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Et si le coronavirus était une opportunité pour Daech

Terrasanta.net
7 avril 2020
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Et si le coronavirus était une opportunité pour Daech
Les militants de Daech ont défini le Covid-19 comme un châtiment divin contre les païens. ©Terrasanta

La pandémie de Covid-19 est utilisée par l'organisation terroriste à des fins de propagande et comme une occasion pour inciter à des actions terroristes en Occident.


La pandémie de Covid-19 est utilisée par l’organisation terroriste à des fins de propagande et comme une occasion pour inciter à des actions terroristes en Occident.

La contagion du Covid-19 dans le monde entier, et au Moyen-Orient en particulier, soulève un problème majeur. Les gouvernements, face au risque de véritables révoltes sociales (par exemple, il y a quelques jours à Tripoli au Liban, le risque est devenu réalité), ont donné des directives aux agences nationales de renseignement et aux forces de l’ordre pour travailler à la prévention des troubles causés par les répercussions économiques ou pour lutter contre les épisodes de criminalité liés à la récession. Ce qui interroge quelque peu quant à l’impact de la pandémie dans la lutte contre le terrorisme, Daech en tête.

La question est précisément soulevée dans une contribution d’Ahmed Kamel Al-Beheiri, paru le 26 mars dernier dans l’hebdomadaire égyptien Al-Ahram. L’analyste, expert en terrorisme, souligne que la pandémie a « inévitablement conduit à un déclin relatif des niveaux de sécurité et des services de renseignement chargés de lutter contre l’Etat islamique. Un fait qui pourrait offrir à l’organisation la possibilité de se renouveler et de se réorganiser, notamment en Syrie et en Irak ». Mais aussi dans les pays d’Afrique subsaharienne, où le virus se propage de manière sournoise et souvent loin des feux des médias.

Pour comprendre comment Daech a immédiatement exploité le Covid-19 comme source de propagande, il suffit d’enregistrer ce que Naba, l’organe de presse de l’organisation terroriste, a rapporté le 20 janvier. Le journal, en substance, s’est « réjoui », en définissant le virus comme une « manifestation de la colère de Dieu contre les sociétés païennes dans le monde ». Une position qui ne diffère pas de celle de nombreux « fondamentalistes » locaux, où le terme « païen » signifie évidemment « non-musulman ». L’invitation est conséquente : se repentir et se réfugier dans les bras de l’Islam (que Daech prétend représenter) afin de se préserver de la contagion.

Les considérations de fin janvier – souligne Al-Beheiri – ont ensuite été partiellement revues. Il se trouve que les musulmans sont loin d’échapper à la contagion. Pour eux aussi, a expliqué la Naba dans un numéro ultérieur, des normes d’hygiène de base sont nécessaires, comme la protection respiratoire, le lavage des mains, la mise en quarantaine pour les personnes malades, etc. Somme toute, le virus se propage par la volonté de Dieu, mais les hommes ont aussi une grande part de responsabilité dans la propagation de la contagion.

En plus d’appuyer sur le bouton du fidéisme pour recruter de nouveaux adeptes, Daech utiliserait tous ses canaux d’information et ses canaux sociaux (en particulier le dark web) pour inciter ses adeptes à « mener des attaques contre les pays européens ». Un article intitulé Le pire cauchemar des Croisés, Naba (n. 226, 19 mars 2020), rapporte que les agences de sécurité occidentales accordent moins d’attention à Daech et à ses stratégies terroristes précisément en raison de l’inquiétude actuelle concernant le coronavirus. « Ce qui – explique Al-Beheiri – permet aux partisans de l’organisation de mener des actions meurtrières, en particulier à Paris, Londres et Bruxelles. Cette incitation explicite à la violence terroriste, qui identifie des cibles potentielles, devrait élever le niveau d’alerte, en particulier en Europe ».

Au fond, et c’est l’un des paradoxes tragiques de notre époque, l’un des effets secondaires du drame du coronavirus pourrait être de restaurer l’Etat islamique, peut-être trop hâtivement pris pour mort en termes de structure, d’organisation et de nombre de membres.

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