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Khader Abu Gharfeh: « Avant, je ne pensais pas qu’il y avait des gens croyants »

Nizar Halloun
26 juillet 2016
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Khader Abu Gharfeh: « Avant, je ne pensais pas qu’il y avait des gens croyants »
Il aime observer les pèlerins comme les pèlerins l’observent lui et son intimité avec le tombeau de Jésus ©Nizar Halloun/CTS

Le même Saint-Sépulcre qui déstabilise tant de pèlerins, est celui qui instruit et renforce la foi de Khader. Il y travaille au service des franciscains dans le temps libre laissé par ses études de tourisme. Rencontre avec un jeune et ses passions : le sport, la prière et Jérusalem.


Khader Abu Gharfeh, 21 ans, se réveille à l’aube, se prépare, et marche dans les ruelles somnolentes de la vieille ville de Jérusalem. À 5 h 55 il attend l’ouverture des portes du Saint-Sépulcre pour commencer sa journée de travail.

“J’ai toujours vécu dans la vieille ville de Jérusalem avec toute ma famille, commence Khader d’un ton posé. Tous mes proches de mon âge sont aujourd’hui à l’étranger. Ils y sont pour leurs études, y resteront-ils ? Peut-être. Personnellement j’ai failli être séduit aussi mais j’ai vite rejeté l’idée d’émigrer.” Pour bien d’autres raisons que le confort du nid familial. Le jeune homme se sent plus que tout ancré dans cette ville où il est né. “C’est dur à expliquer, il y a quelque chose de spécial dans ce pays, comment décrire le lieu où le Christ a marché ?”

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Interrogé sur son lien à Jérusalem, le rapport est tout simplement celui d’un jeune avec sa ville. “Les jeunes de la vieille ville sont très attachés à ses murs, nous l’aimons beaucoup. Ceux qui reviennent dans le pays veulent retrouver cet attachement, son atmosphère familiale”, estime-t-il.

“Lorsque les gens me demandent ce que je fais et que je leur dis que je travaille au Saint-Sépulcre, ils sont étonnés, et là les questions s’enchaînent, explique-t-il. Je leur parle de la beauté du lieu et de son histoire autant que possible.” Au Saint-Sépulcre “tout est minuté et organisé, je sais ce que je dois faire, quand et comment. Mon travail est rythmé par le statu quo, déclare-t-il avec un brin de fierté. Moi ça me convient, ajoute-t-il, je suis un maniaque du temps.”

La prière et le sport

“Avant, je ne pensais pas qu’il y avait des gens croyants, j’étais persuadé que tous se montraient en spectacle. Aujourd’hui je sais qu’il y a réellement des gens qui prient et qui évangélisent. Au Saint-Sépulcre je suis témoin de leur foi : ceux qui se réveillent tôt pour venir prier, ceux qui viennent visiter quotidiennement le Tombeau, ceux qui prient et pleurent debout ou à genoux devant l’Édicule.” Une prise de conscience en partie provoquée par la foi de l’autre explique-t-il.

“Quand tu es entouré quotidiennement par des gens qui prient, tu es d’autant plus ancré dans la vérité intemporelle du Christ. Tu es renforcé spirituellement mais aussi théologiquement parce que quotidiennement instruit par les rencontres. C’est une lieu riche en rencontre humaines. Si j’avais des doutes dans le passé, ce travail les dissipe”, souligne-t-il.

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Comment rester dans le bon chemin ? La réponse de Khader est simple : “Je me défoule avec deux choses, la prière et le sport. Par le sport j’exerce mon corps et décante mon esprit. Par la prière, je nourris mon âme et m’approche de Dieu, et mes inquiétudes s’apaisent.”

“Je suis une personne très chanceuse et je souhaite à tous de vivre ce que je vis au Saint-Sépulcre. Je remercie Dieu de m’accorder cette grâce, et de vivre dans cette ville sainte malgré les difficultés”, conclut-il avant d’ajouter : “Lorsque tu vis dans cette vieille ville, que tu as la foi et que tu travailles au Saint-Sépulcre, tu es comme on dit en arabe “le sultan (le maître) de tes temps”.

Dernière mise à jour: 10/01/2024 20:28

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