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Saint-Sépulcre: les travaux vont reprendre autour du tombeau de Jésus

Marie-Armelle Beaulieu
27 mai 2019
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C’est lors d’une conférence de presse que les chefs des Eglises, gardiennes du Saint-Sépulcre, ont signé, lundi 27 mai, l’accord qui ouvre la voie pour lancer une nouvelle phase de travaux autour du tombeau de Jésus.


Accueillis au couvent Saint-Sauveur, la maison-mère des franciscains de Jérusalem, le Patriarche grec-orthodoxe Théophilos III, le Custode de Terre Sainte Francesco Patton et le Patriarche arménien Nourhan Manoughian ont signé le 27 mai un nouvel accord historique. Les trois Eglises majeures, deux ans après la fin des travaux de restauration sur le tombeau de Jésus, se sont entendu pour envisager ensemble une nouvelle phase de restauration et réhabilitation « avec grande joie et satisfaction » d’après les termes de leur communiqué.
En effet, la première phase de restauration de l’édicule, menée de mai 2016 à mars 2017, avait fait apparaître que malgré le travail entrepris, l’édicule, écrin des restes de la grotte funéraire taillée dans le roc et dans laquelle avait été déposé le corps de Jésus après sa crucifixion, était toujours en danger. En cause : l’humidité du sol de la basilique qui ronge ses fondations.
La deuxième campagne de restauration dès lors envisagée, et qui donne lieu à ce nouvel accord, consistera à déposer tout le pavement de la basilique pour éliminer les sources d’humidité, puis le refaire permettant ainsi de le régulariser. « Quiconque a marché dans le Saint-Sépulcre comprend ce dont il est question », souriait le Custode lors de la conférence de presse.
Avec ce nouvel accord, les trois Eglises majeures, confient la responsabilité d’études de faisabilité à deux universitaires italiens et une institution scientifique. A l’automne, elles devraient procéder aux recherches qui détermineront les types de travaux à conduire, leur durée et une estimation de leurs coûts. Cette étude pourrait prendre un an. Les travaux commenceraient dans la foulée sous la direction des deux mêmes entreprises italiennes avec le support des équipes techniques des trois Eglises.
Alors que le frère Francesco Patton soulignait que la fréquentation de la basilique avait doublé depuis la restauration de l’édicule, le patriarche Théophilos estimait que pour autant les travaux devraient être moins contraignants. « Une des difficultés de la restauration sur l’édicule venait de ce que l’on devait veiller à ce que les offices religieux continuent d’y être assurés »

Une opération complexe
Le patriarche Nourhan Manoughian confiait que, selon le mot arménien, « Quand un contrat est signé, c’est déjà la moitié du travail de fait ». Pourtant la seconde moitié pourrait se révéler assez longue et complexe.
En effet, le pavement de pierres roses actuel repose sur une structure métallique attaquée par la rouille. Ce pavement recouvre un système de canalisations pour les unes datant du Mandat Britannique, les autres de l’Empire ottoman et toutes nécessitent d’être changées.
Mais ce dallage recouvre aussi et surtout des trésors archéologiques comme l’avaient dévoilé les sondages réalisés par le père Virgilio Corbo ofm dans les années 60. Ce sont des restes de la basilique érigée par l’empereur Constantin à partir de 324, mais aussi des fondations du temple d’Hadrien de 135, comme aussi un tunnel taillé dans le roc destiné à drainer l’eau qui tombait dans la basilique quand, à l’époque constantinienne et jusqu’à la moitié du XIXe siècle, le dôme était percé d’un oculus ouvert aux intempéries.
Si le père Corbo a documenté tout ce à quoi il a eu accès il y a 60 ans (voir photo), certains endroits dans les abords immédiats de l’édicule et vers l’ouest, en direction de la chapelle syriaque, pourraient donner de nouvelles informations sur les réseaux des tombes qui constituaient le cimetière à l’époque de Jésus.
Puisque c’est tout le pavement qui devrait être refait, son soulèvement à l’entrée de la basilique pourrait nous en apprendre plus sur les tombes des chevaliers croisées enterrés à cet endroit. La connaissance du lieu pourrait donc s’enrichir encore et se détailler.
En attendant, toutes ces poches souterraines sont autant de lieux où peut s’accumuler l’humidité de condensation due à la fréquentation du site, celle consécutive aux fuites des canalisations existantes, et celle résultant du ruissellement des eaux de pluies. Et il faudra aux équipes en charge des travaux des trésors d’inventivité pour résoudre les problèmes techniques sans attenter aux vestiges historiques.
Quant au financement, les chefs des Eglises ont annoncé la création d’un compte bancaire commun qu’elles viendront abonder des dons qu’elles espèrent voir faire les chrétiens lors de campagne de collectes de fonds qu’elles mèneront chacune.
Déjà le Saint-Siège en 2017 indiquait avoir provisionné une somme (d’un demi-million d’euros) pour cette seconde phase de travaux. Le 6 mai dernier, le patriarche Théophilos indiquait que le roi Abdallah II de Jordanie consacrait une partie du montant reçu au titre du prix Templeton pour le Saint-Sépulcre à Jérusalem. Il précisait ce jour que cette somme pourrait être de 125 000 euros.
La première phase de travaux sur le tombeau de Jésus s’était élevée à 4,5 millions d’euros.
« Il nous revient à nous (chefs des Eglises), indiquait le patriarche Théophilos, de maintenir et conserver le caractère chrétien de Jérusalem. Une mission qui n’est pas seulement religieuse, mais diplomatique et j’oserais dire politique. L’accomplissement de ces travaux est destiné à parachever les efforts accomplis depuis des années par les Eglises pour restaurer la basilique et lui permettre ainsi de retrouver sa splendeur », concluait le patriarche grec orthodoxe.
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