleuve en construisant des usines de traitement des eaux usées et en connectant les villes riveraines à un système d’égouts efficient pour empêcher que soient déverséesles eaux usées brutes dans le fleuve.

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Les deux pays entendent également promouvoir une agriculture durable, en maîtrisant le ruissellement des eaux des champs cultivés et en réduisant l’utilisation des antiparasitaireschimiques. « Le défi est maintenant de trouver les financements nécessaires de la communauté internationale », a affirmé à l’AFP le directeur d’Ecopeace, Gidon Bromberg.

Toujours lors de la COP27, les deux pays ont renouvelé l’accord « énergie contre eau », par lequel la Jordanie fournit de l’énergie solaire à Israël en échange d’eau potable. D’après les experts, les précipitations en Jordanie pourraient chuter de quasiment un tiers d’ici 2100, tandis que la température moyenne pourrait augmenterd’environ 4,5 degrés

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