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1000 jours pour 1000 œuvres

Lucie Mottet
15 juillet 2022
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©Terra Sancta Museum

Depuis plus de 10 ans Terre Sainte Magazine (TSM) annonce à ses lecteurs l’ouverture d’un autre TSM : le Terra Sancta Museum. Un projet d’envergure destiné à présenter aux habitants, pèlerins et touristes le patrimoine culturel chrétien conservé par la Custodie de Terre Sainte. Prévu pour être inauguré en 2015 à la suite de l’exposition “Trésors du Saint-Sépulcre” à Versailles de 2013, puis reporté à 2022, le temps passe et file et le musée n’est toujours pas ouvert !

À qui jeter la pierre ? Aux pierres elles-mêmes ! Depuis le début des travaux destinés à mettre le musée en forme, le chantier s’est en effet révélé passionnant mais d’une complexité peu commune. Son aménagement – dans l’ancienne bibliothèque sous l’église Saint-Sauveur – a permis de découvrir que les fondations d’une partie du couvent, datant des XIe-XIIe siècles, étaient fragilisées. Les murs porteurs des étages supérieurs construits plus tardivement n’étant pas alignés. Il a donc fallu reprendre la structure sans perdre le cachet de cette section. Exploit des architectes et des ouvriers qui ont refait des voûtes “à l’ancienne”. Des opérations, on le devine sans peine, chronophages et délicates.

Le chantier a aussi dû s’interrompre à plusieurs reprises pour raison de découvertes archéologiques. Sous un ancien escalier se cachait un pan de mur croisé, ajoutant de nouvelles contraintes à la scénographie de la salle. Non loin de là, parmi les moellons d’un autre mur, se trouvaient deux pierres peu orthodoxes. Le contremaître intrigué les fit desceller et découvrit une base de colonne et un chapiteau géorgiens. Autant d’éléments tangibles qui témoignent de l’histoire du couvent, des couches architecturales successives et des communautés qui y firent résonner leurs pas.

Plus les recherches sur les collections avancent, plus la sélection pour l’espace d’exposition s’affine afin d’être pleinement ce musée parlant de la Jérusalem chrétienne, aussi bien locale qu’internationale.

Ces ralentissements se sont doublés de la pandémie, on s’en doute, bloquant les rencontres avec des mécènes et les levées de fonds. Sans ce nerf de la guerre, il était bien évidemment plus difficile d’avancer. Mais c’était sans compter sur la mobilisation de l’équipe du musée, qui permit de riches rencontres et des candidatures à des bourses pour la culture afin de récolter des fonds. Rédiger ces différents dossiers fut une occasion de relire le projet du musée et de le préciser à nouveau. Il apparut alors nécessaire d’élargir la place donnée à l’art chrétien local. Ainsi le dernier comité scientifique décidait-il de l’ouverture d’une salle réservée aux icônes arabes, plus particulièrement celles produites à Jérusalem. Plus les recherches sur les collections avancent, plus la sélection pour l’espace d’exposition s’affine afin d’être pleinement ce musée parlant de la Jérusalem chrétienne, aussi bien locale qu’internationale. Sagement, les 1 000 œuvres prévues à l’exposition permanente attendent dans les réserves, parfois sorties pour telle ou telle liturgie, comme ce sera encore le cas une fois le musée terminé.

Des collections attendues

Malgré ces délais rallongés, le travail ne manque pas, et dans les coulisses du musée, les membres du comité scientifique s’activent. 1 000 œuvres bientôt exposées, ce sont 1 000 œuvres à analyser, documenter, restaurer au besoin. Conservateurs et experts travaillent d’arrache-pied à la rédaction de catalogues. Paraîtront prochainement trois ouvrages sur l’orfèvrerie qui sera exposée couvrant respectivement les époques médiévales, du XVIe au XVIIIe siècle et des XIXe et XXe siècles. Dirigés par trois conservateurs du Louvre (Florian Meunier, Michèle Bimbenet-Privat, Anne Dion), il s’agira d’une collaboration internationale, la rédaction des notices d’œuvres étant répartie entre experts et conservateurs de différents musées d’Europe. Un catalogue documentant les collections de nacre de la Custodie est également en cours, co-écrit par le collectionneur palestinien George al’Ama et la chercheuse italienne Francesca Biaso.

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Si la plupart des œuvres n’attendent plus que leur présentation, une partie d’entre elles verra tout de même du pays et du public avant que le Terra Sancta Museum n’ouvre ses portes. Les collaborations du futur musée ne manquent pas : plusieurs grandes institutions internationales ont demandé des prêts importants à la Custodie. La Fondation Gulbenkian au Portugal et la Frick Collection aux États-Unis préparent de très belles expositions où les œuvres du musée seront particulièrement mises à l’honneur. Enfin les équipes se préparent à accueillir le public : un vaste plan de médiation culturelle émerge doucement, afin de soigner au mieux les futurs visiteurs. Dernières retouches à la scénographie, encore quelques recherches de fonds, beaucoup de travaux… Tout se peaufine pour accueillir autour des 1 000 œuvres du Terra Sancta Museum les Hiérosolymitains, les touristes et les pèlerins, à la date d’ouverture finalement prévue en 2025. Dans 1 000 jours, pour ainsi dire…

Dernière mise à jour: 01/05/2024 14:13

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