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Noël en Orient: le calendrier copte donne le « la » des festivités orthodoxes

Alberto Elli
1 décembre 2022
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Noël en Orient: le calendrier copte donne le « la » des festivités orthodoxes
Le décalage de calendrier avec les arméniens permet à ces derniers de donner à l’Église copte orthodoxe de célébrer sur son autel principal dans le transept nord de la basilique de la Nativité ©Marcin Mazur/Montage TSM

Les Coptes célèbrent Noël le 7 janvier, selon la date fixée par un calendrier directement hérité de l'Egypte Antique qui leur est propre. Histoire, explications, et quelques traditions.


Chez les chrétiens de Terre Sainte, Noël se fête à trois dates différentes : 25 décembre, 7 janvier et 18 janvier. Pendant l’Avent, Terre Sainte Magazine vous invite à comprendre la disparité de ces dates et découvrir comment se célèbrent ces autres Noël dans les Églises orientales à Bethléem. Les articles sont extraits du dossier du numéro 664 (Novembre-Décembre 2019).


Les coptes orthodoxes forment la plus grande communauté chrétienne du Moyen-Orient. Majoritairement basés en Egypte, on les trouve aussi en Ethiopie, au Liban, en Jordanie, et bien évidemment en Terre Sainte.

Ils fêtent Noël le 7 janvier. Soit le 29 du mois de khoiak dans leur calendrier, en vigueur en Egypte et en Ethiopie. Les Coptes ne suivent en effet ni le calendrier Grégorien des catholiques, ni le Julien des orthodoxes. Ils ont leur propre manière de décompter les mois et les années, héritée du calendrier utilisé dans l’Egypte Antique. Le nom des mois est par exemple resté identique.

L’ère Copte, appelé « Ère des martyrs » ne débute pas avec la naissance du Christ, mais en 284 de notre ère. Cette année correspond à l’arrivée au pouvoir de l’empereur Dioclétien, responsable des derniers grands massacres contre les chrétiens. Le nouvel an Copte est célébré le 11 septembre de notre calendrier.

Un texte du moine Jean Cassien, qui a vécu pendant dix ans avec les moines égyptiens vers la fin du IVe siècle, affirme qu’en Égypte la célébration de la Nativité du Christ et celle de l’Épiphanie avaient lieu le même jour, le 6 janvier. Une grande partie de la documentation égyptienne, cependant, avant et après Cassien, témoigne de la distinction des deux dates dans toutes les Églises, à l’exception des arméniens restés fidèles à la date du 6 janvier.

Noël et Epiphanie : deux fêtes distinctes

D’après un texte attribué à Clément d’Alexandrie (150-215), la fête du baptême du Seigneur était célébrée en Égypte, en particulier par les disciples de Basilide, maître religieux du gnosticisme chrétien primitif, depuis le IIe siècle, le 11 de tobe, le 5e mois ; cette date, correspondant au 19 janvier, prévalut dans la tradition et reste toujours la fête de l’Épiphanie chez les coptes.

Célébration de la Nativité chez les coptes à Bethléem ©Marcin Mazur

Clément parle aussi du «jour de la naissance de notre Sauveur» qui, dit-il, aurait été selon certains, le 25 pakhon (20 mai) de l’an XXVIII du règne d’Auguste ou, pour d’autres, les 24 et 25 pharmuti (19-20 avril) ; bien qu’il ne parle pas ouvertement de la célébration de Noël, cela semble pouvoir se déduire lorsqu’il dit qu’en Égypte les disciples ont «aussi» célébré l’Épiphanie.

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L’existence du jour de Noël distinct de la fête de l’Épiphanie est évidente dans deux «homélies sur Noël» en copte, conservées à Turin – l’une attribuée à Athanase, évêque d’Alexandrie (328-373), l’autre à Proclus, patriarche de Constantinople (434-446). On lit dans la première : «La naissance de notre Seigneur Jésus-Christ s’est passée ainsi : il est né le 29 du mois de khoiak, à la 7e heure de la nuit, et fut baptisé à la 10e heure de la nuit, le 11 de tobe par Jean le Baptiste». La date du 29 khoiak (4e mois de l’année copte) trouve une preuve probable vers la fin du IIIe siècle et des preuves certaines dans la première moitié du IVe siècle.

Deux jours de fête pour Noël

L’archimandrite Chenoudé d’Atripé (vers 348-466 environ), contemporain et ami du patriarche alexandrin saint Cyrille (412-444), a écrit que les Pères du concile d’Ephèse (431) décidèrent de prolonger la fête de Noël (il n’y en a pas de plus solennelle) sur deux jours, les 28 et 29 khoiak, afin d’offrir aux fidèles une plus large occasion de se réjouir et aux travailleurs un temps de repos. Le Synaxaire (calendrier des fêtes – ndlr) considère de fait les 28 et 29 khoiak comme des jours de fête, même s’il reconnaît la prévalence liturgique au second jour.

L’extension de la fête à deux jours, en plus des considérations liées aux années bissextiles, est justifiée par le fait que «les Docteurs et les Pères de l’Église ont décidé d’un commun accord de célébrer Noël sur deux jours, afin que la Nativité ait lieu à la fin de la nuit du 28 khoiak et qu’elle soit manifestée le jour 29». C’est-à-dire qu’elle soit révélée le 29 aux rois mages.

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Dans les deux cas le rôle de Marie est absolument prédominant. En tant que mère du Christ, «celui qu’elle a porté dans ses entrailles», elle a un rôle de premier plan, si bien que l’on peut presque dire que Noël est sa fête. Dans les deux homélies citées supra, les textes semblent déjà ordonnés pour faire une véritable apothéose de Marie, de laquelle est né le Christ.

D’autre part, les coptes consacrent depuis très longtemps tout le mois de khoiak à la Mère de Dieu, mois au cours duquel se réalise le mystère de la Nativité. Durant ce mois-là l’Église copte adopte en effet une psalmodie spéciale centrée sur les thèmes de l’incarnation du Logos, le Fils de Dieu, et de la louange de la Théotokos, la Mère de Dieu.

Noël est précédé d’une longue période de jeûne de 43 jours : elle commence le 16 hatur (25 novembre) et se termine la veille de Noël. A l’origine, ce jeûne ne durait «que» 40 jours, mais vers la fin du Xe siècle, 3 autres jours furent ajoutés pour commémorer le soulèvement miraculeux de la montagne Mokattam au Caire, qui eut lieu, selon l’hagiographie copte, le 27 novembre 978, sous le patriarche copte Abraham (975-978).

En Egypte, pays musulman où les Coptes représentent près de 10% de la population, le 7 janvier est un jour férié.


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