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Statut de Jérusalem : ce que dit l’Église

Christophe Lafontaine
30 janvier 2018
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Statut de Jérusalem :  ce que dit l’Église
Quand on voit se dessiner sur l’horizon la ligne de ses dômes, clochers et minarets. Quand elle résonne de ses sirènes de shabbat, cloches des messes et services et que retentit l’appel du muezzin, qui oserait dire que Jérusalem avant d’être une capitale politique pour qui que ce soit, est une capitale spirituelle pour l’humanité.

Le Saint-Siège, en dénonçant la décision des États-Unis de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël a redit la nécessité d’accorder à la ville sainte un “statut spécial internationalement garanti”.


Sacrée pour les Juifs, les chrétiens, les musulmans. Cœur spirituel pour des millions de croyants. Jérusalem est “un trésor pour l’humanité”. L’Administrateur apostolique pour le patriarcat latin, par ces mots, a usé d’une image forte pour insister sur “la nature unique de la ville sainte.” Mgr Pizzaballa intervenait deux jours après la déclaration unilatérale, le 6 décembre 2017, par Washington de reconnaître Jérusalem comme capitale de l’État hébreu venant balayer un consensus selon lequel le statut de Jérusalem ne pourra changer que lorsque les Israéliens et les Palestiniens tomberont d’accord. Qui plus est, pour le Saint-Siège, cette déclaration vient nier la ville elle-même dans sa singularité. Elle qui existe en raison de la présence de trois religions et de deux peuples.

Garantir la paix

C’est dans ce sens que Mgr Pizzaballa a aussi voulu signifier que “toute revendication exclusive, qu’elle soit politique ou religieuse, est contraire à la logique même de la ville.” En ajoutant, au soir de Noël, devant ses fidèles : “Jérusalem est notre mère” et si la mère perd un de ses enfants, elle “ne peut trouver la paix.”

Des propos qui ne sont pas sans rejoindre ceux tenus par la Mission permanente d’observation du Saint-Siège auprès des Nations unies, le 21 décembre 2017 dernier. La délégation a en effet de nouveau appelé à “une résolution pacifique qui respecte la nature de Jérusalem, son caractère sacré et sa valeur universelle, et réaffirme que seul un statut internationalement garanti peut préserver son caractère unique et garantir le dialogue et la réconciliation pour la paix dans la région.”

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Ce qui est donc en jeu pour le Saint-Siège, c’est la question de la protection de l’identité de la ville sainte dans son intégralité afin que soit préservée l’égalité des droits pour les trois religions et qu’aucun parti ne puisse se l’approprier. Dans une déclaration de 1998, qui fait office de référence, Mgr Tauran, alors “ministre des Affaires étrangères” du pape Jean-Paul II et pas encore cardinal, avait rappelé que “le caractère sacré affecte Jérusalem dans sa totalité, ses Lieux Saints comme ses communautés avec leurs écoles, leurs hôpitaux, leurs activités culturelles, sociales et économiques.” En clair, le caractère sacré de Jérusalem ne se réduit pas aux seuls monuments. Ainsi, la solution d’une simple “extraterritorialité” des Lieux Saints, avec l’assurance que les pèlerins aient la liberté de les visiter sans contrainte, n’apparaît pas comme suffisante pour le Saint-Siège. C’est en 2000, à travers l’Accord fondamental signé entre le Saint-Siège et l’OLP (l’Organisation de libération de la Palestine) que fut précisé officiellement la nécessité d’“un statut spécial pour Jérusalem, garanti internationalement” pour assurer “la liberté de religion et de conscience, l’égalité devant la loi des trois religions monothéistes, de leurs institutions et de leurs fidèles dans la ville, l’identité propre et le caractère sacré de la ville, la signification universelle de son héritage religieux et culturel et la liberté d’accès et de culte pour les Lieux Saints.”

Cette vision des choses est majoritairement portée par les différentes Églises chrétiennes en Terre Sainte. Néanmoins, Israël ne veut pas partager la souveraineté sur la ville qu’elle a reconnue en 1980 comme “capitale éternelle et indivisible”. Les Palestiniens, eux, réclament, la restitution de la partie arabe de la ville annexée illégalement par Israël en 1967.

A l’occasion de son traditionnel message de Noël, le pape a formé l’espoir “qu’une reprise du dialogue l’emporte pour parvenir à une solution négociée” entre Israéliens et Palestiniens. Quelques semaines plus tôt, Mgr Pizzaballa avançait – dans un message déterminé et audacieux – qu’“il n’y a rien qui puisse empêcher Jérusalem, dans son unicité et son unité, de devenir le symbole national des deux peuples qui la revendiquent comme capitale.”


Unité et diversité

Quand on voit se dessiner sur l’horizon la ligne de ses dômes, clochers et minarets. Quand elle résonne de ses sirènes de shabbat, cloches des messes et services et que retentit l’appel du muezzin, qui oserait dire que Jérusalem avant d’être une capitale politique pour qui que ce soit, est une capitale spirituelle pour l’humanité.

Dernière mise à jour: 30/01/2024 14:19

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