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Le Tombeau des rois ouvert au public

Marie-Armelle Beaulieu
30 novembre 2019
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Tenu pour être le tombeau des rois David et Salomon, les charmes du lieu tombèrent quand au XIXe siècle on n’y vit plus que la tombe d’une reine méconnue. Au XXIe siècle la polémique de la propriété vaut au site un regain d’intérêt.


↗ Tombeau de qui au juste ?

Quand il découvrit le site en 1850, Ferdinand de Saulcy posa la thèse qu’il s’agissait du tombeau des rois de Juda. Si Saulcy découvrit le site à son arrivée en Terre Sainte, il n’en était pas l’inventeur. Depuis des siècles déjà, les pèlerins y voyaient le tombeau des rois David et Salomon. Quand le caractère scientifique de l’archéologie s’affirma, la thèse ne tint plus. Et de la fin du XIXe siècle au début du XXIe siècle, on estima que le tombeau état celui de la reine Hélène d’Adiabène, un royaume assyrien, convertie au judaïsme. En 2018, le père Jean-Baptiste Humbert est venu bousculer ces certitudes posant l’hypothèse qu’il s’agirait d’un tombeau jamais achevé, dû à l’ambition d’Agrippa Ier.
Photo du site en 2005.

 

Un site exceptionnel ?
En 1615, un religieux franciscain, Jean Boucher, n’hésitait pas à qualifier l’endroit de 8e merveille du monde. Flaubert en 1850 déclarait au contraire : “Cela n’a rien que de très médiocre ; c’est un travail de carrier assez habile, voilà tout”.
Les archéologues estiment que le site a en tout état de cause été pensé pour être impressionnant. Jean-Sylvain Caillou proposait dans une étude la reconstitution ci-contre. Il estime que l’ensemble devait être couvert d’un nefesh, un monument funéraire sémite destiné à rendre repérable le tombeau de loin. Son escalier monumental devait s’ouvrir derrière une porte.

 

Restauration
Si la France a de tout temps veillé sur son domaine, il convenait au XXIe siècle de remédier aux injures du temps. Il fut donc entrepris un long processus de restauration du site, d’autant plus long qu’il fallait envisager l’ouverture au public et travailler en accord avec les archéologues. Le plus gros travail réalisé est celui qui a consisté à restaurer ce qui restait de la frise au-dessus de l’entrée. Il faudra dorénavant veiller à désherber régulièrement le moindre interstice des façades. Le Consulat Général de France n’avance aucun montant pour les restaurations. Il se chiffre, selon toute vraisemblance, en millions d’euros.

 

Réouverture
Le site est dorénavant ouvert deux matinées par semaine, pour des groupes de 15, pour une durée maximale de 45 minutes, sur réservation, pour la somme de 10 shekels (2,50 euros) par personne.
Les tombes demeurent inaccessibles, les chambres funéraires ne pouvant être viabilisées pour la visite. Il faut réserver sur le site du Consulat Général de France à Jérusalem qui renvoie vers une plateforme d’inscription.
Sur la photo, des touristes regardent l’intérieur des bains rituels, mikvé en hébreu.

 

Polémique
Quand Saulcy découvrit un magnifique sarcophage dans une chambre secrète de l’hypogée, il voulut protéger le site du pillage. Comptant au rang de ses amis la famille Péreire, des juifs français, il leur recommanda d’en faire l’acquisition. Les tractations aboutirent en 1878. Mais parce que des étrangers ne pouvaient acheter de terrains durant l’empire ottoman, le titre de propriété fut rédigé au nom de monsieur Patrimonio, Consul de France à Jérusalem. En 1886, les Péreire cédèrent définitivement le tombeau à la France l’enjoignant de “le conserver à la science et à la vénération des fidèles enfants d’Israël.”
Cette propriété est remise en cause aujourd’hui par des juifs qui veulent faire de ce site archéologique un lieu saint du judaïsme. (Voir la série d’articles sur le site www.terresainte.net)

 

Entrée des tombes toujours interdites
L’entrée de l’hypogée se trouve au fond d’un trou. Une échelle est nécessaire pour y accéder. Le système de fermeture illustre bien celui des tombes royales de Jérusalem de cette même période, avec une pierre qui roule dans une échancrure du sol. Cette unique ouverture est aussi le seul passage d’air, si bien que l’humidité de condensation rend le sol glissant et la visite un peu risquée. On comprend dès lors, en plus du respect dû à un ensemble sépulcral, que les visites soient impossibles au “grand public”.

 

Intérieur
Une fois l’étroite porte franchie on trouve un vestibule qui dessert trois salles hypogées renfermant une trentaine de tombes. Toutes sont dotées de leur propre ossuaire. Deux types de tombes ont été creusés dans la pierre. Soit de simples loculi, des niches pour accueillir un ou deux corps, soit des tombes voûtées dites arcosolium, un peu plus élaborées, allant toujours par paire.

Dernière mise à jour: 15/04/2024 13:51

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