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Le père Frédéric, ou le bonheur complet

David Grenier, ofm
27 mai 2016
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Le père Frédéric, ou le bonheur complet
Inédit. Le père Frédéric célébrant l’eucharistie au bord du Jourdain vers 1880 © Archives de la Custodie de Terre Sainte

Tout jeune encore, ma grand-mère me disait : “Prie le bon Père Frédéric”. Puis elle me montrait une image de ce bienheureux qu’elle conservait religieusement (c’est le cas de le dire). Sur cette image, on pouvait percevoir, dans son regard, la lumière de Dieu.


Le “bon Père Frédéric” ! Celui qui, après plusieurs années passées en Terre Sainte, termina ses jours au Québec, pas très loin d’où j’ai grandi, là où il repose jusqu’à aujourd’hui, en paix pour avoir servi sans relâche le Seigneur durant les 77 ans que dura sa vie.

Vous vous souvenez, il y a un an précisément, deux nouvelles saintes, arabes de Terre Sainte, venaient d’être canonisées à Rome. Et je vous disais que les gens d’ici les considèrent un peu comme des membres de la famille, des personnes auxquelles on peut s’identifier.

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Pour moi, le Père Frédéric remplit ce rôle : parti du Nord de la France, il finira sa vie au Canada, comme mes lointains ancêtres. Je me retrouve également dans son amour pour saint François et pour la Terre Sainte. J’aimerais bien en dire autant de son humilité, de sa foi, de son abandon à la volonté divine, du don de sa vie totalement offerte à Dieu et de son infatigable dévouement pour les autres.

J’ai malheureusement encore beaucoup de travail à faire à ce niveau… mais je sais que j’ai en Frédéric Janssoone, le bon Père franciscain, un modèle et un intercesseur pour m’aider à y arriver. À la grâce de Dieu…

“Tout est grâce”

C’est d’ailleurs ces mots, “à la grâce de Dieu”, qui modelaient sa vie. Il se rendait bien compte, comme sa contemporaine, sainte Thérèse-de-l’Enfant-Jésus, que “tout est grâce”. Il prie avec foi – et obtient bien des miracles -, mais il ajoute, comme Jésus à Gethsémani, ce Gethsémani qu’il a si bien connu, tant pour l’avoir parcouru à Jérusalem que pour l’avoir visité spirituellement : “Que ta volonté soit faite. Non pas comme je veux, mais comme tu veux”.

Ce faisant, il constatera que bien souvent, sa volonté correspondait à la volonté de Dieu, soit parce que, rempli de l’Esprit saint, ses désirs étaient orientés vers le Seigneur, ou bien parce que Dieu, tout-aimant pour son enfant, choisissait de lui faire plaisir en accédant à ses demandes.

En ce sens, il écrira : “Je fais beaucoup de projets, mais plus comme autrefois, avec préoccupation (…) Je laisse tout entre les mains de Dieu (…) le succès ou l’insuccès me sont indifférents (…) Daigne le Seigneur dans sa miséricorde, me conserver dans cette tranquille et sereine indépendance de cœur.”

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Une telle déclaration pourrait paraître irresponsable, et pourtant, on est devant la méditation d’un saint. Porté par la foi, il était convaincu que Dieu prend soin de tout ce qui lui est confié. Dans un tel contexte, peu importe le résultat, la réussite ou l’échec, ce sera toujours pour le mieux. Cela ne veut pas dire que tout ce qui se produit dans le monde est volonté de Dieu, mais bien qu’il n’y a aucune prière qui, auprès de Dieu, reste sans réponse.

“Le bonheur, ce rêve de notre vie »

Lorsqu’on fait confiance au “Bon Dieu”, lui se montre toujours digne de cette confiance. Quel Père donnerait un serpent à son fils qui lui demande du pain ? Et quel Père, bon comme Dieu l’est, ne donnera-t-il pas plutôt du pain à son fils qui lui demande un serpent ? Cette certitude, c’est ce qui permet de vivre en plénitude, comme le fit le P. Frédéric, le message pascal : “La paix soit avec vous”.

Lui qui rêvait de terminer ses jours au Mont Thabor, pour y trouver, dans la méditation du mystère de la Transfiguration, un avant-goût de la béatitude céleste, quittera ce monde plutôt à Montréal le 4 août 1916, deux jours avant cette fête. Il l’aura donc célébrée en contemplant dans toute sa splendeur la gloire de Dieu.

Il expérimentera alors en profondeur ce qu’il avait écrit quelques années plus tôt : “Le bonheur, ce rêve de notre vie, le bonheur, après lequel nous soupirons ici-bas, et que nous demandons à tout ce qui nous entoure, n’est pas un bonheur quelconque, mais un bonheur complet, un bonheur sans mélange et sans fin. Quand Dieu créa le bassin des mers, ce ne fut pas pour y verser quelques gouttes d’eau ; de même, quand il forma notre cœur, ce ne fut pas pour lui donner quelques parcelles de bonheur, mais pour l’en combler”.

Dernière mise à jour: 09/01/2024 20:32

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